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Une foi totale dans le paritarisme

Dossier | publié le : 01.12.1999 |

Les retraités néerlandais ont de la chance. L'État leur assure un bon minimum vieillesse et le système des fonds de branche gérés paritairement leur permet souvent d'obtenir une rente équivalant à 70 % de leur dernier salaire brut. Même si cette générosité est aujourd'hui revue à la baisse.

Vertigineux ! Le trésor de guerre accumulé par les fonds de pension néerlandais est proprement ahurissant, compte tenu de la taille de ce petit pays européen. L'ABP, la caisse de retraite des fonctionnaires, est ainsi l'un des plus grands fonds au monde, avec plus d'un million d'adhérents et des provisions qui s'élèvent à 524 milliards de francs. Pour Chris Driessen, responsable des retraites au syndicat de salariés FNV, le système néerlandais est tout simplement génial : « Grâce à la capitalisation et à un investissement croissant en actions, nous avons de quoi payer nos retraites. Au cours des dernières années, la Bourse s'est même si bien portée que ni les salariés ni les employeurs n'ont eu besoin de verser de l'argent sur leur caisse d'entreprise. » Si les Pays-Bas semblent définitivement convertis à la capitalisation, toute ressemblance avec la Grande-Bretagne s'arrête là. Certes, les fonds de pension néerlandais se sont fortement développés, comme les anglo-saxons, après la Seconde Guerre mondiale, ce qui explique d'ailleurs le niveau actuel de leurs actifs. Mais leur conception est radicalement différente.

70 % du dernier salaire

Aux Pays-Bas, les fonds de pension sont créés par les branches professionnelles, à l'initiative des partenaires sociaux. Et l'adhésion, tant des entreprises de la branche que des salariés, est obligatoire. En vertu de ce principe, évidemment honni par les assureurs, la grande majorité des salariés néerlandais, soit 3,9 millions de personnes, cotise à une caisse de branche. Quant aux entreprises qui n'ont pas de convention collective, elles peuvent se rattacher à une caisse de branche existante, créer une caisse ad hoc ou souscrire un contrat d'assurance. Autre différence de taille avec le système britannique, les fonds de pension sont gérés de manière paritaire. Ils sont dirigés par un conseil d'administration où les salariés sont représentés à parts égales avec les employeurs et sont surveillés de la façon la plus stricte par la Chambre des assurances, qui épluche les comptes chaque trimestre. Grâce à la mise en place de ces garde-fous, la capitalisation complète harmonieusement le régime public d'assurance vieillesse. La pension forfaitaire versée par l'État néerlandais représente bien davantage qu'un minimum vital. D'un montant de 5 000 francs mensuels pour les célibataires de plus de 65 ans, elle est portée à 7 000 francs pour un couple. En additionnant ainsi cette pension et la retraite versée par le fonds de pension, un salarié qui a travaillé pendant quarante ans peut espérer recevoir 70 % de son dernier salaire, sous forme de rente.

Ceux qui ont eu la chance de travailler dans une grande entreprise sont encore mieux lotis. Le must étant le régime de retraite du personnel de Shell. Les 11 600 salariés néerlandais de la compagnie pétrolière sont assurés d'obtenir 80 % de leur dernier salaire, au terme de trente années de travail. De plus, la cotisation retraite de la majorité des salariés, excepté les plus hauts revenus, est entièrement prise en charge par l'entreprise ! En règle générale, les Néerlandais doivent supporter une cotisation déductible de l'impôt sur le revenu représentant 10 % de leur salaire, l'entreprise abondant cette somme pour moitié, voire aux trois quarts.

Même si les fonds de pension privilégient les investissements spéculatifs en actions par rapport à l'immobilier ou aux obligations d'État, ils ont bien du mal à faire face au coût croissant des retraites. De plus en plus de caisses sont contraintes de revoir leurs prestations à la baisse, pour pallier l'augmentation de l'espérance de vie, donc l'allongement de la durée de la retraite. Le géant Philips a créé en 1997 une seconde caisse de retraite pour ses nouveaux salariés, qui garantit une pension basée sur le salaire moyen et non plus sur le salaire final. Un tiers des caisses d'entreprise procèdent de la même manière, en calculant dorénavant la retraite à partir du salaire moyen, par exemple des cinq dernières années, et non plus du dernier salaire. Comme les Néerlandais travaillent de moins en moins longtemps, ils parviennent difficilement au taux de reversement de 70 %, qui a constitué la norme pendant plusieurs décennies. Mais il est vrai qu'il s'agissait du salaire brut, ce qui représentait pour les retraités pratiquement l'équivalent de leur dernier salaire net !