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Le bloc-notes

Le licenciement économique nécessite une vraie réforme

Le bloc-notes | publié le : 01.10.2002 | Raymond Soubie

Climat social

Comme chaque année, l'automne apporte son lot de prévisions pessimistes sur le climat social. Cela ne signifie pas pour autant une vague, plus ou moins forte, de conflits sociaux. Si ceux-ci éclatent, ce sera, comme toujours, dans le secteur public, le plus sensible et le plus agité, comme le montrent toutes les statistiques récentes.

Cette année, ce type de conflits pourrait avoir deux formes : soit qu'ils demeurent limités à une entreprise publique, y survenant pour une raison « locale » ; soit, hypothèse autrement dangereuse, qu'ils soient la conséquence d'une cristallisation et d'une crispation de l'ensemble du secteur public, à la suite de l'affaire France Télécom, autour des thèmes de la responsabilité de l'État actionnaire, des risques de la dérégulation et de l'intérêt respectif des (re)nationalisations et des privatisations.

Dans ce contexte, le gouvernement aurait intérêt à définir rapidement sa stratégie, le rôle de l'État actionnaire et le cap à fixer aux entreprises publiques concurrentielles, en rappelant qu'il n'est pas de l'intérêt de celles-ci – ni de celui du contribuable – qu'elles restent pour l'éternité dans le secteur public.

Pour une vraie modernisation sociale

Que peut faire le gouvernement pour réformer, de manière intelligente et constructive, la loi dite de modernisation sociale, comme il en a exprimé l'intention ? Il ne doit pas se limiter à abroger, ou à suspendre, telle ou telle disposition, dans le seul but de tenir une promesse. Cette démarche serait critiquable et immédiatement dénoncée comme une régression. Elle ne résoudrait d'ailleurs rien. Le droit des licenciements économiques est si complexe, relève de tant de strates législatives, réglementaires ou jurisprudentielles, qu'une modification à la marge serait vaine.

Une vraie réforme devrait s'élaborer autour d'objectifs positifs. Le premier serait de permettre aux entreprises de mieux prévenir et de préparer les restructurations, alors qu'aujourd'hui une telle démarche risque d'être considérée en droit comme un délit d'entrave. Le second serait de conduire une politique de reclassement et d'employabilité pour les salariés des PME, souvent tenus à l'écart des avantages et garanties des plans sociaux.

Pour atteindre ces deux objectifs, qui font l'objet d'un large consensus implicite ou explicite parmi les organisations syndicales et aussi dans les entreprises, le gouvernement a deux voies possibles. La première est de demander aux partenaires sociaux de traiter ces questions par une négociation, celle-ci pouvant s'étendre à la formation professionnelle. C'est la méthode utilisée par Philippe Séguin, il y a plus de quinze ans, à la suite de l'abrogation de l'autorisation administrative de licenciement.

La seconde voie serait de permettre aux entreprises, par la signature d'accords majoritaires ou, à défaut, conclus par un minimum d'organisations syndicales représentatives, de déroger sur certains points aux dispositions des textes actuels pour favoriser la prévention et un meilleur traitement des restructurations. Les deux voies ne sont d'ailleurs pas opposées.

Dialogue social : avantages et servitudes

François Fillon l'a récemment expérimenté : le dialogue social est nécessaire, supérieur à toute autre méthode, mais n'est pas de tout repos. Chaque organisation consultée, parce qu'elle n'est pas chargée de la décision finale, se met en situation de rapport de force, fait des déclarations bien senties sur les perrons et exprime in fine ses déceptions ou ses oppositions. C'est une des raisons pour lesquelles il convient de clarifier les règles du dialogue social, pour ne pas avoir de mauvaises surprises.

Il convient de distinguer dans celui-ci les parts respectives de la concertation et de la négociation. Quand il s'agit de concertation, c'est le gouvernement qui, en définitive, détient l'entière responsabilité de la décision, et il est normal que le déroulement du dialogue ne soit pas un long fleuve tranquille. Pour ce qui est de la négociation, les partenaires sociaux prennent eux-mêmes cette responsabilité et sont donc enclins à modérer leurs déclarations pour ne pas faire échouer le processus menant à l'accord. Ces règles paraissent élémentaires mais sont mal comprises ou employées.

Dans un but de clarification, il aurait sans doute été utile au gouvernement d'organiser avant le début des concertations et négociations une conférence tripartite avec les syndicats et le patronat sur les méthodes et les calendriers.

Auteur

  • Raymond Soubie