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Vie des entreprises

L'anthropologie, outil RH

Vie des entreprises | CONSEIL ET MANAGEMENT | publié le : 01.03.2004 | Anne-Cécile Geoffroy

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L'anthropologie, outil RH

Crédit photo Anne-Cécile Geoffroy

Des entreprises utilisent l'anthropologie pour comprendre leurs ressorts culturels.

Votre entreprise est-elle une secte conquérante, une société savante, entrepreneuriale ou bien un gang impérialiste ? La question peut paraître saugrenue, elle est pourtant l'une des clés d'entrée d'un nouveau mode de management fondé sur l'anthropologie structurale. « En bâtissant une typologie des entreprises, l'idée est de leur faire prendre conscience que leur culture, c'est-à-dire le fondement de leur cohésion sociale, est à gérer comme un actif stratégique sur lequel elles peuvent s'appuyer pour favoriser la productivité », explique Alain Simon, cofondateur avec Marc Lebailly du cabinet ACG (pour Alternative Consulting Group). Alors que les méthodes traditionnelles de conduite du changement jouent principalement sur la communication interpersonnelle, l'anthropologie cherche à déterminer le mythe fondateur de l'entreprise avec tous les rites, les comportements, les discours et les signes qui la caractérisent pour lui permettre de s'adapter à un nouvel environnement. « Nous établissons un diagnostic en puisant dans les archives de l'entreprise et en menant des entretiens avec les salariés. À partir de là nous pouvons travailler et faire évoluer les fondamentaux culturels pour aider les directions à élaborer une nouvelle stratégie », précise Alain Simon.

L'Office national des forêts (ONF) s'est ainsi tourné vers l'anthropologie pour passer d'une logique de conservation du patrimoine à une logique de service aux usagers de la forêt, de développement durable et de création de valeurs. Un changement culturel radical. « Tous les outils de management traditionnel que nous utilisions jusqu'alors étaient très performants en termes de rationalité, raconte Jacques Des cargues, ancien directeur général de l'ONF. Nous avions mis en place une comptabilité analytique parfaite, une direction marketing digne de ce nom, mais à chaque fois le processus de changement se grippait. Les freins ne se situaient pas au niveau des individus mais bien dans les éléments qui soudaient les rapports sociaux au sein de l'entreprise depuis sa création. Une fois identifiées les réticences, les réformes ont pu prendre corps. »

Le deuil de l'appartenance

À Villers-la-Montagne, en Meurthe-et-Moselle, une fonderie de PSA cédée au groupe Manzoni-Bouchot en 2002 a utilisé l'anthropologie. « PSA avait très bien anticipé cette cession, explique Thoai Phong Nguyen, consultant pour le cabinet ACG. La direction avait mis en place une hot line pour répondre aux questions des salariés. Aucun mouvement social n'est venu perturber la cession. Mais, au bout d'un an, des salariés ont commencé à démissionner. Les projets ne tournaient plus aussi bien. »

Si les salariés avaient très bien compris l'idée de cession, ils n'avaient pas fait le deuil de leur appartenance au groupe PSA. « Nous savons ce que nous étions, dites-nous ce que nous devenons… C'est en gros la question à laquelle je dois répondre chaque jour depuis la cession, explique Thierry Hesling, directeur de la fonderie. Il n'est pas facile de quitter un groupe avec une culture forte pour en intégrer un autre qui n'a pas les mêmes fondements. L'anthropologie nous a permis d'identifier tout cela. Il nous faut faire notre deuil de PSA pour rebondir. » Un processus qui ne pourra s'opérer que dans la durée.

Auteur

  • Anne-Cécile Geoffroy