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Les DRH à la recherche de l'équilibre

Dossier | publié le : 01.11.2005 |

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Les DRH à la recherche de l'équilibre

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• Plus business partners que jamais, les DRH poursuivent leurs efforts en matière d'accompagnement des restructurations et de gestion des compétences clés. Ils disposent d'un large éventail d'outils de gestion, mais s'inquiètent du fossé grandissant entre la fonction RH et les cadres opérationnels, dont dépend leur bonne utilisation.

Une lueur dans la grisaille de l'automne ? À tout le moins un signal positif alors que le marché du recrutement semble s'animer à nouveau. Pour la première fois depuis la création, en 2003, du baromètre Liaisons sociales-CSC – réalisé cette année en collaboration avec Entreprise & Personnel –, les restructurations ne constituent plus le principal sujet de préoccupation des DRH. S'il reste, malgré tout, un thème prioritaire pour la moitié des 120 responsables de ressources humaines interrogés (voir mode d'emploi page 76), l'accompagnement des réorganisations opérationnelles passe au second plan au profit de la gestion des compétences clés, citée en premier par… 51 % des DRH. « Les réorganisations sont devenues une donnée structurelle aujourd'hui, analyse Jean-François Pilliard, directeur général chargé des ressources humaines du groupe Schneider Electric. La mondialisation des affaires impose de globaliser la gestion de l'outil de production. Et, pour un nombre croissant d'entreprises en transformation permanente, il est vital de s'assurer de la loyauté des salariés les plus compétents. » Dans une économie désormais mondialisée, les entreprises ouvrent des usines là où les marchés sont dynamiques, modernisent leurs installations pour améliorer la productivité et réduisent la voilure dans les pays où le coût du travail est trop élevé. Ce qui multiplie les réorganisations internes et les restructurations. Une situation vécue au quotidien chez SAP. « Certains programmeurs sont maintenant situés en Inde ou en Chine. D'autre part, l'évolution du marché est telle que nous passons en moyenne par une grande réorganisation tous les trois ans », indique Gérard Hochap fel, DRH France. Et ses services ne sont pas les moins touchés puisqu'une plate-forme RH est en cours d'installation à Prague.

Évolution des priorités

Dans ce grand remue-ménage, les patrons des ressources humaines ont plus que jamais besoin de conserver les talents dans l'entreprise. En 2005, l'amélioration de la gestion des compétences clés est une priorité pour plus de la moitié des responsables interrogées contre 40 % en 2003 ; et 38 % d'entre eux insistent sur la nécessité d'attirer et de retenir les meilleurs éléments contre un tiers il y a deux ans. Faut-il y voir, également, les prémisses des difficultés de recrutement attendues avec le choc démographique ? En tout cas, chez de nombreux interlocuteurs, le recrutement est devenu un dossier central. « Nous refusons des chantiers faute de personnel qualifié en nombre suffisant, explique Pierre Coppey, DRH groupe de Vinci SA. Alors que nous étions les champions des plans sociaux entre 1980 et 2000, nous recrutons et formons à tour de bras aujourd'hui. Nos 10 académies internes ne désemplissent pas. »

Autre indicateur d'une pause dans les réorganisations internes : pour près d'un tiers des DRH, la maîtrise des coûts de la fonction RH n'est plus prioritaire, alors que 15 % seulement s'en désintéressaient l'an dernier. C'est aussi le signe tangible que les efforts accomplis dans ce domaine au cours des années précédentes portent leurs fruits. D'autant plus que le recours à l'externalisation des systèmes et des ressources baisse notablement. Pour Jacques Lauvergne, DRH d'Arcelor, « c'est un chantier qui est maintenant derrière nous ».

