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Les DRH plébiscitent l’externalisation

Dossier | publié le : 01.10.2007 | Eri ck Haehnsen Éliane Kan

Après la paie, le recrutement, la gestion du CE ou les élections du personnel sont de plus en plus externalisés chez des prestataires via des plates-formes Internet. Une tendance qui reflète aussi les discordances entre DRH et service informatique.

Lancement de nouveaux produits, OPA, fusions-acquisitions, délocalisations, réorganisations… Dans les grandes entreprises, les directeurs des ressources humaines ont plus que jamais besoin de réagir vite, alors que le nombre et la complexité des tâches à accomplir par leurs services s’accroissent sensiblement. Conséquence, l’organisation et les processus RH s’appuient de plus en plus sur des systèmes d’information innovants. Cependant, même si la fonction de responsable de SIRH prend de l’importance au sein des DRH, ces dernières restent partagées entre le déploiement interne de progiciels ad hoc et l’externalisation de certaines fonctions auprès de prestataires. L’alternative entre ces deux stratégies radicalement opposées est d’ailleurs une préoccupation commune aujourd’hui à l’ensemble des fonctions support dans les entreprises.

Relations tendues entre DRH et DSI. Globalement, les DRH sont satisfaits de leur système d’information. Parmi les 140 responsables RH interrogés dans le cadre du baromètre 2006 Liaisons sociales-CSC-Entreprise et Personnel (Liaisons sociales magazine n° 76, novembre 2006), plus de quatre sur cinq (82 %) estiment que leur système d’information dispose d’un niveau satisfaisant de fiabilité dans la gestion des données. Il n’empêche que leurs relations avec les directions des systèmes d’information (DSI) sont compliquées. « Nous attendons de la maîtrise d’œuvre informatique un niveau de compétence en ressources humaines qui faciliterait la conception des projets, témoigne Nadia Etcheverry, responsable du SIRH de Natixis. Or on en est loin… » Une chose est sûre, DRH et DSI peinent à développer l’interdisciplinarité et à parler d’une seule voix, en mêlant la culture RH et celle propre aux informaticiens. Et Nadia Etcheverry de préconiser le « mode projet » avec une mutualisation forte des moyens et des équipes : « Il faudrait que la DRH et la DSI soient physiquement côte à côte. Cette proximité faciliterait les arbitrages. »

Mais, pour l’heure, l’existence de baronnies dans les grandes organisations, le manque de communication, voire le profil des responsables des services informatiques expliquent cette collaboration encore peu fructueuse. Certains DSI sont issus de l’opérationnel, d’autres sont des informaticiens pur sucre. Et il est parfois plus compliqué d’être sur la même longueur d’onde avec ces derniers, concèdent des DRH.

Frein supplémentaire, peu d’entreprises, à l’inverse d’Essilor ou des constructeurs automobiles français Renault et PSA, font siéger leur patron des systèmes d’information au comité exécutif. Or, dans ces groupes qui ont mis en œuvre une telle gouvernance, les choix stratégiques en matière de SIRH s’avèrent davantage payants. Par ailleurs, le fait que les DRH externalisent de plus en plus les systèmes d’information dédiés aux RH ne milite pas en faveur d’un rapprochement entre les services. Une tendance qui gagne du terrain.

Selon une étude du cabinet Markess International de juin, l’externalisation de la paie devrait passer de 60 % cette année à 72 % en 2009, suivie par la gestion de la formation (qui progressera de 17 à 42 % sur la même période), le recrutement (de 17 à 38 %) et l’administration du personnel (de 17 à 32 %). Dans ce mouvement, les DRH se familiarisent avec des fonctionnalités très avancées dans le cadre de portails en self-service. Cette démarche a démarré avec les portails d’offres d’emploi (keljob.com, optioncarriere, monster.fr, 123-emploi.com, cv.com…). Depuis peu, les méta-moteurs se posent en tant que véritables « Google de l’emploi ». À l’instar de Yakaz.fr, qui se targue de référencer plus de 1 million d’annonces issues de 500 sites Web. Lesquelles attireraient 500 000 visiteurs uniques chaque mois.

Même les activités du comité d’entreprise sont susceptibles d’être externalisées. En témoigne le cas du CE du secteur région parisienne de l’entreprise de travaux publics Sade. À la tête d’un budget annuel de 100 000 euros pour quelque 1 300 salariés, son secrétaire, Patrick Favreau, n’a pas hésité à investir dans la formule « hébergée » de ProwebCE moyennant une dépense modique de l’ordre de quelques milliers d’euros par an : « Nos salariés travaillent sur les chantiers. Il s’écoule parfois jusqu’à trois mois avant qu’ils passent dans l’un de nos sites. Avec la plate-forme Internet, ils peuvent se connecter de chez eux pour s’informer sur les prestations sociales du CE. » Point fort, le secrétaire et le trésorier du comité d’entreprise de Sade disposent d’un logiciel de comptabilité certifié par l’ordre des experts-comptables. « Nous n’avons qu’à saisir les montants et ils sont répartis dans les bonnes rubriques. Ensuite, nous bénéficions de la garantie de la sauvegarde des données légales », indique Patrick Favreau.

