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Le Ciffop remporte la palme

Dossier | publié le : 01.09.2001 | S.P.

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LES 10 FORMATIONS LES PLUS SÉLECTIVES

Crédit photo S.P.

La prudence est de mise chez les responsables de 3e cycle en ressources humaines. Car si les entreprises continuent de s'arracher leurs étudiants, l'avenir est plus incertain. Les meilleures formations cherchent donc à se distinguer parmi la centaine de cursus RH existants, en mettant sur pied un système d'accréditation.

Dans la catégorie des 3es cycles en ressources humaines, le gagnant est… le Ciffop ! Au risque de décontenancer responsables d'université et de grande école, Liaisons sociales et le Cesi publient pour la première fois un hit-parade des formations RH. Le numéro de la rentrée précédente, en septembre 2000, ne comportait en effet que des classements partiels établis en fonction de trois critères : sélectivité, professionnalisation et ouverture à l'international (voir pages 91, 92, 94). L'expérience ainsi accumulée nous permet, cette année, d'établir le top 10 des 3es cycles dédiés aux ressources humaines. Pourquoi ces dix-là ? Tout d'abord parce que ces formations accueillent la crème des étudiants. « Je recrute des hauts potentiels pour l'entreprise de demain. Je ne retiens donc que des candidats excellents », affirme Frank Bournois, responsable du DESS de gestion des ressources humaines et relations du travail de Paris II (Ciffop), qui arrive en tête de notre classement. Une pratique avouée plus ou moins ouvertement par les neuf autres responsables de 3e cycle. Une école comme l'ENS Cachan n'accepte même que des bac + 5 (diplômes d'école d'ingénieurs, de commerce ou de gestion, DESS ou DEA). Le processus de recrutement débute généralement par un examen rigoureux des cursus initiaux. Nombre de responsables de formation, à l'instar de François Stankiewicz, responsable du DESS de management des ressources humaines de Lille I (classé 6e), affirment « accorder beaucoup d'importance à la mention décrochée par le candidat ».

Mais l'excellence académique ne suffit pas. La connaissance des rouages de l'entreprise joue également un rôle prépondérant pour accéder à certains 3es cycles, notamment ceux qui émanent des IAE (instituts d'administration des entreprises), comme le DESS de gestion des RH de Bordeaux IV (classé 4e) ou le DESS de management des RH d'Aix-Marseille III (3e). Ces deux derniers n'admettent dans leurs rangs que des étudiants issus de formations commerciales ou en gestion. Les huit autres formations sont plus éclectiques dans les profils retenus (juristes, psychologues, sociologues, etc.). « Cette diversité constitue un apprentissage de la vie en entreprise », estime Christine Valfrey, chargée du 3e cycle de responsable en management et développement des RH de l'IGS Paris (10e du classement). Les responsables n'en demandent pas moins aux étudiants d'avoir acquis une expérience du monde de l'entreprise à l'occasion d'un ou de plusieurs stages, notamment dans les RH.

La motivation jugée sous toutes les coutures

Pour juger de la motivation des candidats, tous les moyens sont bons. « Les candidats doivent nous présenter un mémoire dans lequel ils ont réfléchi à un problème de ressources humaines ; par exemple, savoir si la GRH crée de la valeur ou non », explique Frédéric Wacheux, responsable du DESS de gestion des ressources humaines de Paris IX. Jacques Dutertre, responsable du DESS de gestion des ressources humaines de l'université de Bourgogne, demande aux postulants de rencontrer au moins quatre professionnels des ressources humaines (DRH, consultants, etc.). « Cela permet de tester leur opiniâtreté ainsi que leur sens du contact. Sans compter que ces rencontres leur offrent la possibilité de se faire une idée plus précise de la fonction RH en entreprise. »

Plusieurs entretiens viennent, au final, compléter ce véritable parcours du combattant… Dans les dix formations lauréates, ils se déroulent devant un parterre de professionnels (DRH et responsables RH) et d'experts (consultants, universitaires). « C'est indispensable pour valider ce processus de sélection, ajoute Alain Gintrac, responsable du DESS de gestion des ressources humaines de l'Irgae (Institut régional de gestion et d'administration des entreprises), qui compte en faire un critère d'accréditation des formations. Ils vérifient que nous ne nous sommes pas trompés sur les compétences et les motivations des candidats.» Premier de la classe, le Ciffop se distingue encore une fois en soumettant ses candidats à une mise en situation. « Cet exercice permet de tester la capacité à réagir des candidats », explique Frank Bournois. Mieux, quatre des dix formations figurant dans le palmarès réalisent au moins l'un de leurs entretiens en anglais. « Cet oral est complété par un test écrit, ajoute Yves Girouard, responsable du mastère spécialisé en gestion des ressources humaines et de la mobilité internationale de l'ENS Cachan. Tous les étudiants devraient aujourd'hui écrire et parler couramment anglais. La plupart vont être recrutés dans de grandes entreprises travaillant à l'international quand il ne s'agit pas de groupes étrangers. » Une pratique qui tend à se généraliser dans les autres formations.

