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Les PPESV peinent à s'imposer

Dossier | publié le : 01.12.2002 | S.B.

L'épargne salariale « à vocation retraite » n'a pas gagné beaucoup de terrain depuis la mise en place des PPESV. Les quelques entreprises qui s'y lancent cherchent des formules originales pour les différencier des autres supports.

En créant, en 2001, les plans partenariaux d'épargne salariale volontaire (PPESV), Laurent Fabius ne cachait pas sa volonté d'en faire des supports « à vocation retraite ». Près de deux ans après, le débat sur la finalité de ces plans d'épargne d'entreprise, bloqués dix ans, n'est toujours pas clos. « Le PPESV ? Ce n'est absolument pas un outil retraite, affirme Gilbert Gurcel, directeur de La Mondiale Entreprises. Les sommes investies ne procureront jamais un revenu complémentaire jusqu'à la fin de la vie. » « C'est le produit d'épargne salariale le plus ambigu qui soit, estime pour sa part Jean-Christophe Le Duigou, de la CGT. En l'état actuel, il limite le glissement vers la retraite car la sortie se fait en capital et la perspective obligatoire est limitée à dix ans. » Une analyse complétée par Guy Cabessa, le président du directoire d'Interépargne : « Il manque aux PPESV la durée et la défiscalisation à l'entrée pour en faire de véritables outils de capitalisation. »

Bien rares, les plans de retraite qui disent leur nom

Aujourd'hui, rares sont les entreprises à avoir mis en place ces plans d'épargne. Et plus rares encore sont celles qui les ont clairement présentés comme des outils à vocation retraite. Aux Autoroutes du sud de la France, par exemple, le PPESV lancé en début d'année s'est inscrit dans le cadre de l'ouverture du capital de l'entreprise. Mais pas dans une logique de retraite, à laquelle la société d'autoroutes a répondu par le biais de deux régimes de retraite surcomplémentaire. À Carrefour, la vocation retraite n'est pas davantage affichée. « Nous avons déconnecté le PPESV de la question des retraites, car les organisations syndicales ne souhaitaient pas lier les deux », explique Marc Veyron, chargé de la négociation des accords nationaux pour la DRH France.

Chez Unilever, en revanche, on a décidé de ne pas taire cette possibilité. « Nous pensions que le PPESV était une anticipation de ce qui se ferait par la suite en matière de retraite, explique Christian Bourreau, le DRH. Nous avons donc parlé très clairement de ce plan comme d'une épargne longue dont l'une des perspectives possibles était la retraite. » Au final, le PPESV mis en place avec l'accord des cinq syndicats ressemble à plus d'un titre à un régime de retraite à cotisations définies. L'entreprise abonde les sommes investies dans le cadre du « versement mensuel programmé », mais pas celles issues de la participation ou de l'intéressement. Les salariés qui optent pour cette solution cotisent à hauteur de 0,5 % jusqu'au plafond de la Sécurité sociale, l'entreprise rajoutant 1,5 %. Au-delà, la cotisation passe à 3 %, abondée d'autant par l'employeur. Originalité supplémentaire, les salariés peuvent opter pour une gestion pilotée par horizon, BNP Paribas se chargeant d'optimiser le placement de l'épargne en fonction de la durée prévue de blocage.

Gestion sécurisée à l'approche de la retraite

Dans les sociétés pétrolières du groupe TotalFinaElf, le PPESV mis en place au printemps dernier s'inscrit plus clairement encore dans la perspective de la cessation d'activité. Pour preuve, les brochures d'explication destinées aux salariés évoquent un « système d'épargne long terme à vocation retraite ». Il s'agit d'un régime alimenté uniquement par prélèvements mensuels, dans lequel les salariés peuvent investir jusqu'à 13 euros forfaitaires par mois plus 0,32 % de leur salaire brut, l'entreprise abondant à hauteur de 300 %. Comme chez Unilever, le personnel peut investir librement ses versements dans huit fonds plus ou moins risqués, ou choisir la gestion pilotée. Dans ce cas, c'est Axa qui se charge des arbitrages, avec une gestion dynamique « jusqu'à douze ans avant la retraite » et une gestion sécurisée à l'approche du départ. « Pour optimiser le pilotage de la sortie, nous avons prévu des rendez-vous entre le salarié et un conseiller financier dix ans et six ans avant l'âge de départ à la retraite », précise Yves Mutschler, responsable de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié, qui voit dans le PPESV un « bel outil de préparation à la retraite ».