Autre domaine d’intervention des portails RH : la formation, avec des solutions comme celles, entre autres, d’Archimed, de HR Access, d’Infor, d’OpenPortal ou de Training Orchestra. Opérationnel depuis 2006, le portail eFormation de l’Unedic a permis à quelque 2 600 agents des Assedic de se former sans se déplacer. « Cette formule aide à personnaliser et à individualiser le parcours de formation. Chacun apprend à son niveau, à son rythme et en fonction de ses besoins », constate Richard Rascar, responsable du développement de l’e-formation à l’Unedic, qui utilise la plate-forme Simplicité d’Archimed et les contenus développés par iProgress (Bernard Julhiet Group), Auralog et KnowMore. « De plus, on a la capacité d’évaluer l’efficacité de la formation. En revanche, les résultats des évaluations ne sont accessibles que par les accompagnateurs à distance et l’apprenant. Pas leur supérieur hiérarchique. » Une convention pédagogique est signée entre l’apprenant, son supérieur hiérarchique et le centre de formation de l’Assedic. L’apprenant accède alors à ses cours durant ses heures de travail mais pas de son propre poste.

Entretiens annuels externalisés. Messier-Dowty a, de son côté, fait le choix de la centralisation informatique pour ses bilans annuels d’évaluation. La gestion des entretiens annuels de cette filiale de 4 300 personnes du groupe Safran, répartie sur sept sites dans cinq pays, passe aujourd’hui à 90 % par la solution ActivePerformer de Jobpartners pour les 2 000 cadres de la société. « Au lieu de déployer un SIRH mondial, chaque pays jouit de l’autonomie d’utiliser le logiciel de paie local qui lui convient, avec sa propre réglementation. En revanche, pour le bilan annuel d’évaluation, nous centralisons une application Web mondialisée sur cinq pays. Tandis que ce sont les opérationnels qui l’alimentent, explique Claude Mathieu, le vice-président RH de Messier-Dowty. Mais, avant de sauter le pas du Web, nous avons harmonisé nos processus d’évaluation sur papier pendant deux ans. » Cela favorise aussi la création d’un référentiel précis des compétences dans le groupe. « L’avantage du Web et de ses processus collaboratifs, c’est que chacun est responsabilisé d’une façon transparente : aussi bien le collaborateur qui définit ses objectifs que son manager qui les valide et évalue le réalisé. C’est également l’occasion d’envisager des actions de formation ou d’engager un plan de recrutement avec la RH de tel ou tel service. »

En marge de cette tendance à l’externalisation, les patrons des services informatiques connaissent d’autres motifs d’inquiétude. À commencer par le chantier des architectures orientées services, ou SOA (pour service oriented architectures), qui va les occuper durant les dix prochaines années. En un mot, pressés par leurs directions générales, ils doivent faire du neuf avec du vieux. Autrement dit « urbaniser » les systèmes historiques de l’entreprise : « Il s’agit de rationaliser les applications en doublon, d’éliminer les versions obsolètes, de réduire le nombre d’éditeurs de logiciels et de choisir des solutions ouvertes et compatibles entre elles. Un travail de titan. D’où l’essor des solutions RH externalisées sur le Web », analyse Arnaud Kerhervé, consultant senior SIRH chez Micropole-Univers.

Ces SOA vont enfin permettre aux applications de dialoguer entre elles et d’en développer de nouvelles, ce que promettaient les progiciels de gestion intégrés en n’y parvenant pas toujours. Et tout cela à moindre coût. Une fois ce travail réalisé, les entreprises bénéficieront de solutions facilement personnalisables. Vont-elles alors les externaliser à la manière anglo-saxonne ou les internaliser ? Une chose est sûre, DSI et DRH auront intérêt à s’entendre sur ce terrain.

Élections électroniques à Canal +

Jusqu’en 2005, les élections des délégués du personnel et du CE pour nos cinq instances mobilisaient une salle entière avec des urnes à perte de vue. Trente personnes pour dépouiller jusqu’à 3 ou 4 heures du matin. Les salariés, surtout les cadres, étaient peu motivés », se souvient Élodée Bouvet, directeur adjoint des affaires sociales chez Canal +, qui vient d’organiser, pour la deuxième fois, des élections électroniques avec Élection Europe. « Cette année, le taux de participation est allé jusqu’à 75 % au centre de relation client de Saint-Denis. Sur notre site de Rennes, 74 % des cadres ont voté, et 68 % au siège. Surtout, on dépouille en moins de deux heures. »

Pour voter, les électeurs reçoivent d’abord le code d’accès par la poste. « Mais les gens l’oublient. La prochaine fois, nous ferons tout par courriel », poursuit Élodée Bouvet. Durant toute une semaine, lorsque les votants se connectent à l’espace réservé à Canal +, le site d’Élection Europe les aiguille automatiquement vers l’élection qui les concerne. « Sur le site d’administration de l’élection, les membres des bureaux de vote (un président et deux assesseurs) doivent entrer successivement leurs trois codes pour ouvrir légalement les urnes électroniques. Les résultats s’affichent immédiatement », décrit Élodée Bouvet, qui pense réaliser, sur le plan financier, une économie de 30 %. Et ce dans le respect total des contraintes légales.

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  • Eri ck Haehnsen Éliane Kan