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Ces cadres à qui l'on offre un MBA

Dossier | publié le : 01.04.2003 | S. D.

Bagage indispensable pour les uns, coup de pouce salutaire pour les autres, le MBA est pour les entreprises un moyen de fidéliser les meilleurs. À condition toutefois d'être en mesure de répondre ensuite à leurs nouvelles ambitions.

Chez Bain & Co, spécialiste du conseil en stratégie, 80 % des dirigeants parisiens alignent un MBA sur leur CV. Et sur les cent consultants du bureau de Paris, six ont actuellement interrompu leurs missions pour rejoindre les bancs des prestigieuses écoles américaines de Wharton, de Harvard ou de l'Insead, plus proche. Consultant depuis quatre ans au sein de la célèbre firme bostonienne, Nicolaï Gérard est parti étudier à Wharton en 2001. « Lorsque je travaillais sur des projets avec des directeurs marketing ou financiers, je me sentais un peu faible malgré ma formation initiale en école de commerce. Un MBA est pratiquement devenu indispensable pour passer un cran au-dessus. Ma hiérarchie n'a pas été difficile à convaincre et a accepté de prendre en charge la totalité des frais d'inscription », témoigne-t-il. Au total, Bain & Co a dépensé sans broncher 65 000 euros pour que Nicolaï Gérard puisse réaliser son rêve. En contrepartie, une clause de dédit-formation l'oblige à rester au moins deux ans dans l'entreprise, sous peine de devoir rembourser une partie de l'investissement. Influencés par le modèle anglo-saxon, les cabinets français de conseil sont des inconditionnels du plus prestigieux des masters classé en tête de tous les MBA par le très sérieux Financial Times (voir tableau page 73).

Un sésame pour les jeunes ambitieux

Le MBA est en effet un passage obligé, un véritable sésame pour les jeunes les plus ambitieux. « À moins d'avoir un potentiel et des compétences exceptionnels, les consultants qui veulent devenir associate doivent généralement posséder un MBA », confirme Patrick Béhar, directeur associé chez Booz Allen & Hamilton. Sur les six partenaires que compte le cabinet de conseil à Paris, la moitié possède un MBA. Le nec plus ultra de la formation en management présente de nombreux avantages. Outre qu'il enrichit le CV de son détenteur, il représente aussi une parenthèse dorée dans la carrière toute tracée des consultants. « Nos métiers sont exigeants. C'est la raison pour laquelle nous conseillons à nos consultants juniors de faire une pause avant de chercher à devenir associés, de ne pas mener d'une seule traite leur carrière, explique Caroline Detalle, DRH et directrice de la communication de Bain & Co, à Paris. Les options qui s'offrent à ceux qui le souhaitent, et dont le niveau de résultats correspond aux exigences de Bain, sont soit de partir en congé sabbatique, soit d'aménager leur temps de travail. Mais, parmi toutes les possibilités, le MBA est celle qui a notre préférence. »

Par comparaison, Deloitte & Touche semble être moins sensible à cette forme d'élitisme. « L'année dernière, trois consultants sont partis suivre un MBA, raconte Éric Piétrac, le DRH. Souvent, dans le conseil, les ingénieurs de formation s'aperçoivent qu'ils ont besoin d'un vernis plus important en management. Mais, aujourd'hui, la richesse des programmes dans les écoles de commerce françaises rend le MBA un peu superflu. » Des entreprises de tout premier plan comme L'Oréal, BioMérieux, Schneider Electric ou Coca-Cola investissent dans ces coûteuses formations, mais de façon ponctuelle. Et toujours pour des cadres à haut potentiel, souvent destinés à mener des carrières internationales. Promis à un brillant avenir, ces heureux élus ont besoin d'approfondir leurs connaissances en management, en finance ou en gestion des ressources humaines. « Les entreprises qui misent sur les MBA sont des groupes internationaux. Elles investissent dans l'avenir et forment leurs futurs responsables aux pratiques de management », observe Michel Kalika, directeur de l'EMBA de Dauphine. Le MBA est alors un outil parmi d'autres pour fidéliser les meilleurs éléments.

Un moyen de prendre des responsabilités

Souvent aussi, le cadre qui a le sentiment de piétiner prend lui-même l'initiative de suivre un MBA et sollicite son employeur. Ainsi, Isabel Pelta, chef de projet à Archemis, filiale d'Aventis, a convaincu sa hiérarchie de lui financer un MBA à l'EM Lyon. « Cela faisait huit ans que je faisais de la recherche-développement sur de nouvelles molécules et j'ai eu l'impression d'en avoir fait le tour. J'ai voulu m'ouvrir à d'autres domaines de connaissance, comme la finance ou le management. Ce que j'aimerais, en sortant de l'école, c'est m'orienter vers un poste plus stratégique, prospecter des marchés et coordonner des projets plus importants. » Son employeur a accepté de la soutenir mais à condition qu'elle suive sa formation sans abandonner son travail.

La formule du MBA en formation continue, baptisée EMBA pour Executive MBA, séduit de plus en plus d'employeurs. Installé en Rhône-Alpes, le fabricant danois de matériel de réfrigération Danfoss, qui finance lui-même deux MBA, affiche une nette préférence pour l'Executive MBA. « Le MBA, c'est le must du management. Dans tous les cas, les demandes sont donc examinées avec soin. Nous nous assurons d'abord que les postulants sont capables de suivre les cours, qu'ils ont par exemple un bon niveau d'anglais. Ensuite, les cadres en discutent avec leur hiérarchie directe et le service de la formation, avant d'obtenir l'agrément du comité de direction », indique Daniel Gentelet, responsable de la formation.

Gare au retour des cadres prodigues !

Mais les entreprises qui misent des sommes astronomiques sur ces formations haut de gamme doivent aussi être conscientes que le retour des cadres prodigues n'est pas toujours facile à gérer. Remontés à bloc, un carnet d'adresses bien rempli sur les bancs de l'école, ils piaffent d'impatience et veulent que leur carrière décolle ensuite rapidement. Des attentes auxquelles les employeurs doivent répondre, sous peine de voir leurs meilleurs éléments filer vers d'autres horizons. « À son retour, un consultant junior soutenu par la firme gagne ses galons d'associate six mois avant un junior lui aussi titulaire d'un MBA qui commence à travailler chez Booz Allen », indique Patrick Béhar. Gravissant les échelons plus rapidement que leurs congénères, les consultants diplômés sont augmentés en conséquence. Leur salaire, à leur retour, fait grosso modo un bond de 12 %.

Auteur

  • S. D.