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Les dangers des 401 (k)

Dossier | publié le : 01.12.2002 | S.D.

Les scandales financiers et la chute du Dow Jones ont des répercussions dramatiques pour certains salariés et retraités américains. De plus en plus de voix s'élèvent pour demander une réforme des plans de retraite 401 (k), montrés du doigt pour leurs investissements à haut risque.

À 40 ans, la vie de Dennis Vegas s'est arrêtée. L'ancien vice-président du marketing d'Enron n'a toujours pas retrouvé de travail depuis son licenciement, en décembre 2001. « Je n'ai pas seulement perdu mon emploi et 400 000 dollars de stock-options. J'ai aussi perdu ma retraite : les 150 000 dollars de mon 401 (k) se sont envolés. » Comme lui, 11 000 employés d'Enron, qui avaient investi la totalité de leur plan de retraite dans les actions de l'entreprise, ont tout perdu. Pis : de nombreux gestionnaires de fonds de pension avaient aussi misé sur l'ex-géant du courtage de l'énergie. Ou sur WorldCom, K-Mart, Global Crossing, etc. À cause de ces faillites frauduleuses, des millions de familles américaines, parmi celles qui avaient choisi la formule du 401 (k), ont perdu une partie de l'épargne qui devait assurer leurs vieux jours.

Ainsi, la caisse des fonctionnaires de Californie (Calpers), le plus grand fonds de pension américain avec ses 150 milliards de dollars d'actifs, a vu s'évaporer 565 millions de dollars dans la faillite de WorldCom, et 142 millions dans celle d'Enron. Et la situation est la même pour les fonds de pension des États de New York, du Michigan ou de Floride. Un rapport rendu public le 17 octobre 2002 par la coalition No more Enrons (regroupant associations de consommateurs et syndicats) estime que, au total, les récentes faillites retentissantes ont coûté aux Américains 200 milliards de dollars, dont 175 dans l'effondrement des 401 (k). Bien que personne n'ait chiffré le nombre exact de retraités cherchant aujourd'hui à retrouver un travail, les statistiques du Département américain du travail montrent que le taux d'emploi des plus de 65 ans est passé de 12,8 % en 2000 à 13,1 % en 2001.

Très attractif en période de flambée boursière

Les conséquences de ces banqueroutes sur l'épargne salariale américaine ont été d'autant plus dramatiques que les 401 (k) – ces fonds de pension à cotisations définies, non garantis et massivement investis en actions – avaient acquis une popularité sans précédent. En 1983, ils comptaient 7 millions de cotisants et pesaient 94 millions de dollars. En 2000, 42 millions d'Américains, soit 30 % des salariés, en possédaient un, le montant d'épargne atteignant 2 000 milliards de dollars… Dans le même temps, les régimes à prestations définies, garantis, en cas de faillite, par une agence fédérale, et dont les placements sont beaucoup plus diversifiés, ont subi un net recul : en vingt ans, le nombre de salariés du secteur privé couverts a baissé de 40 à 20 %… « Le 401 (k) est un système bien moins cher à gérer pour les employeurs, devenu encore plus attractif au moment de la surévaluation boursière, explique Damon Silvers, avocat général de l'AFL-CIO, la grande centrale syndicale américaine. Pour les salariés, il est souple : lors d'un changement d'emploi, ils peuvent choisir de le transférer ou de demander le paiement des sommes investies, à condition de payer une taxe de 10 %. Mais cela n'en fait pas un plan de retraite efficace… »

Les scandales à répétition ont commencé à provoquer une remise en cause des politiques d'investissement des gestionnaires de fonds de pension, qui cherchent actuellement à faire évoluer leurs pratiques. Mais une véritable réforme du système ne pourra se passer d'une loi au Congrès. Actuellement, deux projets – l'un démocrate, l'autre républicain – sont en concurrence. Les deux propositions prévoient que les salariés doivent pouvoir bénéficier de conseils indépendants en matière d'investissements boursiers et ne plus être obligés, comme c'était le cas chez Enron, d'attendre 55 ans pour vendre leurs actions d'entreprise. Le projet du sénateur démocrate Ted Kennedy accorde aussi un droit de regard aux salariés sur la gestion de leurs fonds de pension, stipule qu'ils doivent être informés lorsque leurs dirigeants vendent leurs actions et préconise la mise en place d'un fonds de garantie. Enfin, les salariés ne pourraient acquérir qu'un pourcentage limité d'actions de leur entreprise, afin de ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier.

À la Chambre des représentants, le projet du républicain John Boehner, épaulé par l'administration Bush, laisse davantage de marge de manœuvre aux employeurs. Il précise que ces derniers devront offrir à leurs salariés les services de professionnels indépendants pour les conseiller dans leurs investissements. Une proposition qui a provoqué un tollé, ses nombreux détracteurs ne croyant pas une seule seconde à l'indépendance de conseillers payés par les employeurs… Bloqué depuis des mois, ce dossier sensible pourrait maintenant être rouvert. Avec le basculement du Sénat dans le camp républicain, le mois dernier, le gouvernement Bush a désormais les mains libres.

Auteur

  • S.D.