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Cinq parcours d'accès à l'emploi

Dossier | publié le : 01.09.1999 |

Ils sont cinq, titulaires d'un diplôme universitaire de 2e ou de 3e cycle. Multipliant stages et petits boulots pendant leurs études, ils ont réussi leur intégration en entreprise. Seul bémol, le salaire n'est pas toujours à la hauteur de leurs espérances. Portraits.

Mariana (maîtrise de langues) : savoir rester modeste

Réalisme ou manque d'assurance ? Après avoir obtenu une maîtrise de langues étrangères appliquées (LEA) en 1995 à l'université de Nanterre, Mariana Reali ne se faisait guère d'illusions. « Je souhaitais m'orienter vers le secteur de la communication. Mais je trouvais ma formation un peu légère, pas assez rigoureuse. J'estimais ne pas pouvoir prétendre à un poste ni à un salaire élevés. Et je n'avais pas d'expérience. » Pourtant, sur son CV figuraient deux stages : quatre semaines au service de presse de Dior, en fin de licence, et dix mois comme assistante d'une attachée de presse indépendante, après sa maîtrise. Mariana aurait aimé effectuer ses premières armes au service de presse d'un grand groupe industriel. « Mais je n'avais pas le bon profil. On me conseillait de débuter en agence, pour éventuellement postuler de nouveau quelques années plus tard. Les entreprises préfèrent les diplômés d'écoles de communication ou de commerce. » Elle change alors de stratégie.

Sans trop de peine, elle trouve un poste d'attachée de presse dans une agence de communication, filiale d'un grand groupe. « Ma candidature a été bien accueillie par les agences, reconnaît Mariana. Les recrutements y sont plus larges. » Aujourd'hui, elle se réjouit de son choix : « J'ai une large palette d'activités. Dans une grande entreprise, les tâches sont plus cloisonnées. » Même si elle admet que son salaire (10 500 francs brut sur treize mois) serait sans doute supérieur en entreprise.

V. L.

Philippe (DESS contrôle qualité des aliments) : pas de complexe à avoir

A 31 ans, Philippe Monin n'a jamais connu l'échec. Après sa maîtrise de chimie, décrochée en 1992 à l'université Joseph-Fourier de Grenoble, et son service militaire, il s'inscrit au DESS contrôle qualité des aliments, dans la même faculté. « Après quatre ans de chimie pure, j'avais envie de m'orienter vers la chimie appliquée. » Lors de ce 3e cycle, il doit réaliser un stage de trois mois. Il l'effectue dans une PME rhônalpine de soixante-dix salariés, Antésite, spécialisée dans la production et la distribution de réglisse. « J'ai travaillé sur l'optimisation du processus de création de la réglisse. » Le stage se déroule sans accroc et débouche sur un CDI.

Son parcours sans faute ressemble à l'itinéraire classique d'un diplômé d'école d'ingénieurs : deux stages de deux mois en cours de cursus – chez Rhône-Poulenc – et un CDI découlant d'un stage de fin d'études. « Les universitaires n'ont pas de complexe à avoir par rapport aux ingénieurs, soutient Philippe. Même si les universités, contrairement aux écoles, ne savent pas encore mettre en valeur leurs diplômés, nous avons globalement les mêmes compétences. Et les éventuelles différences se nivellent très vite sur le terrain. Les diplômés d'écoles sont peut-être plus à l'aise dans les grandes entreprises. Mais les universitaires sont débrouillards, plus autonomes. Personne n'est là pour nous tenir par la main pendant nos études. Ce complexe injustifié disparaîtra lorsque les employeurs cesseront de préférer les ingénieurs aux universitaires… » Fidèle à ses principes, Philippe choisit ses stagiaires plutôt à l'université, et de préférence dans son DESS.

V. L.

Jeanne (maîtrise de droit) : sans 3e cycle, point de salut !

Quand elle se met en quête d'un poste de juriste d'entreprise, en octobre 1996, Jeanne Limerat se heurte à un obstacle dont elle n'avait pas soupçonné l'importance : elle n'est pas titulaire d'un 3e cycle. « Je n'arrivais pas à décrocher d'entretien, se souvient-elle. Toujours pour la même raison : pas de DESS dans mon cursus. » Jeanne a pourtant un parcours attractif : trois ans de droit en Angleterre, à la South Bank University de Londres, émaillés de deux stages dans des cabinets d'avocats français, une maîtrise de droit international et européen, et le diplôme de l'Institut de droit comparé, à l'université d'Assas. Mais il lui manque le fameux sésame. « Je ne visais sans doute pas les bonnes entreprises, ajoute Jeanne. Toutes relevaient mes lacunes en droit français. » Sans s'intéresser à ses connaissances en droit anglais.

