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Protocole sanitaire : comment les entreprises s'adaptent au gré des mises à jour ?

Santé au travail | publié le : 04.02.2022 | Murielle Wolski

Interior of cozy empty modern coworking office

« Appliquer ce protocole est bien plus facile qu’il y a deux ans, note Alexandra Amda, DRH chez Adveris, agence digitale. L’année 2020 avait été tellement complexe. Maintenant on est rodé, même si c’est synonyme de charge de travail supplémentaire. Je suis devenue Madame Covid. Répondre à toutes les questions prend du temps. Et il faut traduire le protocole. »

Crédit photo Prostock-studio - stock.adobe.com

Les mesures du dernier protocole sanitaire en entreprise mis en place depuis le 3 janvier viennent d'être allégées le 2 février dernier. Il s’agit de la cinquième mise à jour d’une série de recommandations établies par le ministère du Travail pour limiter les risques de contamination sur le lieu de travail. Comment les entreprises se sont-elles adaptées depuis un peu moins de deux ans à suivre ces consignes non obligatoires ? Récit.

Qui est en mesure d’indiquer le nombre de protocoles sanitaires définis par le Gouvernement depuis le 16 mars 2020 et le début de la crise sanitaire ? « Je ne compte plus, soupire Céline Locquet, directrice santé au travail chez Schneider Electric France. Vous parlez duquel ? »

Aucun des interlocuteurs sollicités pour cet article n’a pu fournir une réponse. Un tout petit peu plus d’un mois après son entrée en application le 3 janvier, que sait-on exactement de ce dernier protocole en date ? « On a peu de lisibilité sur les textes, commente Marcel-Edouard Bretesché, avocat spécialisé en droit social au sein du cabinet Oratio. L’effet du passe vaccinal – avec son lot de précisions – sera réduit puisqu’on va arriver au terme de l’application du télétravail, à hauteur de trois, voire quatre jours par semaine. On est clairement sur un effet d’annonce. Le Gouvernement a compris que c’était efficace. »

Routine ?

« On a été choqué, se remémore Paùlo-Antonio Lopes, directeur du groupe IGS formation continue RH, on a résisté. Et depuis, c’est du stop-and-go ! Tout le monde a appris en marchant. Le passage aux trois ou quatre jours de télétravail ? L’économie a fonctionné en confinement complet, alors on va le faire. »

« On déroule » : une expression fréquente aussi dans les témoignages des directeurs des ressources humaines. « Appliquer ce protocole est bien plus facile qu’il y a deux ans, note Alexandra Amda, DRH chez Adveris, agence digitale. L’année 2020 avait été tellement complexe. Maintenant on est rodé, même si c’est synonyme de charge de travail supplémentaire. Je suis devenue Madame Covid. Un vrai 4x4, tout terrain. Qu’est-ce que je dois faire ? Comment paramétrer tel ou tel outil ? Répondre à toutes les questions prend du temps. Et il faut traduire le protocole. »

Si les interrogations fusent quand même toujours plus du côté des petites structures, sans veille juridique constituée – de quoi nourrir l’activité des cabinets conseils et faire de la Covid un marché juteux –, effectivement les entreprises le font – enfin pour les 30 % à 40 % d’emplois ʺtélé-travaillablesʺ. « Le benchmark est un outil magique, commente Dominique Delattre-Demetz, directrice environnement de travail chez Saint-Gobain, et par ailleurs membre du comité de direction de l’Association des directeurs de l’environnement de travail (Arseg). Qu’est-ce qui se fait ailleurs ? » Un petit tour de la place économique.

« Suite à l’augmentation des cas de Covid en fin d’année, nous avions même anticipé la démarche, commente Céline Locquet, courant décembre. Les collaborateurs jouent le jeu. Comment s’installer ? Comment organiser sa journée de travail ? Comment repérer les signaux faibles ? Comment accompagner ses collaborateurs ? Cette démarche a été assortie de formations utiles, très pratico-pratiques. » Apicil, groupe de santé prévoyance, a anticipé, lui, la prolongation du dispositif. « Le Gouvernement attend souvent la fin de la semaine pour annoncer les mesures, déplore Frédéric Faye, directeur des ressources humaines du groupe. Aussi, anticiper le maintien du protocole jusqu’aux vacances de février est important pour sécuriser notre organisation et la planification des équipes. Pour offrir de la lisibilité aux managers. Avoir des directives et devoir les mettre en place pendant le week-end reste un exercice compliqué. »

Mais d’une entreprise à l’autre, d’un secteur à l’autre, la réalité peut avoir des facettes différentes. « Pour une jauge fixée à deux ou trois jours, l’acceptation est bonne, commente Laurent Termignon, directeur des activités work et rewards chez Willis Towers Watson, spécialisée dans la gestion de risques et le courtage. Mais, passer au quatrième jour reste compliqué. Dans toutes les études, les salariés trouvent leur équilibre dans un format du télétravail fixé à deux ou trois jours. Au-delà, ça coince. On navigue à vue... »

Les interprétations du protocole

« Je ressens un épuisement par rapport à ce protocole de plus, commente Dominique Delattre-Demetz, en interne, mais également chez nos prestataires, restauration, nettoyage.... Chacun l’a adopté en fonction de sa compréhension, de ses possibilités, de ses protocoles métiers, souvent plus contraignants. Utilisation de la fontaine à eau au travail ? Ou du micro-ondes ? Suppression de l’unité ou désinfectant à proximité ? Avec un protocole plus contraignant en entreprise qu’à l’extérieur… En touche-touche à l’extérieur, et pas à la cafétéria de l’entreprise… Le Gouvernement ne va jamais jusqu’au point de détail. Ce sont les branches métiers qui créent leurs protocoles. »

Et il y a la vie au quotidien. Les adaptations. La marge de manœuvre que les RH octroient sur le terrain. « Aux collaborateurs vraiment lassés, explique Céline Locquet, et en accord avec le management, une autorisation est donnée de venir sur site un peu plus. Ça se compte sur les doigts d’une main. » Un discours récurrent, avec une part de risque finalement limitée. Annoncée à 1 000 euros par collaborateur n’appliquant pas le télétravail à raison de trois ou quatre jours, la pénalité est retombée à 500 euros. Condition sine qua none : la visite des agents de contrôle de l’Inspection du travail. (voir l’éclairage d’Alexandra Abadie, secrétaire nationale du SNTEFP-CGT, pour Syndicat national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle-confédération générale du travail).

« Le sujet de la santé au travail était nettement moins abordé, il y a quelques années, souligne Marcel-Edouard Bretesché, avocat au sein du cabinet Otario. On en parlait clairement moins. De quoi pousser les cabinets d’avocats à recruter, à structurer une offre de services sur cette thématique. » La Covid comme pourvoyeur d’emplois….?

Auteur

  • Murielle Wolski