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Les PME emboîtent le pas

DOSSIER | publié le : 01.10.2001 | S. D.

Moins bien équipées en informatique que les grandes entreprises, les PME avancent plus timidement sur le terrain de la gestion du temps. Et lorsqu'elles se dotent d'un outil spécifique, elles en attendent un retour sur investissement plus important.

Poussées par les 35 heures, les petites et les moyennes entreprises font désormais comme les plus grandes : elles quittent l'ère du papier pour se doter de systèmes informatisés de gestion du temps. Les prestataires, qui se sont engouffrés dans la brèche, tentent de répondre le plus possible aux particularités de cette clientèle. « S'attaquer aux PME n'est pas chose aisée, explique Didier Marcel, directeur commercial de GFI Informatique. Nous avons souvent affaire à un interlocuteur unique, le dirigeant de l'entreprise, avide de conseils et de solutions sur mesure, mais généralement dépourvu de connaissances informatiques. » D'autant que beaucoup sont encore perdus dans le dédale des lois Aubry.

« Les PME ont parfois du mal à décortiquer la loi sur la RTT, trop complexe à leurs yeux. Elles attendent donc beaucoup des éditeurs de logiciels », juge Fabrice Chausserais, directeur du marketing chez Bodet. Résultat, les éditeurs ont dû s'adapter pour proposer à la fois une offre de proximité, en déployant sur le terrain leurs forces de vente, et une réactivité sans faille. Certains se sont aussi mis à commercialiser des produits plus faciles à installer et à utiliser.

Concrètement, les PME optent rarement pour des systèmes autodéclaratifs sur intranet (voir l'exemple de Bull, page 88) ; elles leur préfèrent le plus souvent la traditionnelle pointeuse. C'est le cas par exemple d'Invacare Poirier, un fabricant tourangeau de matériel pour handicapés, qui utilise Gestor Easy, un progiciel développé par GFI Informatique. Depuis le début de l'année dernière, ouvriers et cadres au forfait, soit la majorité des 360 salariés, présentent leur carte magnétique à l'une des six badgeuses installées à l'entrée des ateliers. « Les chefs d'îlot, qui supervisent une vingtaine de personnes, corrigent les anomalies. Ils gèrent le temps de travail de leurs équipes, entrent les congés payés, les motifs d'absence, les dépassements horaires. Les informations remontent ensuite au service de la paie », précise Christiane Aubard, responsable de la paie et de l'administration.

Ayant également compris la nécessité d'optimiser leur organisation du travail, les PME ont par ailleurs jeté leur dévolu sur des logiciels de planification. Mais, par manque de moyens et d'infrastructures, elles sont contraintes d'avancer timidement sur le plan technique. Du coup, l'utilisation qu'elles font de leurs outils reste souvent sommaire. Au mieux, elles ont remplacé le traditionnel planning griffonné sur papier par un tableau informatisé. Même dans le secteur hospitalier, réputé pionnier en la matière, les établissements sont loin de recourir aux puissants algorithmes qui permettent de réaliser de véritables « plannings optimisés ».

Convaincre l'encadrement

À Cognacq-Jay, établissement privé à but non lucratif, le directeur, Jean-Luc Fidel, avoue : « Le logiciel EquiTime nous permet de gérer plus rigoureusement les plannings. Mais nous n'en maîtrisons pas encore toutes les potentialités. » Même constat à Léopold-Bellan, un hôpital parisien qui compte environ 350 salariés. Après un paramétrage chaotique, la direction éprouve quelques difficultés à convaincre le personnel d'encadrement, peu habitué à manier l'informatique, de l'efficacité du logiciel. « Nous avons installé le progiciel il y a un an. Au début, il y a eu quelques cafouillages, car les différents services ont peiné à adopter une nouvelle codification. Aujourd'hui, des infirmières générales sont encore réfractaires. Elles “oublient” de mettre à jour les tableaux. Du coup, le système fournit des informations moins précises », regrette Jean-Luc Prud'homme, le gestionnaire.

Tout en accomplissant leurs premiers pas, les PME parviennent cependant à tirer profit de l'exploitation des progiciels de gestion du temps. Elles font état, en premier lieu, d'un gain de temps et d'une plus grande efficacité. « Avant, l'assistante de direction pouvait passer quatre heures à saisir les temps. Aujourd'hui, la tâche est expédiée en dix minutes. Sans compter que la gestion de la paie est simplifiée et les informations plus fiables », argumente Claude Scelles, chargé de la gestion du temps chez Skydôme, une PME filiale du groupe Colas. « Avec notre logiciel, nous pouvons mettre plus facilement en parallèle les besoins des services en termes de personnel, les demandes de congé des salariés et les contraintes réglementaires », estime Jean-Luc Fidel, à l'hôpital Cognacq-Jay.

Dans tous les cas, les PME en veulent pour leur argent. Les outils de gestion du temps représentent pour elles de gros investissements. Et, quitte à engager plusieurs dizaines de milliers de francs dans un progiciel – entre 15 000 et 300 000 francs pour une société d'une centaine de salariés –, elles se montrent parfois très exigeantes. Certaines d'entre elles, plus audacieuses que leurs consœurs, ne sont pas moins innovantes que les grandes entreprises dans leur recherche de rentabilisation de l'outil. Elles profitent de la mise en place de ces progiciels pour évaluer plus précisément les coûts et les compétences des salariés.

Skydôme chronomètre ainsi le temps passé à chaque étape de fabrication pour déterminer le prix de revient réel des produits. « Avant, à la fin de la journée, les salariés remplissaient une feuille pour déclarer les temps effectués à chaque poste. Mais les informations étaient données à la louche. Elles sont plus précises aujourd'hui, explique Claude Scelles. Le système peut aussi établir des grilles mensuelles ou annuelles pour vérifier quel salarié a travaillé sur tel poste. Par atelier, nous pouvons ainsi extraire des grilles de compétences, mesurer le temps passé par un ouvrier sur une tâche et voir où il est le plus efficace. » De son côté, Invacare Poirier prévoit de développer le système pour pouvoir gérer les comptes épargne temps de ses salariés ainsi que leurs missions en France et à l'étranger.

Autre problème épineux : la maintenance importante que nécessite l'utilisation d'un outil de gestion du temps. Elle incite une poignée d'éditeurs à parier sur le développement de l'ASP (application service provider) : « Plutôt que d'investir dans l'achat d'un progiciel de gestion du temps, les PME pourront accéder à une application, via une plate-forme Internet. Les entreprises loueront ce service et n'auront pas à se soucier de la maintenance, qui sera à la charge de l'hébergeur », prédit Henri Labadie, P-DG de Chronotique.

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  • S. D.