Comme on le sait, le « lean » management organise l’entreprise de manière à ce qu’elle maximise la satisfaction du client en misant sur une gestion de la qualité fondée sur une multitude de petites améliorations quotidiennes. Pour y parvenir, le lean doit encourager la motivation et l’implication des salariés à tous les niveaux de la hiérarchie, ce qui implique de développer leur autonomie en améliorant leurs compétences et en élargissant leur périmètre de responsabilité. Dans cette optique, le lean insiste sur la nécessité de donner plus de sens au travail en actionnant plusieurs leviers : il s’agit de favoriser l’ergonomie, une bonne ambiance, de réduire le stress ou la surcharge, de proposer une division moins poussée des tâches, d’encourager la formation et le développement de chaque collaborateur. Pour qu’elle soit réussie, la conversion de l’entreprise au lean management doit s’appuyer sur des améliorations opérationnelles très visibles et qui parlent aux collaborateurs.

Sur tous ces points, le lean s’oppose au modèle taylorien où l’encadrement définit la manière de faire et où les employés exécutent des tâches élémentaires fragmentées et répétitives. Déshumanisant, le taylorisme tend les relations sociales, crée des organisations rigides, cloisonnées avec des collaborateurs peu polyvalents qui ont perdu le sens de leur travail et du collectif. Avec pour conséquence une perte de motivation qu’il faut compenser par un surcroît de contrôle, ce qui renchérit les coûts.

Apparu durant l’après-guerre au Japon chez Toyota, le lean management qui mise sur l’humain prétend donc s’ériger en contre-modèle de l’entreprise taylorienne. Pour mieux s’en démarquer, le constructeur automobile japonais affirmait dans son slogan interne qu’il fallait « faire des gens avant de faire des voitures » apprend-on dans cet ouvrage très complet rédigé par deux consultants chevronnés qui proposent d’étendre ce système aux services. Reste que l’extension du lean se heurte parfois à la méfiance des salariés et syndicats. Quand la priorité devrait être de rendre le travail plus ergonomique et motivant, des entreprises se focalisent exclusivement sur des gains de productivité et s’appuient sur le lean pour procéder à des restructurations.

Olivier René et Bertrand De Graeve (Alisio, 25 euros)