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Air France Industries booste ses OS

Dossier | publié le : 01.09.2003 | S. D.

Pour remédier au manque de qualification de ses ouvriers spécialisés et les aider à décrocher un CAP ou un BEP, Air France Industries les incite à recourir à la VAE. Une reconnaissance professionnelle qui s'accompagne d'une promotion.

Cas sans doute unique dans l'aéronautique, Jean-Louis Sylvestre a été embauché à Air France Industries (AFI) en 1984 avec pour tout bagage un simple CAP… de coiffure. Vingt ans après, ce père de six enfants travaille à l'entretien des circuits d'oxygène dans les avions. En quête de reconnaissance professionnelle, il a profité de la nouvelle validation des acquis de l'expérience pour valoriser ses compétences et décrocher, en décembre 2002, un BEP de maintenance. « Entre mon travail et les devoirs des enfants, l'élaboration de mon dossier s'est avérée fastidieuse. Il a fallu que je décrive mes tâches, le matériel utilisé, que j'explique comment je répare certaines pannes. Et puis j'ai dû aussi apporter la preuve de mes activités associatives et politiques pour qu'elles soient prises en compte », raconte ce quinqua volubile.

Requalifier des ouvriers sans diplôme

Aujourd'hui Jean-Louis Sylvestre ne regrette pas ces cinq mois de bachotage. Car s'il occupe toujours le même poste, il a pu faire valider ses vingt années d'expérience et troquer son statut d'OS contre celui de professionnel. Une promotion sociale qui s'est également traduite par une augmentation de 45 euros mensuels. Air France Industries, qui emploie 10 500 personnes, soutient largement ces initiatives individuelles. Depuis 1996, en effet, l'entreprise qui répare, chaque année, 500 avions dans ses immenses hangars d'Orly nord cherche à professionnaliser ses ouvriers de maintenance, faiblement qualifiés. « Nous évoluons dans un environnement de plus en plus réglementé. Désormais, les salariés doivent posséder une certification pour travailler sur un poste. Pour conserver son avantage concurrentiel, l'entreprise doit donc requalifier les ouvriers sans diplôme », explique Philippe Postic, DRH d'Air France Industries. La course au diplôme importe d'autant plus que l'avancement dans cette filiale de la compagnie aérienne française est extrêmement codifié. « Sans diplôme, les salariés évoluent plus difficilement. Or, une fois embauchés, ils ne cherchent pas à nous quitter. La VAE nous sert à les accompagner dans leur carrière », ajoute Joëlle Andrieu, responsable formation et alternance.

Une procédure qui implique la hiérarchie

Après avoir remis à niveau plus de 300 OS en finançant des formations relativement lourdes, Air France Industries les a incités à décrocher un CAP ou un BEP en utilisant la validation des acquis professionnels dès 1997, puis la VAE à partir de 2002. « C'était un moyen de reconnaître leur professionnalisation », résume Philippe Postic. Épaulée par le Centre académique de validation des acquis (Cava) de Créteil, la filiale d'Air France a mis au point une procédure sophistiquée, ponctuée de rendez-vous importants. Six mois avant que les jurys de validation délibèrent, une première réunion d'information rassemble d'abord les salariés volontaires, leurs supérieurs hiérarchiques, le responsable de la formation et un membre du Cava. Ensuite, pour aider les ouvriers à se positionner et à choisir la certification appropriée, un représentant du Cava visite les ateliers pour mieux appréhender leur quotidien. Troisième étape, les volontaires rencontrent un enseignant pour établir un parallèle entre leur parcours professionnel et le diplôme visé.

De son côté, Air France Industries ne reste pas inactif. « Isolés, les volontaires risquent d'abandonner. Nous incitons donc leurs supérieurs hiérarchiques à s'investir dans la procédure de validation. Nous les aidons aussi sur des points techniques. Deux semaines avant l'examen, un intervenant de notre institut du management vient préparer les candidats à l'entretien oral », précise Joëlle Andrieu. Jean-Louis Sylvestre confirme : « J'ai eu la chance d'avoir un chef qui m'a consacré beaucoup de temps, ce qui n'a pas été le cas de tous mes collègues. »

L'entreprise prend aussi en charge les 30 euros de frais de dossier. Ce qui représente une goutte d'eau par comparaison avec les 1,6 million d'euros déjà investis par AFI dans la formation. Autre facteur de motivation : alors que la reconnaissance de l'expérience professionnelle peine souvent à se traduire par une reconnaissance salariale, Air France Industries a fait un choix très clair : « Après six mois d'observation, les ouvriers fraîchement diplômés obtiennent une promotion et deviennent des professionnels reconnus », précise Joëlle Andrieu.

Bilan global de l'opération, 95 ouvriers, âgés pour la plupart de 40 à 50 ans, ont pu gravir des échelons grâce à la validation des acquis de l'expérience. Mais, seul bémol, ces derniers sont désormais arrivés en bout de piste. Car Air France Industries n'envisage pas de les emmener au-delà du BEP. « En revanche, nous nous intéressons aujourd'hui aux 800 personnels de logistique qui doivent maîtriser de plus en plus de compétences », indique le directeur des ressources humaines Philippe Postic. La VAE a donc de l'avenir à AFI.

Auteur

  • S. D.