Un dispositif dans lequel certaines entreprises n'ont cependant pas souhaité investir, dans la mesure où elles avaient déjà défriché le terrain de l'épargne salariale à vocation retraite. C'est particulièrement vrai chez PSA, qui a instauré un plan d'épargne long terme (Pelt) en 1999. Un plan dont la finalité est particulièrement claire : les sommes investies y sont bloquées pendant… quarante ans ! « On ne peut pas, légalement, prévoir un blocage jusqu'à l'âge de la retraite. On a donc fixé le terme à quarante ans, sachant que le départ en retraite fait partie des cas de déblocage anticipé », explique Patrick de Vanssay, directeur retraite, prévoyance, épargne salariale. Et ça marche ! Le constructeur automobile, qui abonde les versements de ses salariés à 50 %, a mis 6 millions d'euros au pot cette année, soit le maximum qu'il s'était fixé. En tout, environ 20 millions d'euros ont été investis dans les quatre fonds du Pelt en 2002.

Ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier

Chez Aventis aussi, on dispose, depuis 1997, d'un Pelt. Avec une durée de blocage nettement moindre – huit ans – qui le rapproche davantage du PPESV. « Nous avons jugé que les deux ans d'écart dans la durée de blocage ne faisaient pas une grande différence », explique Thierry Ehlinger, responsable de l'épargne salariale, qui juge la période « inconfortable » pour des modifications. « Nous sommes dans l'attente des résultats des discussions sur les retraites prévues pour 2003 », indique-t-il. Dans sa communication interne, le groupe souligne la possible vocation retraite du support. Un choix qui l'a conduit à ne pas favoriser les placements en actions de l'entreprise. « On insiste beaucoup sur la diversification car il est extrêmement dangereux de mettre tous ses œufs dans le même panier. C'est la raison pour laquelle le niveau de l'abondement ne dépend pas des choix de placement, mais de la durée de blocage », précise Thierry Ehlinger.

Peu utilisés pour l'instant, les systèmes d'épargne salariale long terme ont, pourtant, un grand mérite : celui de tenter de sécuriser davantage l'investissement des salariés. Ce qui est rarement le cas dans les PEE classiques, alors même que toutes les enquêtes montrent que les souscripteurs sont nombreux à envisager d'utiliser leurs fonds au moment de leur retraite. « Dans la plupart des sociétés du CAC 40, l'abondement reste plus favorable pour les placements en titres de l'entreprise », révèle Yves Mutschler. D'où une « très forte concentration de l'épargne salariale » sur ces titres, dont les effets nocifs apparaissent actuellement. À Carrefour, par exemple, où 75 % de l'épargne salariale est investie en actions de l'entreprise, on compte sur le futur PPESV pour « inviter les salariés à s'interroger sur leurs placements » et « amener un peu plus de diversification ». Une initiative qui, chez Alcatel, France Télécom ou Vivendi Universal, aurait certainement été bienvenue voilà quelques mois !

Des salariés « écureuils »

Les salariés utiliseraient-ils leur plan d'épargne d'entreprise comme un PPESV qui ne dit pas son nom ? Rares sont, en tout cas, ceux qui débloquent leurs fonds au bout de cinq ans, lorsqu'ils deviennent disponibles.

Une tendance qui, curieusement, ne semble pas avoir souffert de la baisse des marchés financiers. « Les flux sont restés inchangés sur les avoirs disponibles », affirme Guy Cabessa, d'Interépargne, qui avoue avoir appelé plusieurs fois sa plate-forme téléphonique de relations clients, située à Caen, pour s'en assurer.

Et pour cause : à Interépargne, la moitié des fonds gérés sont aujourd'hui à la libre disposition de leurs détenteurs… Cette propension à conserver les sommes ne signifie pas pour autant que les salariés s'interdisent de faire des arbitrages. Dans la plupart des entreprises, on observe cette année un plus grand intérêt pour les fonds majoritairement obligataires, moins risqués que les fonds actions. « Nous avons même beaucoup de demandes d'entreprises qui veulent mettre en place des fonds purement monétaires », confie Guy Cabessa.

Auteur

  • S.B.