Après quatre mois de recherches infructueuses, elle se résout à faire jouer le « piston » – un membre de sa famille est dans la profession – et décroche un stage au service juridique d'une entreprise pharmaceutique. Recrutée pour quatre semaines, elle y reste cinq mois en stage… puis obtient un CDI. Un poste créé pour elle, « entre l'assistant juridique et le juriste, avec la promesse de monter en grade au bout d'un an ». Promesse tenue : Jeanne est aujourd'hui juriste pour le département recherche et développement, avec un salaire équivalant à celui d'un DESS, « entre 190 000 et 220 000 francs par an ». Contre toute attente, son cursus atypique est devenu un plus : « J'ai été embauchée parce que j'étais bilingue et pour ma connaissance du droit anglais. Nous sommes régulièrement confrontés à la législation américaine, très similaire à l'anglaise, et très différente de la nôtre. »

V. L.

Florence (maîtrise de psycho) : un parcours tâtonnant

En commençant ses études de psycho, Florence rêvait d'être experte en criminologie. Dix ans plus tard, elle est attachée commerciale dans une société de crédit… Études de psychologie et fonctions commerciales font pourtant rarement bon ménage aux yeux des entreprises, qui préfèrent, pour ces postes, des recrues a priori plus opérationnelles. Mais Florence est un cas à part. Son bac éco en poche, elle postule en 1989 dans une société de crédit… pensant envoyer sa candidature à une banque. Elle est embauchée pour deux mois, au service recouvrement. « Je m'amusais bien, j'aimais mon travail, j'avais un salaire. Le bonheur ! » Mais, à la rentrée suivante, elle s'inscrit en Deug de psycho à l'université de Paris-V, avec une seule idée en tête : « À terme, je voulais m'inscrire au DESS de psychopathologie. »

Son premier cycle se déroule sans heurt, ponctué de petits contrats toujours dans la même société de crédit. En licence, c'est la rupture : « La sélection est devenue draconienne. Seuls 20 à 25 % des étudiants passaient le cap de la troisième année. J'étais découragée. Je n'avais plus envie d'aller en cours. » Florence obtient un CDD d'un an, toujours dans la même entreprise, qu'elle effectue pendant son redoublement. En dépit de l'obtention de sa maîtrise, elle abandonne son projet professionnel initial pour postuler dans l'entreprise qu'elle connaît bien, où elle patiente un an, avant de bénéficier d'un CDI. La procédure d'embauche n'est qu'une formalité : « J'ai passé un entretien et un test, comme toute nouvelle recrue, mais j'avais des lettres de recommandation du directeur d'agence et du directeur régional. » Depuis mars dernier, elle travaille au service commercial. Malgré son bac + 4 et son expérience, Florence ne bénéficie pas du statut cadre. « Avec mon diplôme de psycho, je suis assimilée aux bac + 2, bac + 3. Seuls les maîtrises d'éco et les diplômés d'écoles de commerce débutent comme cadres. » Résultat, elle touche près de 2 000 francs de moins par mois.

V. L.

Bérangère (maîtrise de droit) : l'intérêt des petits boulots

Restauration, comptabilité dans un garage, service après-vente d'un magasin de meubles : Bérangère Nester, 23 ans, est une habituée des petits boulots pendant les études. « Toutes ces expériences m'ont appris à bien appréhender le monde du travail », estime-t-elle. Et l'ont poussée à en découdre. Inscrite en maîtrise de droit privé, à la fin de 1997, elle ne souhaite guère passer une année de plus sur les bancs de la fac : « J'avais envie de bouger, de travailler. » Son université, Paris-XII, vient d'instaurer les unités d'expérience professionnelle (UEP), des stages de quatre mois et demi destinés aux 2e cycles. Bérangère saute sur l'occasion. Contre l'avis de ses enseignants : « Avec une alternance d'un semestre en entreprise et d'un semestre en cours, les profs nous parlaient de “maîtrise bâtarde”… »

En février 1998, elle commence néanmoins son stage aux éditions juridiques Lamy. Elle assure, entre autres, une assistance téléphonique, destinée aux clients en quête de conseils et d'informations. Son diplôme, bien sûr, mais également ses jobs et son attitude séduisent l'entreprise : « Une partie de l'entretien était axé sur ce que m'avaient apporté mes petits boulots. Et j'étais rodée aux procédures d'embauche. Je savais comment me comporter, je connaissais le type de questions qu'on allait me poser. » Bérangère est recrutée en CDD dans la foulée de son stage. Parallèlement, elle décroche sa maîtrise, comme douze des treize étudiants de sa formation, volontaires pour les UEP. « Notre parcours n'était donc pas si bâtard que ça… » Ses camarades qui ne sont pas passés par la case jobs d'été ou stages ont, eux, plus de difficultés à s'insérer.

V. L.