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Prévention : les premiers pas hésitants du Fipu

Prévention | publié le : 04.12.2023 | Propos recueillis par Gilmar Sequeira Martins

Éric Gautron, secrétaire confédéral chargé de la protection sociale collective de Force ouvrière.

Éric Gautron, secrétaire confédéral chargé de la protection sociale collective de Force ouvrière.

Crédit photo DR

Prévu par la loi de financement de la Sécurité sociale qui a institué la réforme des retraites, le Fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle (Fipu) dispose d’un budget annuel de 200 millions durant cinq ans. Définir les actions à financer sera difficile, explique Éric Gautron, secrétaire confédéral chargé de la protection sociale collective de Force ouvrière.

Quelle est la genèse du Fipu ?

Éric Gautron : Le Fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle (Fipu) a été créé par la loi rectificative sur la sécurité sociale qui a porté la réforme des retraites. Il est doté de 1 milliard d'euros sur 5 ans et est financé par la branche risques professionnels (AT-MP). La loi prévoit que c’est à la Commission de l’AT-MP de fixer les orientations et de répartir le budget. Ses actions sont destinées à la prévention de l’usure professionnelle des salariés du secteur privé et des indépendants qui cotisent.

Quelle est votre position sur cette création ?

E. G. : Force ouvrière n'était absolument pas favorable à la création de ce fonds d'investissement. En premier lieu, parce que nous sommes opposés à la réforme des retraites et aussi parce que nous n'avons pas été consultés en amont. Nous avons découvert, comme tout le monde, la création de ce fonds avec l'argent de la branche AT-MP.

Comment s’est déroulée la mise sur pied de ce fonds ?

E. G. : Lorsque nous avons ouvert les travaux sur le Fipu, sur les orientations, nous avons réalisé que le Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, créé en 2001, était un peu sur le même périmètre que le Fipu. Il va falloir veiller à ce que les actions ne ciblent pas les mêmes acteurs. Il y a trois destinataires du Fipu : les entreprises, les organismes de prévention de branches et France compétences. Aujourd'hui, il n'existe qu'un seul organisme de prévention, l'OPPBTP, mais le Fipu peut aussi contribuer à la création d’autres organismes de prévention dans d’autres branches. La répartition budgétaire prévue est la suivante : 70 % pour les entreprises, 20 % pour France compétences et 10 % pour les organismes de prévention. La part réservée aux entreprises est divisée de la même façon selon leur taille : 70 % du budget pour celles de moins de 50 salariés, 20 % pour celles de 50 à 199 salariés et 10 % pour les autres.

Comment seront attribués les fonds ?

E. G. : Les actions doivent être fléchées en fonction des besoins qui devaient être définis par des accords de branche, ce qui est logique puisque les partenaires sociaux de chaque branche sont les plus informés. Mais la loi précise que les orientations devaient être fixées avant le 31 octobre et le budget arrêté avant le 15 novembre. Le délai était trop court pour permettre aux branches de faire aboutir des négociations. De sorte qu’il a été difficile de fixer les premières orientations. Nous avons donc prévu une clause de revoyure en mai 2024 afin de laisser le temps aux branches de négocier des accords sur la prévention de l’usure professionnelle.

Quels critères devront être réunis pour financer les actions de prévention ?

E. G. : L’éligibilité au fonds est basée sur les critères de pénibilité liés aux risques ergonomiques (manutentions manuelles de charges, postures pénibles définies comme positions forcées des articulations et vibrations mécaniques). La difficulté, c’est que la sinistralité des entreprises est connue, mais le lien avec les critères de pénibilité est difficile à établir. De même, il est difficile de relier les données sur les accidents et les pathologies au métier concerné, au type de contrat, etc., c’est-à-dire de les relier aux données qui permettraient d’avoir des actions plus ciblées et donc plus efficaces. Dans une entreprise, il peut être utile de mener des actions de prévention pour certains métiers, mais pas pour tous les salariés. Pour fixer nos premières orientations, nous nous sommes basés sur les codes métiers de l’Insee (professions et catégories socioprofessionnelles des emplois salariés, des employeurs privés).

 

Auteur

  • Propos recueillis par Gilmar Sequeira Martins