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Le bloc-notes

Septembre noir

Le bloc-notes | publié le : 01.09.2003 | Bernard Brunhes

Gloire à José Bové

L'automne sera chaud : chaque année les oiseaux de mauvais augure annoncent ainsi une rentrée difficile. Heureusement, la réalité ne confirme que rarement ces sombres prédictions. Le millésime 2003 va déroger à la règle… L'automne sera agité.

Malgré la séparation des pouvoirs exécutif et judiciaire, ou peut-être à cause de cette séparation, les autorités ont fait un beau cadeau aux contestataires de tout poil. Pour que reprennent les agitations dans l'Éducation nationale, chez les intermittents ou dans des services publics, il ne manquait qu'un ingrédient à la révolte : un leader charismatique capable de pallier la faiblesse des syndicats, divisés et dépassés. Dans leur grande bonté, les autorités ont mis José Bové en situation d'être ce chef. De l'arrestation héliportée à la libération conditionnelle à la veille de la réunion du Larzac et à temps pour préparer Cancun, rien n'a manqué pour lui donner l'aura qui lui manquait encore ou qui avait pâli.

Une opposition parlementaire qui n'a pas encore trouvé sa voie ni sa voix et peine à ressusciter quelque chose qui pourrait ressembler à la défunte gauche plurielle, des syndicats qui n'ont pas réussi à faire front devant le gouvernement ni à adopter collectivement une attitude constructive, des salariés et notamment les intermittents abandonnés aux sirènes d'un extrémisme sans projet… il fallait trouver un lien, un mot d'ordre, un sens à toutes ces contestations : l'altermondialisation. Il fallait trouver une organisation. Elle existe, ou plutôt elles existent, avec les syndicats du Groupe des 10, les mouvements qui lui sont liés, de AC ! au DAL en passant par Act Up ou Droits devant, des mouvements plus intellectuels comme Attac. Et tant pis si les projets des uns et des autres ne sont pas tous cohérents… et sûrement pas compatibles avec les revendications sociales des cheminots ou des électriciens. Au-dessus de tout cela, il fallait donc un leader. Nous l'avons.

Exit pour un moment le rêve de la refondation sociale, le rêve d'un dialogue social constructif entre des partenaires puissants, responsables et aptes à entraîner leurs troupes comme à les écouter.

L'urgence d'une nouvelle législation sur les restructurations

Pendant que la rue s'agite, les entreprises souffrent. Mais la reprise tarde à s'annoncer. Les indicateurs économiques de cet été ne permettent pas d'envisager une sortie à court terme de la stagnation, au bord de la récession. Les chiffres de l'emploi vont donc repartir à la hausse ; nul ne l'ignore. Que faut-il faire pour éviter ce retour à un passé de lourd chômage que l'on espérait révolu ? Il faudrait d'abord que les partenaires sociaux se décident à mettre au point et à proposer au gouvernement les dispositifs qui permettront de limiter la casse des plans sociaux. Prévisions et préavis ; responsabilisation plus claire des employeurs ; des plans sociaux réellement négociés entre employeurs et syndicats, en lieu et place des simples consultations de comités d'entreprise qui ne font que retarder l'échéance ; intervention constructive des collectivités locales pour la réindustrialisation et le reclassement ; rôle plus large, plus responsable et plus engagé des services publics de l'emploi. Des négociations interprofessionnelles ont commencé sur ces thèmes. Elles vont leur train de sénateur. Pendant les négociations, la casse continue.

Le président de la République a annoncé le 14 juillet une réforme des services publics de l'emploi. Monsieur le Premier ministre, n'attendez pas la fin du quinquennat pour l'engager. On vante souvent en haut lieu la qualité du modèle social suédois : l'un de ses ingrédients est une remarquable gestion du marché du travail. Dans une économie où la mobilité et la flexibilité du tissu économique entraînent la précarité des emplois, la fluidité du marché du travail devrait être un objectif prioritaire, hors d'atteinte aujourd'hui avec des administrations insuffisantes en effectifs, trop éclatées et dispersées, mal reliées à l'Éducation nationale, peu portées à la coopération avec les entreprises privées de travail temporaire de recrutement ou de reclassement.

Les morts de la canicule

Après les milliers de décès dus à la canicule estivale, analyses et polémiques ne manquent pas. Une question devrait dominer toutes les autres : comment se fait-il que tant de vieillards soient abandonnés à eux-mêmes, solitaires, ignorés ? Ils n'ont donc pas d'enfants ou de petits-enfants, pas de neveux ou de nièces, pas de voisins attentifs ? Mais non, c'est à l'État de s'en préoccuper, aux assistantes sociales de les suivre, aux hôpitaux de les réhydrater… La famille est en vacances. Tant que les solidarités les plus évidentes – famille et voisinage – seront oubliées ou refusées, notre société aura du souci à se faire pour son avenir et sa cohésion.

Auteur

  • Bernard Brunhes