Statistiquement, la proportion de personnes en situation de pauvreté tend à décroître lentement. Pourtant, le sentiment qui prévaut dans l’opinion est celui d’une aggravation. Pour Denis Clerc, l’explication vient sans doute de la précarité dans laquelle vivent tant de personnes en France. Ce qui lui apparaît d’autant plus vrai qu’aujourd’hui la pauvreté a changé de visage : celle des personnes âgées, qui fournissaient naguère les gros bataillons de pauvres, diminue, mais celle des personnes qui exercent un travail c’est le travail à temps partiel contraint. « La pauvreté n’est plus cantonnée dans un “autre monde”, observe l’auteur, elle s’est installée au sein même du salariat, par le biais d’emplois en miettes ou du chômage. » La progression des emplois temporaires obéit à la recherche d’une plus grande flexibilité, rendue indispensable par la montée des services dans l’économie et la pression de la concurrence internationale dans les autres secteurs. Faute de pouvoir l’éviter, il faut l’encadrer. Pour l’auteur, cela ressort d’« une action publique résolue ».

Denis Clerc montre que ce qui a été fait jusqu’à présent – emplois aidés, allégements de cotisations sociales, 35 heures – n’est pas à la hauteur du problème. Les « tentations » du gouvernement actuel, comme la TVA sociale, la suppression de la durée légale du travail ou le revenu d’activité, lui inspirent les plus vives réserves. Il se montre beaucoup plus réceptif à l’idée du RSA de Martin Hirsch mais se méfie d’une piste qui peut conduire à accroître la pauvreté laborieuse. En conclusion, Denis Clerc plaide pour une montée en gamme de l’emploi grâce à la formation et à l’éducation, avec le soutien d’un État « investisseur social ».