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Idées

Management avec un M comme manipulation

Idées | Livres | publié le : 01.11.2008 | J. M.

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Management avec un M comme manipulation

Crédit photo J. M.

Extension du domaine de la manipulation : de l’entreprise à la vie privée, Michela Marzano. Éditions Grasset. 286 pages, 18,50 euros.

Auteur de livres de réflexion sur le corps, la fidélité en amour, et même le fait d’être nain, Michela Marzano s’est attaquée au management. Attaquer est bien le mot, car il s’agit d’une démolition en règle du langage managérial et des pratiques qu’il implique. Le discours des gourous du management substitue « un modèle formel de réussite à un modèle substantiel », observe l’auteur, qui dénonce l’abus de la thématique du leadership dans l’univers de l’entreprise. Michela Marzano s’insurge aussi contre l’idéologie dominante dans les théories modernes du management qui voient dans le travail la seule façon de donner du sens à la vie. Circonstance aggravante, les bréviaires managériaux ont créé un « télescopage entre le domaine du travail et le domaine de l’intime » prétendant que chacun de nous peut devenir « l’entrepreneur de sa vie ». Autant de pièges qui permettraient, selon l’auteur, aux dirigeants de demander à leurs salariés une chose et son contraire : performance et épanouissement personnel, engagement et flexibilité, employabilité et confiance, autonomie et conformité…

Michela Marzano porte un jugement implacable sur le terme de ressources humaines, constatant une contradiction dans cette expression « qui cherche à humaniser par l’utilisation d’un adjectif ce que, par définition, on exploite (les ressources) ». Aujourd’hui, on demande aux gens de s’engager toujours plus pour leur société mais on leur impose toujours plus de flexibilité. Il faut à la fois être autonome et conforme à la culture d’entreprise. Les « chartes éthiques » ne servent que de « faire-valoir, un moyen pour tenir à l’écart toute véritable critique du fonctionnement de l’entreprise ». Même la responsabilité sociale des entreprises lui apparaît comme un simple « habillage vertueux » de comportements qui restent inchangés, « quand ils ne sont pas pires ».

Cette rhétorique managériale s’appuie, selon l’auteur, sur la crise de sens qui envahit le monde contemporain. Michela Marzano dénonce aussi l’« ultime avatar du management » : le coaching. Une pratique se fondant sur un modèle extrêmement simpliste, « qui réduit l’individu à une sorte de machine capable d’être » programmée « et, par la suite, » reprogrammée « . La critique aurait gagné à plus de nuances, mais on ne peut que se réjouir de voir une philosophe se pencher sur un phénomène trop souvent ignoré des milieux universitaires.

Auteur

  • J. M.