Bonne idée que celle de ces deux juristes qui dressent la liste des risques dont on n’ose pas parler dans le milieu professionnel et qui peuvent amener un patron devant les tribunaux. Exemple : l’alcool, troisième cause de décès en France. Dans notre pays, rappellent les auteurs, « 8 à 10 % des salariés souffrent de dépendance à l’alcool et, dans le monde du travail, la société a mauvaise conscience car elle considère l’alcool, le fait de boire, comme un "bien vivre" ». L’alcoolisme tue dix fois plus d’ouvriers et d’employés que de cadres supérieurs. On recense au moins neuf risques directement liés à l’alcoolisation au travail : diminution des performances professionnelles, difficultés relationnelles, brusque dégradation de l’état de santé du salarié, accidents du travail ou de la route, etc. La panoplie juridique élaborée pour combattre le fléau, ou en limiter les conséquences, est très souvent mal connue des employeurs, et le régime des sanctions délicat à mettre en œuvre.

« Tolérer, faciliter ou faire semblant de ne rien voir concernant l’introduction de boissons alcoolisées pourrait effectivement entraîner la responsabilité de celui ou celle qui a laissé faire », avertissent Philippe Arbouch et Alexis Triclin. Tabac, drogue, harcèlement moral, accidents de la route, discriminations reçoivent le même traitement de leur part : on s’étonnera juste de leur silence sur ce supertabou qu’est le sexe dans l’entreprise, hormis dans le chapitre consacré à Internet. Leur livre aborde en revanche le stress, qu’ils considèrent comme « un risque professionnel émergent ». Les deux auteurs estiment que ce thème représente une piste prometteuse de négociation pour les partenaires sociaux. Les récents suicides au travail montrent que ce ne serait pas un luxe.