Une large diffusion des outils de gestion RH

Depuis sa création, le baromètre confirme, chaque année, la large diffusion dans les entreprises des outils de gestion des ressources humaines répondant à la nécessité d'améliorer les compétences individuelles et collectives des salariés. Outre l'entretien annuel d'évaluation, qui fait désormais partie du basique, les trois quarts des DRH déclarent avoir mis en place un référentiel des emplois et des compétences, une gestion des populations clés et une bourse de mobilité (respectivement 76 %, 74 % et 73 %). « Ces indicateurs sont indispensables pour contractualiser ce que l'entreprise attend du salarié, explique Christian Brière de la Hosseraye, ancien DRH du groupe Thomson et directeur de l'organisme de formation Cross knowledge. La priorité d'un DRH aujourd'hui est de donner des perspectives pour transformer les salariés en acteurs capables de prendre des initiatives. Une évolution difficile, car nombre d'entre eux sont tétanisés par la montée du chômage et les menaces sur leur propre poste. »

Mais tous ces outils n'ont d'intérêt que si leur utilisation est soigneusement mesurée et suivie d'effets dans l'évolution des politiques RH. « La pire des situations serait de s'en tenir à la mise en place de ces outils. Si les informations recueillies ne sont pas exploitées pour améliorer la gestion du personnel et donner des perspectives de carrière, la DRH se disqualifie très rapidement aux yeux des salariés », estime François Moulinier, DRH de Sin et Stes, l'un des principaux intervenants sur le marché français du nettoyage.

Pour faire fonctionner correctement ces outils et mettre en œuvre les politiques RH, il est indispensable d'obtenir l'implication des managers opérationnels. Car c'est à eux que revient la tâche de mener les entretiens d'évaluation ou d'utiliser les référentiels des emplois et des compétences. Si les DRH sont devenus des business partners, selon l'expression désormais consacrée – 94 % d'entre eux estiment que leur point de vue est très largement pris en compte dans les réflexions stratégiques menées au sein du comité de direction –, ils constatent, non sans inquiétude, un décalage persistant entre la direction et les cadres de proximité.

« Un manque de relais sur le terrain »

Plus d'un quart d'entre eux (27 %) considèrent que les salariés ont une mauvaise image de la DRH. Plus significatif, plus d'un sur quatre (27 %) estime ne pas avoir la capacité de faire évoluer l'organisation et la culture de son entreprise. « Les outils que nous généralisons sont très utiles. Mais le problème vient souvent d'un manque de relais sur le terrain », estime Dominique Franchot, DRH d'Eramet. Paul Schiettecatte, directeur d'Entreprise & Personnel, évoque pour sa part un problème de communication et de positionnement à l'égard des salariés. « Le DRH est jugé sur les apparences. Or il y a beaucoup trop de filtres entre lui et les salariés. Sans parler du côté lénifiant de la presse d'entreprise et du ton un peu convenu du discours RH. »

Un constat largement partagé par les DRH interrogés dans le cadre du baromètre Liaisons sociales-CSC- Entreprise & Personnel. Près des trois quarts d'entre eux (73 %) indiquent qu'ils s'attacheront, en 2006, à rechercher le soutien des managers et près de six sur dix (58 %) qu'ils solliciteront davantage l'adhésion des salariés (contre 5 % l'an dernier). Pour Jacques Lauvergne, DRH d'Arcelor, la distance entre la direction générale et la base de l'entreprise s'est accrue et pousse les responsables RH à informer les salariés sur les enjeux économiques. « Le DRH doit constamment recréer du lien. Les managers du corporate sont prioritairement préoccupés d'améliorer la compétitivité de nos entreprises car ils disposent de tous les éléments de comparaison qui ne sont pas forcément connus au niveau du terrain », explique-t-il. Or si la confiance n'existe pas, tous les processus mis en place pour obtenir des gains de productivité risquent de se gripper. « Certaines entreprises répondent au problème en proposant une charte éthique, indique Alain Riberry, partner chez CSC. Encore faut-il que la direction puisse respecter ses engagements au moment de procéder à une réorganisation aboutissant à des pertes d'emplois. »

Pour le consultant, les DRH se heurtent aux conséquences négatives engendrées par la conjoncture et la gestion à l'économie des ressources humaines mise en œuvre au cours des dernières années. « À rechercher uniquement les gains de productivité, les entreprises ont oublié d'investir dans l'humain, poursuit-il. Or, avec la généralisation du fonctionnement par projets, elles ont besoin de salariés suffisamment bien dans leur tête pour être coopératifs et entreprenants. » C'est dire si les responsables des ressources humaines ont du pain sur la planche.

68 % des DRH veulent améliorer la productivité de leurs services

75 % souhaitent diminuer les coûts de la paie et de l'administration du personnel

59 % veulent réduire le coût de la gestion des RH