logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Repères

La fausse bonne idée du contrat unique

Repères | Éditorial | publié le : 01.12.2006 | Denis Boissard

Image

La fausse bonne idée du contrat unique

Crédit photo Denis Boissard

L'idée du contrat de travail unique fait son chemin. Avancée par plusieurs économistes, elle figure aujourd'hui en bonne place dans le programme de l'UMP pour les législatives. La proposition est plutôt séduisante. L'objectif poursuivi est de bâtir une sorte de « flexisécurité » à la française en remédiant, côté salariés, à la dualité du marché du travail entre CDI et contrats précaires ainsi qu'aux inégalités que cette segmentation génère et, côté employeurs, à la complexité et aux incertitudes du droit du licenciement, notamment celui pour motif économique. Résultats espérés : une plus grande fluidité du marché du travail, une moindre frilosité des entreprises à recruter et, in fine, des créations d'emplois plus nombreuses à croissance égale.

Dans le schéma du rapport Cahuc-Kramarz, dont s'inspire le projet de l'UMP, le contrat unique serait un CDI dont les droits et exigences se renforceraient avec l'ancienneté du salarié. Les contraintes juridiques seraient notablement allégées en cas de licenciement, l'entreprise n'ayant plus à justifier le motif invoqué (le contrôle du juge se limitant à vérifier l'absence de discriminations) ni à respecter une obligation de reclassement. En contrepartie, l'employeur serait tenu de verser à son collaborateur une indemnité proportionnelle à la totalité des salaires perçus, et aux pouvoirs publics une contribution de solidarité calculée sur cette même base, somme utilisée par le service public de l'emploi pour accompagner et reclasser les salariés licenciés.

Le problème est que cet échafaudage résiste mal à l'analyse. Difficile de faire l'impasse sur la cause réelle et sérieuse ou sur la procédure du licenciement économique. D'abord parce que le licenciement abusif ne se résume pas au seul licenciement discriminatoire. Ensuite parce que la France est tenue par des engagements internationaux qui imposent un motif valable de licenciement, ainsi que l'information-consultation des représentants du personnel en cas de licenciement collectif. Difficile également de rayer d'un trait de plume le CDD. Comment, en effet, répondre à des besoins ponctuels de personnel (congé maternité ou maladie…) par un contrat à durée indéterminée ? Les ruptures consécutives risquent d'être des nids à contentieux. De surcroît, le salarié serait alors moins bien protégé que par un CDD, qui interdit toute rupture du contrat avant le terme fixé. Difficile, enfin, de libérer l'entreprise de toute obligation de reclassement à l'égard de ses collaborateurs, sauf à laisser penser qu'elle n'est pas responsable de leur employabilité et qu'elle n'a pas à se soucier de gérer préventivement emplois et compétences. L'externalisation totale du reclassement à des opérateurs publics ou privés apportera-t-elle aux salariés de meilleures garanties que si l'entreprise reste impliquée ? Rien n'est moins sûr.

L'idée du contrat unique est « une forme d'illusion », estimait récemment un prérapport du COE. Comment lui donner tort ?

Auteur

  • Denis Boissard