Place aux intervenants professionnels

Mais la qualité d'une formation ne se limite pas, bien entendu, à sa sélectivité. Le contenu pédagogique joue un rôle déterminant. « Un cursus en GRH digne de ce nom doit permettre aux étudiants de maîtriser toutes les techniques de la fonction (recrutement, formation, etc.) afin qu'ils soient rapidement opérationnels, observe Alain Gintrac. En même temps, il doit leur permettre d'acquérir une vision globale des enjeux stratégiques de l'entreprise. » Premier élément rendant possible cette alchimie : la proportion d'intervenants issus du monde professionnel (DRH, consultants, experts…). Selon les responsablesde formation, ils doivent représenter au minimum un tiers de l'équipe pédagogique. De fait, huit des formations sélectionnées dans notre palmarès général sur dix vont au-delà… Les professionnels constituent entre 40 et 65 % de l'équipe et leurs interventions se font sous des formes variées : cours, séminaires, conférences, ateliers, etc.

Au sein du DESS d'ingénierie des RH de Paris V, « ils réalisent pour les étudiants une veille sur les RH, sur des thèmes comme la réforme de la formation professionnelle ou la fidélisation des salariés ». Fort de sa notoriété, le Ciffop demande même à des DRH de grandes entreprises (Jean-François Pilliard de Schneider Electric, Max Matta de Rhodia France…) d'être les tuteurs d'un groupe de cinq étudiants. « Au cours de rencontres mensuelles, ils abordent un point précis des RH, comme les conséquences des fusions sur les hommes », explique Frank Bournois. L'IGS et l'ENS Cachan vont encore plus loin : les deux écoles font intervenir respectivement 100 % et 80 % de professionnels. « Leurs diplômés ont une vision de l'entreprise très pratico-pratique, reconnaît Olivier Ghienne, directeur adjoint des RH chez Elyo Ile-de-France et ancien du 3e cycle de l'IGS. Ils ont le mérite de s'intégrer très vite et d'être capables, par exemple, d'organiser dès leur arrivée une élection de délégués du personnel. »

Rien de tel, pour conduire les étudiants à acquérir une vision réelle d'un service RH, que de les confronter aux problèmes de l'entreprise. Sept des dix meilleures formations RH ont mis en place des missions d'audit et de conseil réalisées grandeur nature par un groupe de quatre ou cinq étudiants pour le compte d'entreprises ou d'organismes divers. « Nos étudiants ont, par exemple, élaboré un référentiel des compétences du personnel technique de l'Opéra de Paris, explique Christine Valfrey, de l'IGS Paris. Ces missions sont proposées par l'école. Grâce à elles, les étudiants mettent en pratique ce qu'ils ont appris lors de la formation. » Certaines de ces missions débouchent sur un stage, autre indicateur, et non des moindres, de la professionnalisation d'une formation. « Il doit être impérativement supérieur aux trois mois réglementaires pour un DESS », considère Alain Gintrac, de l'Irgae. Dans les dix cursus sélectionnés, il oscille entre quatre et six mois ; certains, comme l'ENS Cachan, préconisant même de faire alterner semaines de formation et semaines en entreprise. Mais, dans le domaine de l'alternance, la palme revient encore une fois au Ciffop, première formation à avoir instauré l'apprentissage pour tous ses étudiants. « Je souhaite qu'ils s'intéressent au quotidien à la vie de l'entreprise », souligne Frank Bournois. Les responsables des dix formations retenues se montrent très attentifs au contenu des missions confiées aux stagiaires. « Il doit être en adéquation avec la formation, c'est-à-dire porter sur les ressources humaines », dit Alain Gintrac. Au menu : recrutement, bilan de formation, appui à la rédaction d'un accord-cadre 35 heures, mise en place d'un intranet, élaboration de grilles d'évaluation…

Preuve que les formations de notre palmarès excellent dans la sélection de leurs étudiants, dans le contenu et la professionnalisation de leur enseignement : leurs étudiants trouvent un emploi en moins de trois mois, et pour plus de la moitié d'entre eux en CDI. Quant aux rémunérations proposées, elles se situent dans une fourchette allant de 27 500 à 32 000 euros (180 à 210 kF) pour les formations « parisiennes » et de 18 000 à 30 500 euros (120 à 200 kF) pour les « provinciales ». Une réussite à mettre sur le compte d'une forte implication des responsables de formation qui vont à la pêche aux offres d'emploi et à l'existence d'un réseau d'anciens étudiants. « Le bouche-à-oreille fonctionne très bien, constate Olivier Ghienne, d'Elyo Ile-de-France. Quand ils prennent l'annuaire des anciens, les étudiants de l'IGS Paris s'aperçoivent qu'Elyo a déjà recruté beaucoup de leurs prédécesseurs. C'est donc tout naturellement qu'ils postulent chez nous. Sans compter que l'école m'a demandé de venir animer des cours. Cela fait de la publicité pour l'entreprise. »

