Comment garder, dans l'entreprise, une trace de toute l'expérience cumulée par les anciens avant qu'ils ne partent en retraite et la transmettre aux nouvelles générations ? C'est l'équation délicate que la direction de la SNCF tente de résoudre depuis quelque temps, en prévision de la cessation d'activité (et dans une moindre mesure du fort turnover interne) de plus de la moitié de son personnel d'encadrement dans les années à venir. « On s'est rendu compte que le capital immatériel, ce n'était pas qu'un concept, explique Françoise Dumas, responsable des compétences au département des ressources humaines de la direction du matériel de l'entreprise. Nos experts internationaux ont des compétences techniques pointues que nous devons recenser, transmettre et partager. Garder une trace de leur expérience et de leur vécu représente donc un véritable projet d'entreprise de gestion et de transmission des compétences. »

Pour y parvenir, la direction du matériel de la SNCF a récemment mis sur son intranet un « logiciel de retour sur expérience » (le logiciel Candela, développé par la SSII française Cril Technology) qui vise à recenser et mettre à jour les connaissances implicites et explicites de l'entreprise. Avec l'objectif final de rassembler l'ensemble des éléments d'une tâche donnée en un « modèle de connaissances », pour devenir le noyau dur du savoir-faire de l'entreprise. Et ainsi gagner en productivité, éviter de refaire les erreurs du passé, réduire les coûts de formation, développer le travail en réseau afin que chacun comprenne les contraintes des autres… « On a besoin d'un rétroviseur pour voir d'où on vient et savoir où on va, avance Françoise Dumas. C'est pourquoi il est important de capitaliser les compétences et les processus développés. » La base de données, constituée de la mémoire des anciens, a ainsi été mise à la disposition de près d'un millier de techniciens de la direction du matériel et dans tous les établissements TGV de l'Hexagone. Elle permet de transmettre le savoir-faire de l'entreprise aux jeunes diplômés et de leur expliquer les raisons de certaines évolutions techniques concernant l'ergonomie des cabines de conduite ou la sécurité des portes des TGV.

Françoise Dumas entrevoit deux autres fonctionnalités, à une plus grande échelle, à ce logiciel. Primo : former les futurs conducteurs de train par un futur retraité. Secundo : recenser, centraliser et étudier, pour les prévenir, les milliers de conflits sociaux qui grèvent chaque année l'entreprise.