Aujourd’hui proscrites, les discriminations restent cependant très fréquentes en entreprise. Pour y remédier plus efficacement, l’Association française des managers de la diversité propose une étude qui révèle l’efficacité des multiples leviers disponibles – testing et analyses statistiques – qui peuvent enclencher une politique d’amélioration continue et devenir de véritables outils de pilotage RH.

Comment réduire les discriminations dans les entreprises ? En juillet dernier, une proposition de loi portée par les députés Marc Ferracci et Aurore Bergé (nommée, depuis, ministre des Solidarités et de la Famille) proposait d’instituer un testing individuel et de s’appuyer sur l’analyse statistique. Un premier levier, certes, mais pas le plus pertinent, à en croire l'Association française des managers de la diversité (AFMD). Principal défaut invoqué : il se focalise exclusivement sur la phase de recrutement, ignorant du même coup la gestion de parcours. Autre inconvénient du testing : il ne peut présenter d’intérêt que sur de grands volumes de candidatures, gérés par différentes personnes, sur un mode décentralisé. Inversement, l’AFMD souligne que l’analyse statistique d’un fichier de candidats peut être réalisée avec tout type d’organisation, centralisée ou non, tout type de métier, indépendamment donc de leur volume de recrutements, et à toutes les étapes du processus.

Estimant que les analyses statistiques de fichiers de candidatures ou de gestion des carrières permettent d’aller plus loin, l’AFMD vient de divulguer une étude afin d’assurer une meilleure connaissance de ces outils. Elle est l’aboutissement d’une démarche engagée en 2022 avec l’ISM Corum qui a permis de mener 16 diagnostics auprès de 12 organisations adhérentes de l’AFMD entre mars 2022 et avril 2023, auxquels a été ajoutée l’analyse de 75 diagnostics menés depuis 2006. Les entreprises ayant accepté d’engager cette démarche représentaient des secteurs très différents (banque, industrie, recrutement, transport et logistique) et se distinguaient aussi par le volume de leurs effectifs : quatre avaient moins de 10 000 salariés, quatre autres moins de 50 000 et les quatre dernières plus de 50 000.

Dans le cadre d’une démarche de « recherche-action », le recours au « testing » et aux analyses statistiques en vue de détecter les discriminations menées dans les organisations adhérentes présente l’avantage, selon l’AFMD, d’impliquer l’ensemble des équipes RH, mais aussi managériales, dans une dynamique d’amélioration. Leurs résultats peuvent aussi aider les responsables diversité à construire des plans d’action grâce à des données objectives. Les diagnostics déjà réalisés ont ainsi permis de dévoiler dans certaines entreprises une dispersion des sélections entre différents acteurs et une faible formalisation des procédures, soit autant de facteurs qui peuvent constituer des zones de risques discriminatoires.

Ces analyses peuvent aussi devenir des déclencheurs amenant les organisations à revoir leurs processus de sélection des candidats, voire à changer leurs outils de recrutement ou de traçabilité des sélections effectuées. L’étude relève que ces analyses font ressortir des problèmes sur certains types de contrats. Cela a permis d’identifier la présence de biais plus en aval, parmi les équipes managériales. Mieux encore, renouvelés à intervalles réguliers, ces diagnostics peuvent devenir des outils de pilotage RH permettant aux équipes de mesurer les progrès obtenus. Parmi les opérations menées avec les sociétés adhérentes de l’AFMD, quatre, réalisées en 2021 et 2022, ont porté sur l’évolution de carrière. Dans l’une des entreprises, ces analyses statistiques ont révélé que les femmes y avaient une probabilité de bénéficier d’une promotion inférieure de 15 % à celle des hommes.