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Vie des entreprises

Égalité hommes-femmes : patrons, encore un effort !

Vie des entreprises | Zoom | publié le : 01.02.2009 | Sarah Delattre <i>Illustration : François Avril</i>

Rattrapage de salaires, accès à des métiers masculins ou charte de parentalité… la parité avance à petits pas. Mais le plafond de verre résiste.

Scène inattendue au Théâtre Marigny lors des BFM Awards qui saluaient les meilleurs managers de l’année, un palmarès 100 % masculin. Une horde de femmes à barbe s’est alignée en rang d’oignons et l’une d’elles a félicité le jury « presque exclusivement mâle ». Après avoir perturbé l’AG du Conseil national des centres commerciaux, « la Barbe » a encore frappé. Ce gang de postiches féministes dénonce les bastions machistes. Car, malgré d’indéniables avancées législatives, les inégalités persistent. à l’issue de la dernière conférence tripartite sur l’égalité professionnelle, à l’automne 2007, le gouvernement a décidé d’une sanction financière calculée sur la masse salariale pour les entreprises qui n’auraient pas en 2010 mis en place un plan de résorption des écarts de salaires. Et, en mai 2008, deux députées UMP, Marie-Jo Zimmermann et Claude Greff, ont fait adopter l’inscription du principe d’égalité concernant les responsabilités professionnelles et sociales dans la Constitution, à la barbe cette fois du gouvernement.

Les patrons « féministes », de leur côté, actionnent simultanément plusieurs leviers pour faire avancer l’égalité professionnelle. à commencer par le salaire. D’après la Dares, les femmes subissaient, en 2006, un différentiel de rémunération de 27 % dans les entreprises de plus de 10 salariés. En cause, une division sexuée du travail qui les confine dans des métiers moins rémunérateurs, des temps partiels, une progression ralentie par la maternité…

Un budget dédié. Pour mettre fin à cette injustice, les entreprises débloquent souvent une enveloppe budgétaire. Sous la houlette de son président Jean-Pierre Menanteau, marié à une commissaire de police et père de trois enfants, l’assureur Aviva a signé en octobre un accord spécifique et va consacrer à cette cause 150 000 euros par an sur trois ans. Aviva a constaté un écart du salaire médian de 2,3 %, jusqu’à 17 % pour les inspecteurs. « Nous allons comparer par fonction le salaire médian des femmes et des hommes, analyser plus finement la situation pour les écarts de plus de 10 % et y remédier si cette différence est injustifiée du fait de l’ancienneté notamment », précise le DRH Philippe Achalme. Sur 3300 salariés, 200 devraient en profiter.

« Club des 1 % ». Chez EDF en 2002, un examen de la situation a mis en lumière un écart moyen de près de 5 %, avec un pic à 17 % dans le secteur de la recherche. Sous l’impulsion de son président de l’époque, François Roussely, l’entreprise s’est engagée à résorber les retards, en consacrant un budget de 2 millions d’euros par an aux rémunérations féminines. Depuis, EDF a rejoint le « club des 1 % », autoproclamé comme tel par les bons élèves qui ont réduit à presque rien l’écart de salaires. Le publicitaire BETC Euro RSCG n’en est pas encore là. « Les écarts restent inférieurs à 1 % pour 90 % des salariés, exception faite des 10 % des salaires les plus élevés », note Sophie de Gromard, RRH. Là, le fossé est de 11 %, contre 29 % en 2005.

Plus original, Schneider Electric s’est appuyé sur le principe « à travail comparable, salaire égal » pour requalifier les BTS secrétariat au niveau des BTS technologiques. En attendant que les jeunes filles s’orientent vers les filières scientifiques.

Faute de candidates, les entreprises conjuguent difficilement les « métiers d’hommes » au féminin. Dans le BTP, elles piétinent un plancher de verre. « De plus en plus de filles sortent des écoles d’ingénieurs pour devenir conductrices de travaux par exemple, note Nathalie Malan-Manigne, directrice générale RH chez Cari, proactive depuis 2004. En revanche, rares sont celles qui envisagent de devenir maçonnes. » En multipliant les partenariats avec le service public de l’emploi, Adia, etc., Cari a recruté 75 ouvrières en 2007, contre 4 fin 2004. à force de sillonner les routes de Normandie à bord de son bus pour l’emploi, Quille, filiale de Bouygues Construction, a quant à elle embauché huit chômeuses désireuses de se reconvertir en grutière ou maçonne sur le chantier de l’EPR à Flamanville.

En amont, France Télécom participe à plusieurs initiatives lancées par le Women’s Forum ou la Commission européenne pour donner le goût des sciences aux écolières. « Nous utilisons le levier de la taxe d’apprentissage pour encourager les écoles qui misent sur la diversité », précise Brigitte Dumont, directrice du développement et de la performance chez Orange. L’opérateur téléphonique prévoit qu’en cas de reclassement les femmes se voient proposer au moins un emploi technique.

Ces initiatives qui visent en général un public peu qualifié ou en reconversion suscitent un effort accru de formation. « Les recrues évaluent d’abord leurs aptitudes en milieu de travail, via un dispositif de l’ANPE, puis suivent un cursus de dix mois en alternance dans nos centres », note Nathalie Malan-Manigne, chez Cari. Chez Schneider, 164 femmes ont décroché un certificat de qualification paritaire de la métallurgie ou un bac pro fin 2007, en vertu d’un accord signé en 2004 qui prévoit de former au moins 240 ouvrières à des métiers plus qualifiés. Pour inciter les femmes à partir en formation, EDF a favorisé les stages de proximité et développé l’e-learning.

Confrontés au Code du travail qui interdit aux femmes de porter plus de 15 kilos, les Services funéraires de Paris ont segmenté les tâches. « Puisque les femmes ne pouvaient devenir porteurs, nous les avons recrutées aux postes de conseiller funéraire, de maître de cérémonies et de directeur d’agence, auparavant plutôt accessibles par promotion interne », témoigne Cendrine Chapel, directrice des services aux familles.

Accès au pouvoir. Autres endroits souvent fermés aux talons aiguilles, les cercles de pouvoir : seuls 17,2 % des dirigeants sont des femmes. Pour briser le plafond de verre, EDF a révisé ses procédures de recrutement. Les managers ont l’obligation de proposer au moins une candidature de femme sur trois. Le mentorat, les réseaux de femmes, etc. ont contribué à doubler le nombre de ses dirigeantes en six ans.

Enfin, pour aider leurs salariés à concilier vie professionnelle et vie privée, une trentaine d’entreprises ont signé la charte de la parentalité. Aux Services funéraires de Paris et à France Télécom, il est recommandé d’éviter les réunions après 17 h 45 et 18 heures. Certaines, à l’instar de BETC Euro RSCG, incitent aussi les hommes à prendre leur congé paternité en le finançant intégralement. Une autre facette de l’égalité professionnelle.

27 %

C’est le différentiel de rémunération entre hommes et femmes dans les entreprises de plus de 10 salariés en 2006.

Source : Dares.

Auteur

  • Sarah Delattre <i>Illustration : François Avril</i>