logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Vie des entreprises

Les IUP sur la sellette

Vie des entreprises | JOURNAL DE LA FORMATION | publié le : 01.12.2003 | Sarah Delattre

Avec la réforme LMD (licence, master, doctorat), les IUP, qui forment plus de 37 000 ingénieurs maîtres par an, craignent de perdre leur âme.

Gros émoi dans les instituts universitaires professionnalisés (IUP). Créés en 1992, les quelque 360 IUP craignent en effet de perdre leur identité dans la réforme LMD (licence, master, doctorat), qui vise notamment à harmoniser et à rendre les formations universitaires plus lisibles en Europe. Ce nouveau schéma, qui devrait faciliter la mobilité des étudiants au sein de l'Union, instaure ainsi trois niveaux de césure, à bac + 3, bac + 5 et bac + 8. Un découpage qui oblige les diplômes intermédiaires tels les DUT ou les maîtrises à une profonde modification s'ils souhaitent rester en course. Les IUP, qui délivrent le titre d'ingénieur maître à bac + 4 et forment environ 37 000 étudiants par an, sont dans cette situation. « Le ministère de l'Éducation nationale a décidé de supprimer purement et simplement les IUP », s'emporte Francis Artigue, président de l'Assemblée des directeurs d'IUP (Adiup). À tout le moins, les IUP risquent de perdre leur spécificité, à savoir une forte professionnalisation et un titre qui, en plus de dix ans, a su décrocher ses galons. Explications.

D'après une circulaire ministérielle publiée le 3 septembre dernier, les IUP, qui s'organisent autour de trois années d'études, n'en comporteraient plus que deux. Le recrutement, qui se situe à bac + 2 aujourd'hui, s'effectuerait à un niveau postlicence. « Les étudiants titulaires d'un DUT ou d'un BTS, par exemple, devraient ainsi passer par la case fac pour y préparer une licence avant d'intégrer un IUP », traduit Brice Escoda, étudiant, coordinateur régional pour l'Ile-de-France. « Ce parcours peut en handicaper certains. »

La charte sur laquelle se fonde les IUP, qui met l'accent sur une entrée sélective, un enseignement par alternance et des liens forts avec le secteur professionnel, passerait à la trappe. Surtout, le titre d'ingénieur maître n'aurait plus lieu d'être. À leur sortie, les étudiants d'IUP empocheraient un master professionnel classique (bac + 5). Et là, la pilule ne passe pas. « Nous sommes pour une harmonisation européenne, mais contre une professionnalisation universitaire au rabais, fustige Saloua Bennaghmouch, directrice de l'UFR Peps de Colmar et coordinatrice nationale des IUP. Nous souhaitons préparer à la fois à la licence et au master, en préservant notre titre, qui permet de nous identifier. »

Priorité aux savoirs académiques

« Les IUP ne sont menacés ni dans leur existence ni dans leur mission, estime la Conférence des présidents d'université (CPU). Mais ils se retrouvent dans une situation bâtarde et craignent d'être noyés dans la masse des futurs masters. Certes, ils gagnent une année de plus. Mais en glissant de bac + 4 à bac + 5, l'accent est mis sur des savoirs plus académiques que professionnels. » La réforme suscite d'autant plus d'inquiétudes que le ministère entretient un certain flou. Et les IUP se demandent à quelle sauce ils vont être mangés. « Des IUP ont déjà été habilités sur la base de l'ancien modèle, s'énerve Francis Artigue. Mais, aujourd'hui, les conseillers ministériels disent tout et son contraire aux universités en cours d'accréditation. » Une manifestation a eu lieu le 13 novembre dans plusieurs villes françaises. Le 19 novembre, les directeurs d'IUP ont été reçus au ministère de l'Éducation nationale qui a tenté de les rassurer sur les missions et les moyens des instituts.

Auteur

  • Sarah Delattre