Lorsque Bouygues Telecom a commencé son activité en 1994, ses effectifs se montaient à 40 personnes. Cinq ans plus tard, le nombre de salariés est passé à 4 600. L'entreprise recrute en moyenne 150 collaborateurs par mois. Intervenant très actif sur le marché de l'emploi, Bouygues Telecom demande en contrepartie un grand investissement personnel à ses salariés, dont la moyenne d'âge est de 29 ans et dont plus de la moitié sont des cadres fortement diplômés. Au début, le personnel était constitué à 80 % d'anciens du groupe Bouygues et à 20 % de personnes issues de l'extérieur. Les pourcentages se sont inversés depuis. « Il était donc nécessaire de mettre en place des éléments favorisant la culture d'entreprise afin de pouvoir mieux mobiliser des profils d'individus très différents », explique Martine Mauret-Mata, directrice du département développement des compétences chez l'opérateur de téléphones mobiles. D'autant que les métiers ne cessent d'évoluer. Il s'en crée même au fur et à mesure, surtout dans le domaine technique. Exemple, la priorité n'est plus au déploiement du réseau Bouygues puisque l'ensemble du territoire français commence à être couvert. De même, le métier des commerciaux a pris un virage. Alors qu'il était plutôt axé sur la recherche de la clientèle, il doit aujourd'hui se préoccuper davantage de la fidéliser. À cette évolution rapide des métiers s'ajoute également l'absence d'un cadre de référence. Il n'existe pas en effet de convention collective dans le secteur des télécoms.

Pour toutes ces raisons, Bouygues Telecom souhaitait disposer d'un outil lui permettant de mettre en adéquation son offre de formation aux besoins d'évolution des compétences. Il lui fallait aussi se constituer un référentiel des métiers auquel puissent se raccrocher les salariés. Une enquête menée en 1997 a ainsi révélé que 75 % des collaborateurs ressentaient le besoin d'avoir davantage de repères et voulaient bénéficier d'informations pour gérer leur carrière. « Nous voulions disposer d'une cartographie de nos compétences. Avec pour objectif d'identifier celles qui sont majeures et visualiser les passerelles possibles entre les différents métiers qui partagent certaines compétences. Le tout dans un souci de bien maîtriser les mobilités verticales et horizontales », explique Martine Mauret-Mata. Deux solutions étaient possibles : soit partir des compétences de chaque salarié, soit identifier directement les différents métiers de l'entreprise et y rattacher ensuite les compétences des collaborateurs. À la démarche individuelle a été préférée l'approche collective. « Je me suis rendu compte que les entreprises qui avaient opté pour la première solution se trouvaient bloquées. Elles n'arrivaient pas à rattacher les cas individuels à un repère collectif », précise Martine Mauret-Mata.

Restait à trouver un prestataire pour répondre à cette demande dans les plus brefs délais. Le choix de Bouygues Telecom s'est porté sur Eurogroup, partenaire de l'éditeur Trivium.En moins d'un an, le progiciel Gingo était opérationnel, pour un investissement de 1 million de francs. La direction des ressources humaines a souhaité que la démarche soit participative, sans trop solliciter le personnel de terrain. En février 1998, un pilote de la solution informatique a été réalisé. Il a été par la suite aménagé en fonction des remarques de plusieurs groupes de travail qui réunissaient un chef de projet par métier, des managers et les collaborateurs exerçant le métier concerné. Environ 600 personnes ont été impliquées dans la démarche.

Pour identifier les métiers, la direction des ressources humaines est partie des classifications de la base de données administrative du personnel. Elle en a extrait environ 300 fonctions regroupées en emplois similaires, puis en sous-familles de métiers. Aujourd'hui, le référentiel compte 149 métiers, avec sept pages de descriptif par métier. Depuis mai 1999, le référentiel est accessible sur l'intranet. Un observatoire vient d'être créé pour veiller à sa mise à jour en fonction des nouveaux besoins. Cet arbre de compétences a notamment pour objectif de repérer les formations à mettre en place. « Cet outil restera un simple outil d'aide à la décision. Car il reste une part de subjectivité qu'aucun progiciel n'est capable de prendre en compte », estime la responsable des compétences de Bouygues Telecom.