Pour vivre de notre métier dans les zones accidentées, il faut être passionné. » Il suffit d'une phrase de Raymond Privat, 83 ans, pour dire la dureté de la vie en moyenne montagne. Et d'un premier plan-séquence de Raymond Depardon pour l'illustrer. Nous sommes sur une route en pleine campagne. Au détour d'un chemin, un homme descend de la montagne avec ses brebis : c'est Marcel, l'aîné des Privat, qui se prête à l'exercice deux fois par jour… à 88 ans. Leur ferme du Villaret constitue la première étape de ce voyage-retour dans les Cévennes. Au cœur de cette région montagneuse, les fermiers cultivent difficilement les terres pentues, se concentrant sur l'élevage de brebis et de moutons. D'exploitation en exploitation, le documentariste, lui-même élevé dans une ferme, reprend le fil d'une conversation interrompue voici quelques années. Avec Paul le solitaire, avec Germaine et Marcel, 70 et 80 ans, attristés qu'aucun de leurs quatre enfants ne reprenne l'exploitation… Toute la force de la Vie moderne, troisième volet du projet « Profils paysans » initié en 1988, est d'avoir gagné la confiance de ces taiseux. Ils se comportent avec naturel devant la caméra, même s'ils se livrent assez peu. Les silences sont nombreux. Cela n'empêche pas leur timidité ou leurs émotions de transparaître face à la vieillesse, la solitude, la précarité.

La Vie moderne, Raymond Depardon (1 h 30). Sortie le 29 octobre.