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Un marché qui se concentre

Dossier | publié le : 01.10.2001 | H.C.

En pleine croissance, le marché des progiciels de gestion du temps a attiré des acteurs d'horizons très variés. Mais aujourd'hui les prestataires se rapprochent pour renforcer leurs positions.

Les éditeurs de progiciels de gestion du temps et des activités (GTA) n'en finissent pas de remercier Martine Aubry. Les entreprises, désormais contraintes par la loi d'adopter un outil de décompte du temps de travail de leurs salariés, ont en effet massivement opté pour des solutions de contrôle informatique, interfacées à des badgeuses ou à des systèmes autodéclaratifs (sur intranet) et connectées aux services de paie. La croissance du marché en est le parfait reflet : elle atteint 30 à 40 % chaque année depuis trois ans. Un coup de fouet qui a profité à l'ensemble des acteurs. À commencer par les pionniers du secteur, des sociétés indépendantes, généralement issues du monde de l'horlogerie, qui, dans les années 70, se sont lancées dans la fabrication de pointeuses, avant d'évoluer naturellement vers la GTA. Bodet (450 salariés, 280 millions de francs de chiffre d'affaires) caracole en tête, devant Horoquartz (180 salariés, 130 millions de francs de chiffre d'affaires) et Chronotique (120 salariés, 65 millions de francs de chiffre d'affaires). Elles ont progressivement été rejointes sur cette activité par les éditeurs d'ERP (progiciels de gestion intégrés), comme PeopleSoft, IBM ou SAP, qui développent des modules dédiés à la gestion des ressources humaines, et par les éditeurs des progiciels de paie, comme Sage et CCMX SSII, ou Sopra et GFI Informatique, qui ont eux aussi pris position sur ce marché à coups de rachats de sociétés spécialisées. En 1992, Sopra a racheté Pléiades à l'éditeur Sereti, une solution de gestion des temps adossée à du badgeage, commercialisée aujourd'hui essentiellement auprès de grandes entreprises. GFI est entré plus récemment sur le marché. Il a pris le contrôle, en 1998, de la société Ceacti, un vétéran du marché également issu du monde de l'horlogerie, dont il a fait passer l'effectif de 30 à 120 personnes.

Des fournisseurs jugés sur leur réactivité

Après 2002, quand toutes les entreprises seront passées aux 35 heures et majoritairement équipées en GTA, les éditeurs s'attendent toutefois à une décrue de la demande. « Nous allons entrer sur un marché de renouvellement et retomber sur un taux de croissance de l'ordre de 15 à 20 % », estime Didier Marcel, directeur commercial du pôle gestion des temps de GFI Informatique. Si ces perspectives restent confortables, les prestataires n'entendent cependant pas s'en contenter. Aujourd'hui, la plupart d'entre eux élargissent leur offre aux logiciels de planification et d'optimisation. Proches de l'intelligence artificielle, ces outils informatiques complexes qui fonctionnent sur la base d'algorithmes permettent, à partir de toutes les contraintes de l'aménagement et de la réduction du temps de travail en vigueur dans l'entreprise et des desiderata des collaborateurs, de produire des solutions optimisées d'emplois du temps collectifs et individuels. En les intégrant à leur offre de GTA, les éditeurs misent sur leur complémentarité. « La planification permet de prévoir et d'organiser les ressources. Les outils de GTA, eux, contrôlent ce qui est effectivement réalisé », explique Germain Bourgeois, responsable du développement chez Adesoft, un éditeur de logiciels de planification.

Le marché, pour l'heure, est toutefois beaucoup moins développé que celui de la GTA. Tout d'abord, parce que, à la différence du contrôle du temps de travail, les entreprises n'ont aucune obligation en matière de planification. Ensuite, parce que l'offre et la demande ne sont pas toujours matures. « Certains logiciels ont été joliment packagés mais ne tiennent pas la route. Sous couvert de planification sous contraintes, ils se contentent en fait de produire des “plannings rusés”, constate Jean-François Lansard, consultant chez CXP, un cabinet d'études et de conseil. Par ailleurs, les clients ont parfois du mal à formuler leurs besoins et à définir l'ensemble des contraintes à paramétrer dans le système. » Sans compter la qualité variable des prestations. « À efficacité comparable des produits, c'est pourtant sur la réactivité des fournisseurs et sur leur proximité géographique que va se jouer en grande partie la concurrence », assure Didier Boujou, le P-DG d'Horoquartz. Le marché, pour autant, se développe progressivement. À l'heure actuelle, les installations sont réalisées principalement au sein des secteurs les plus concernés par les flux d'activité et les horaires variables : la banque-assurance, la grande distribution, les transports, les centres d'appels et le secteur médical. À terme, les prestataires visent également le secteur industriel.

Les indépendants sont de plus en plus rares

En amont, les entreprises de GTA ne développent pas elles-mêmes les logiciels de planification. « Il s'agit de métiers bien différents. La planification fait appel aux compétences de spécialistes de la recherche opérationnelle qui mettent souvent plus de dix ans à développer cette technologie. Et ces chercheurs, en France, se comptent sur les doigts de la main », précise Christine Monier, directrice du marketing d'EquiTime, un concurrent d'Adesoft. C'est pourquoi les opérateurs de la GTA, pour infiltrer ce créneau pointu, se contentent d'acheter les structures existantes, souvent des start-up développées par des étudiants férus d'algorithmes. La société Horoquartz vient ainsi de racheter Manatom, une start-up créée en 1999. L'entreprise Bodet, de son côté, a choisi d'entrer au début de l'année dans le capital d'EquiTime, start-up d'une dizaine de personnes qui, pour son premier exercice, a réalisé un chiffre d'affaires de 1,3 million de francs. « Ils nous apportent leur technologie et bénéficient en contrepartie de la force de vente de nos 26 commerciaux », justifie Fabrice Chausserais, le directeur marketing de Bodet. Sopra envisage plutôt de s'en tenir à une stratégie de partenariats ponctuels avec des éditeurs spécialisés. Mais trouvera-t-il encore des candidats au rapprochement ? Car, au rythme où progresse la concentration, les acteurs indépendants se font de plus en plus rares.

Auteur

  • H.C.