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Se regrouper pour survivre

Dossier | publié le : 01.05.2002 | F.D.

Amorcée il y a plusieurs années et encouragée par le mouvement mutualiste, la concentration dans le secteur de la prévoyance santé s'intensifie. Et la réforme du Code de la mutualité va encore l'accentuer.

Il en reste du chemin à parcourir ! La moitié des prestations de santé est gérée par seulement 5 % des mutuelles. Cela donne la mesure de l'éclatement du paysage mutualiste. « Actuellement, devant un environnement hyperconcurrentiel, plus aucune mutuelle ne peut rester isolée », affirme Guy Herry, secrétaire général de la FNMF. D'autant que de plus en plus d'acteurs interviennent sur le marché de la complémentaire santé, qu'il s'agisse des assureurs, des banques, des institutions de prévoyance ou de la grande distribution… « L'obtention d'une taille critique pour pouvoir négocier d'égal à égal avec les partenaires institutionnels et mieux peser sur l'offre de soins et la recherche d'économies d'échelle pour être plus performant sont devenues indispensables », reconnaît Maurice Ronat, président de la Fédération nationale de la mutualité interprofessionnelle (FNMI).

Le mouvement de concentration qui s'est opéré dans le secteur mutualiste de la santé est marqué par une grande diversité des regroupements. Ces derniers peuvent s'effectuer sous la forme de fusion, de mise en commun de moyens (GIE, unions techniques…) et emprunteront sans doute bientôt celle de la convention de substitution, permise par le nouveau Code de la mutualité – cette convention autorise une mutuelle insuffisamment dotée en fonds propres à déléguer la gestion de ses risques à une autre mutuelle ou union. Parmi les plus importants regroupements intervenus au cours des dix-huit derniers mois figure, notamment, la création d'Imadiès, résultant de la fusion de six mutuelles fortement ancrées en Normandie. Imadiès a intégré en 2001 une autre mutuelle locale, la MPC. Constituée en janvier 2001 à partir de Mutuelle Ociane, PAM et Adour Mutualité, Ociane est devenue la première mutuelle dans le Sud-Ouest (20 % du marché aquitain). Elle n'exclut pas la possibilité d'accueillir d'autres mutuelles partageant la même vision stratégique. Cela a déjà été le cas en novembre 2001 avec la mutuelle MAD en Dordogne.

Le groupe mutualiste, innovation du Code

Dernière fusion en date, celle des mutuelles AMI et du groupe des Mutuelles Présence, qui a donné naissance, le 6 avril dernier, aux Mutuelles Présence. Les personnels des deux entités étaient déjà rassemblés depuis janvier 2001 dans une union technique de moyens. Cette fusion a hissé la nouvelle entité au premier rang des mutuelles interprofessionnelles en Rhône-Alpes. Par ailleurs, des partenariats techniques, organisationnels et financiers ont été aussi initiés en régions Rhône-Alpes, Auvergne, Provence-Côte d'Azur avec d'autres mutuelles (la mutuelle Arpica, Les Mutuelles de la Drôme, Les Mutuelles Usmar, Novalia). « Un nouveau groupe issu de ces partenariats va naître en mai prochain », annonce Daniel Barallon, responsable du marketing stratégique et de la communication institutionnelle à Mutuelles Présence. En marge de ces grands regroupements, d'autres de plus petite taille ont eu lieu dans la Drôme, l'Ain, la Vendée ou en Loire-Atlantique.

Deux fusions sont d'ores et déjà programmées pour janvier 2003 : Champagne Santé avec la Mutuelle ardennaise et la Mutuelle auboise, qui font toutes deux déjà partie du GIE Altéis, en Champagne-Ardenne ; et Mutouest avec Préviade, qui devraient, ensemble, couvrir 1,1 million de bénéficiaires et former la première mutuelle interprofessionnelle française. De son côté, la mutuelle nationale MCD n'entend pas se laisser distancer. Outre son développement interne, elle s'appuie sur une croissance externe par absorption de petites mutuelles. « Nous renforçons ainsi notre maillage sur les départements où nous sommes peu présents, indique Patrick Sayaque, directeur du développement. Avec la mutuelle Stanislas et d'autres de plus de 50 000 personnes, nous créerons en 2003 un groupe mutualiste, innovation essentielle du nouveau Code, car il préserve les identités tout en instaurant des liens forts et durables entre mutuelles. »

Autre forme de regroupement, la mise en commun de moyens a donné naissance à des unions telles que Mutuelles Ensemble, Adrea, l'Utim, Via Santé ou Harmonie. Ces structures communes concernent généralement le back-office, l'informatique et le marketing. « Assez répandue et efficace, cette forme de regroupement peut toutefois donner lieu à des difficultés de fonctionnement opérationnel », ne cache pas Gilbert Boucher, consultant spécialisé chez Orga Consultants. L'Uname, qui regroupe 23 mutuelles interprofessionnelles, professionnelles et d'entreprises de toute taille, est un exemple intéressant d'union technique de réassurance. « Notre mission consiste à conforter nos mutuelles dans leur activité sur leur territoire », précise Clifford Kunstler, directeur général. À terme, estime Maurice Ronat, « nous n'aurons plus dans le paysage de la mutualité interprofessionnelle de la santé qu'une quinzaine de mutuelles travaillant en réseau ». Pour les 29 mutuelles de la fonction publique, qui protègent 9 millions de personnes, « la problématique est différente, fait observer Maurice Duranton, président de la Mutualité Fonction publique. En effet, beaucoup ont procédé à des fusions il y a déjà plusieurs dizaines d'années. Et la plupart ont acquis une taille critique ». Le président de la MFP préfère parler de « partenariats de proximité et d'identité ». À l'instar de l'accord signé entre la MG, la MNH et la MNT (voir page 70), qui s'est traduit par la création d'une plate-forme santé Ligne Claire. Les trois mutuelles de Bercy (Mutuelle du Trésor, Mutuelle des agents des impôts, Mutuelle des douanes) rejointes par celle du ministère de la Justice ont décidé d'harmoniser leurs prestations et de se doter d'outils communs. D'autres mutuelles de fonctionnaires d'État pourraient suivre le mouvement.

Des offres plus cohérentes

La Mutuelle générale de l'éducation nationale s'est aussi engagée dans des partenariats « répondant à des projets mutualistes », explique Jean-Michel Laxalt, son président. Un projet d'éducation à la santé et de prévention a été lancé avec la Mutuelle des étudiants. Pour la complémentaire santé, la MGEN Filia a été créée et ouverte aux assurés de la Maif. Enfin, la MGEN comme, d'ailleurs, la Mutualité Fonction publique et la MG entendent s'impliquer dans le développement de la retraite complémentaire des fonctionnaires au moyen d'une nouvelle structure, baptisée UMR (Union mutualiste Retraite).

Pour Guy Herry, de la FNMF, « le principal défi à relever dans l'avenir pour les mutuelles de santé sera de trouver les moyens de se différencier des autres acteurs du marché ».Ce qui suppose, selon Maurice Duranton, de la MFP, « des offres plus cohérentes, plus lisibles » et plus complètes dans le domaine de la prévoyance. Seul le regroupement des forces mutualistes peut permettre de proposer des contrats plus performants en termes de garanties et de prix et d'offrir davantage de services.

Auteur

  • F.D.