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Idées

Le sens du travail sous tous les angles

Idées | Livres | publié le : 01.04.2023 | Frédéric Brillet

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Le sens du travail sous tous les angles

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Comment redonner du sens au travail alors même que ce critère devient déterminant pour attirer et fidéliser la main d’œuvre dans beaucoup de métiers ? Dans cette perspective, les auteurs, économistes de formation, ne manquent pas de rappeler que le sens donné au travail revêt trois dimensions : l’utilité sociale (mon travail me donne le sentiment d’être utile), la cohérence éthique (je peux travailler en cohérence avec mes normes professionnelles et l’éthique commune), la capacité de développement (je peux mettre en œuvre dans mon travail mes habilités, ma créativité…). Les auteurs constatent aussi que le travail fait sens lorsqu’il permet de déployer l’intelligence individuelle et collective, la sensibilité et l’attention humaine, ce que la psychodynamique du travail appelle le « travail vivant » (par opposition au travail « mort » incorporé dans les machines et les consignes). Par exemple, l’activité des opérateurs dans les centres d’appels est organisée de telle sorte que les téléconseillers ont très peu de marges de manœuvre dans leurs interactions avec les clients (script et durée moyenne de traitement à respecter…). Pour pouvoir aider un client en difficulté, certains salariés dérogent à ces consignes, prix à payer pour pouvoir « bien travailler » de leur point de vue.

Cette analyse du sens présente l’intérêt de rafraîchir les axes de réflexion sur le travail. Longtemps, les sciences sociales se sont focalisées sur le niveau des salaires, les inégalités, et la pénibilité. Il a fallu attendre la crise environnementale et sanitaire pour que cette question devienne essentielle tant dans le débat public que dans le champ académique. L’aspiration à plus de sens résulte aussi de l’épuisement du « compromis fordiste » : durant les années 1960-1970, les salariés et leurs syndicats acceptaient un travail répétitif et étroitement contrôlé contre une augmentation régulière de leur pouvoir d’achat via des hausses de salaire. Celui-ci s’est délité sous l’effet conjugué de la stagnation du pouvoir d’achat, d’un appauvrissement des tâches, du management par le chiffre (toyotisme dévoyé), de la prise de conscience des nuisances que le travail cause à l’environnement.

Pour remédier à cette perte de sens, les auteurs passent en revue les initiatives au fil des chapitres. Les employeurs misent sur la RSE ou un management moins toxique, se transforment pour devenir des entreprises libérées. Les salariés, quant à eux démissionnent, changent de métier, militent. Ceux des Gafam se rebiffent contre leurs employeurs quand ceux-ci font trop l’impasse sur les considérations éthiques.

« Redonner du sens au travail »,

Thomas Coutrot et Coralie Éd. Perez (13,50 euros, Seuil)

Auteur

  • Frédéric Brillet