Seule fausse note pour ces 3es cycles figurant dans notre palmarès : leur ouverture internationale encore insuffisante. Trois cursus seulement, ceux de l'ENS Cachan, du Ciffop et d'Aix-Marseille III figurent dans le classement des formations les plus internationales (voir page 94). La première dispense des cours et des conférences en anglais. « Les étudiants doivent suivre quatre séminaires d'une semaine à l'étranger (à Rio, Prague, Singapour et New York) afin de rencontrer des managers, des DRH et des expatriés, annonce Yves Girouard, responsable de la formation. Nous faisons également intervenir dans nos cours des spécialistes en gestion de la mobilité internationale, comme le responsable expatriation de TotalFinaElf, le DRH international d'Alcatel CIT, etc. »

Le Ciffop, qui dispense déjà vingt heures d'anglais économique appliqué à la GRH, prévoit de réaliser 30 % de ses cours en anglais l'année prochaine et 50 % dans deux ans. Sans compter les cours liés aux RH internationales ou les conférences d'experts et de professeurs étrangers. Les responsables des sept autres formations reconnaissent leur faiblesse dans ce domaine et tentent d'y remédier. C'est le cas de Frédéric Wacheux, responsable du DESS de GRH de Paris IX, en poste depuis un an. « Un stage dans un service RH à l'étranger va, à terme, devenir un critère de sélection pour accéder à notre DESS. J'incite également tous nos enseignants à européaniser leurs cours. Par exemple, les juristes doivent aborder le droit européen. Je favorise également les stages à l'étranger en cours de cursus. Enfin, nous allons développer des accords avec des structures qui organisent des formations équivalentes en Europe afin de faciliter les échanges et les projets communs. » Une nécessité pour rester dans le peloton de tête.

Car les positions acquises ne sont pas définitives. La plupart des responsables des dix formations arrivées cette année en tête de notre palmarès en sont parfaitement conscients. Ils se battent pour que leurs cursus soient reconnus des candidats et se distinguent de la centaine de 3es cycles spécialisés en ressources humaines. Tous sont convaincus de vivre les derniers mois d'euphorie dans les recrutements de professionnels RH. « Les grands chantiers comme la RTT sont quasiment terminés et nous sommes dans l'expectative quant au développement économique, constate François Gueuze, responsable de l'Association des diplômés du DESS de management des ressources humaines de Lille I. Pour l'instant, le nombre d'offres d'emploi reçues par notre association n'a pas diminué : nous avons récolté 1500 offres en 2000, soit un peu plus que l'année précédente. Mais tout laisse à penser que cela ne va pas durer. »

Vers un système d'accréditation

Dans ces conditions, toutes les formations en ressources humaines ont-elles de l'avenir ? C'est la question qui agite, depuis quelques mois, les responsables de 3es cycles spécialisés en GRH. Sous l'impulsion de l'Irgae de l'université de Bordeaux IV, une quinzaine de responsables de DESS (dont le Ciffop de Paris II et l'IRH de Paris V) ont pris le taureau par les cornes en constituant un réseau, il y a un peu plus d'un an. « Actuellement, il existe en RH environ 90 formations universitaires (sans compter la demi-douzaine de 3es cycles de grandes écoles, NDLR) qui se veulent de haut niveau, explique Alain Gintrac, responsable du DESS de l'Irgae de Bordeaux IV. Certaines sont excellentes, d'autres moyennes, et quelques-unes franchement inacceptables. L'idée de ce réseau est de mettre un peu d'ordre au sein de tous ces cursus. »

Pour éviter tout jugement arbitraire, une instance de certification indépendante composée de professionnels et d'experts devrait être constituée dans les prochains mois. Sa mission : accréditer certains DESS, pour une durée de quatre ans. Objectif : rendre l'offre plus lisible pour les entreprises. Une idée qui séduit ces dernières. « Nos besoins sont de plus en plus complexes, constate Frédéric Thoral, DRH de la branche réseaux et systèmes de Cegetel. Nous cherchons des personnes compétentes en matière de techniques RH, en droit social, en systèmes d'information et possédant une excellente connaissance économique de l'entreprise. Enfin, nous demandons de plus en plus à ces professionnels d'être ouverts à l'international : parler anglais et connaître les ressources humaines à l'étranger. »

Pour l'heure, rien ne permet aux recruteurs de savoir si les candidats qu'ils ont en face d'eux possèdent toutes ces qualités. « Certes, si on effectue une recherche croisée avec tous ces critères parmi les candidatures reçues, ce sont toujours les mêmes formations qui ressortent, comme le DESS du Ciffop Paris II, ajoute Marie-Hélène Dubaux, directrice du recrutement du groupe Pechiney. Mais quand un candidat postule, il est vrai que l'on identifie mal sa formation. » Le système d'accréditation ne doit voir le jour qu'en 2003. Mais il y a fort à parier que les dix formations qui figurent dans notre hit-parade seront bien représentées : les critères d'ores et déjà retenus pour attribuer ce label sont les mêmes qui ont servi à établir notre classement…

Auteur

  • S.P.