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Le bloc-notes

Les classiques de la rentrée

Le bloc-notes | publié le : 01.11.2005 | Bernard Brunhes

Revendications

Le 4 octobre, plusieurs centaines de milliers de salariés – million selon les syndicats – ont défilé sur les pavés de Paris et des grandes villes. C'était la troisième fois de l'année ; la première épreuve sociale pour Dominique de Villepin, disait-on (à côté des épines de la SNCM). Mais, bien qu'annoncée longtemps à l'avance, la journée fut somme toute pacifique, et sans lendemain.

Les prévisions d'un automne chaud se révèlent exactes, côté météo ; côté social, c'est tiède. Tiède comme un pays plus morose que mécontent. La manif multiville et multirevendication est devenue un rite, une liturgie. Les organisations syndicales ont additionné leurs revendications. Mais le mélange n'avait pas beaucoup de goût. On réclame du pouvoir d'achat, alors que la fixation des rémunérations est aujourd'hui décentralisée, libre, voire individualisée. Le temps n'est plus où l'on pouvait utilement réclamer: « Charlot, des sous ! » On demande une politique de lutte contre le chômage et l'on a raison : mais c'est précisément la priorité que s'est donnée le gouvernement. On attendait une revendication plus précise. On ne s'oppose que mollement au contrat nouvelles embauches, pourtant véritable brèche dans le Code du travail. On lutte contre la « casse du service public », mais est-ce bien raisonnable de mettre dans le même sac toutes les formes de privatisation – l'ouverture du capital d'EDF, le sauvetage d'une SNCM en faillite ou la vente des bijoux de famille que sont les autoroutes ? Les victimes des restructurations industrielles ont de vraies et fortes exigences. Elles ont raison de se faire entendre bruyamment. Quant aux agents des services publics, on comprend leurs inquiétudes lorsque progressivement tout change pour eux. Mais le rite des défilés aux slogans trop classiques et trop généraux semble bien avoir fait long feu.

Restructurations

Le calme est donc revenu. Mais les restructurations plus ou moins dures restent le pain quotidien de l'actualité sociale. L'industrie textile reçoit de nouveaux coups avec l'invasion des produits chinois. Mais on est un peu surpris que les industriels et les autorités soient surpris. L'ouverture des frontières en 2005 était prévue depuis longtemps. Dans ce secteur, comme dans d'autres moins sinistrés, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences n'est pas le fort des dirigeants d'entreprise. Pourtant, la plupart des grands groupes font des efforts importants dans ce domaine. Les accords dits « de GPEC » sont rares dans l'ensemble des entreprises, mais il en est de fort intelligents dans certains grands groupes où syndicats et directions ont progressé dans la recherche de vraies politiques d'emploi.

Repérer les emplois stratégiques et les emplois sensibles, avoir une approche tactique pour être capable de faire face à des événements qui ne sont pas tous prévisibles, s'apprêter, tel un disciple de Clausewitz, à faire face à tous les mouvements envisageables des armées adverses. Tel devrait être le souci de tout état-major de grande ou de moyenne entreprise. Il y a de bonnes pratiques. Elles sont identifiées, disponibles. On peut s'en inspirer pour les adapter à son organisation. Elles se réfèrent à la gestion des mobilités, des diversités, au développement des compétences. Elles renouvellent le dialogue social et, partant, peuvent lui redonner ses lettres de noblesse.

L'année qui vient sera encore fertile en drames de la restructuration. Mieux vaudrait s'y préparer, du côté des employeurs comme des pouvoirs publics, plutôt que de chercher ailleurs la responsabilité des sinistres et de mettre les travailleurs, trop tard, devant le fait accompli.

Refondation

Laurence Parisot s'installe. Un premier accord aura vu le jour sous son nouveau règne : l'accord sur l'emploi des seniors. Il n'est pas bouleversant d'imagination mais il existe. L'idée d'un assouplissement des contrats à durée déterminée pour les seniors est bonne et il est heureux que la plupart des syndicats l'aient acceptée. Il faut aller plus loin et vite. Et il serait temps que l'État renonce à l'« amendement Delalande » qui fait tant de mal. Quant aux multiples autres dossiers que la présidente du Medef a trouvés sur son bureau, espérons qu'elle pourra les mettre eux aussi sur le tapis vert, comme elle a commencé à le faire pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, et que l'ère Parisot sera une époque d'intenses et courageuses négociations entre partenaires sociaux. On attend cela depuis la fin de l'ère Kessler et des velléités de refondation sociale.

La prochaine grande négociation entre patronat et syndicats portera sur les nouvelles bases de l'indemnisation du chômage. Vu le déficit abyssal actuel de l'Unedic, les discussions seront chaudes. L'État sera certainement appelé à la rescousse mais les finances publiques ne lui laissent pas de marge de manœuvre, et quelques dossiers comme celui des intermittents vont resurgir.

Auteur

  • Bernard Brunhes