L’année 2007 commence en fanfare avec cet ouvrage, publié sous la direction du sociologue Serge Paugam. Politiques familiales, crise du salariat, place de l’école, évolution du marché de l’emploi et de l’indemnisation du chômage, solidarité intergénérationnelle : ses multiples contributions suivent un fil rouge : la solidarité. Parmi toutes les entrées, on citera surtout celles qui paraissent le plus en phase avec les interrogations du moment. Celle que formule par exemple François Dubet. « Existe-t-il une justice scolaire », se demande le sociologue de l’éducation. Les recherches sur le sujet convergent pour constater qu’une partie de l’échec de l’égalité des chances peut être attribuée au fonctionnement de l’école elle-même.

Autre plaie douloureuse dans les solidarités mises en place par notre système de protection sociale, le processus de déclassement des nouvelles générations est traité au scalpel par Louis Chauvel. L’auteur d’un essai remarqué sur les classes moyennes affirme que le bien-être exceptionnel dont jouit nombre de baby-boomers se fonde, en partie, sur l’impossibilité faite à beaucoup de leurs enfants d’accéder à un niveau économique décent. Le chercheur est convaincu que ce chômage de masse concentré sur les moins de 25 ans est un événement au moins aussi marquant, du point de vue culturel et sociologique, que Mai 68 a pu l’être pour les seniors d’aujourd’hui. Selon lui, c’est par l’impôt que la nécessaire solidarité entre des seniors aisés et des jeunes appauvris doit s’intensifier.

Troisième champ de bataille social où l’on se montre de moins en moins généreux pour les victimes, le monde du travail est abordé sous plusieurs angles. Serge Paugam diagnostique une double explosion des précarités : celle liée à l’intensification du travail et celle due à l’instabilité croissante de l’emploi. La France se distingue par un taux élevé de salariés qui disent connaître une intégration professionnelle « disqualifiante ». Robert Castel fournit des clés à ces évolutions en décrivant le basculement « du salariat au précariat ». Pis, comme le montre Marie-Thérèse Join-Lambert, face aux nouveaux risques de l’emploi, le système d’indemnisation du chômage ne prend plus en charge que 60 % des demandeurs potentiellement indemnisables, le reste glissant dans le RMI. On l’aura compris, voici, au final, un saisissant état des lieux de notre système social, mais aussi de ses rapports tourmentés avec les mouvements de la société, et de l’économie.