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Le PGE est mort, place aux nouvelles aides

À la une | publié le : 01.10.2022 | Maxime François

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Le PGE est mort, place aux nouvelles aides

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PGE, simplification du « dispositif d’aides aux entreprises impactées par l’augmentation des prix de l’énergie »… face à l’augmentation des notes de gaz et d’électricité, le « quoi qu’il en coûte » n’est pas totalement terminé. Et l’hôtellerie-restauration est l’un des premiers secteurs concernés.

Le « quoi qu’il en coûte » est-il vraiment terminé dans le secteur de la restauration ? Face à la montée des prix de l’énergie et aux nombreuses questions auxquelles sont confrontées les entreprises pour le maintien de leur activité, les robinets de Bercy continuent à couler. Bien sûr, avec un débit plus lent. « La fin de l’abondance » a été prophétisée cet été par le chef de l’État Emmanuel Macron, mais alors que le spectre de l’épidémie s’éloigne – avec la fin du « quoi qu’il en coûte », le Gouvernement prend le soin de publier en ligne un guide qui présente les différentes aides aménagées, et celles qui n’ont pas disparu. Dans un contexte d’inflation et d’envol du prix du gaz, de l’électricité, la publication reprend les principales problématiques qui relèvent de la consommation d’énergie par les professionnels et détaille notamment le nouveau prêt garanti par l’État (PGE) résilience, une nouvelle mouture du PGE « classique » de la crise Covid, cumulable avec le premier – et qui représente donc une nouvelle marge de manœuvre pour les PME et TPE.

Sur le PGE initial de la crise Covid, Bercy a été ferme : il n’y aura pas de nouvel aménagement du délai de remboursement, fixé à cinq ans maximum. Le ministère de l’Économie et des Finances, qui souhaite récupérer rapidement les 145 milliards d’euros avancés à 700 000 entreprises – dont environ 50 % du secteur de la restauration – durant la pandémie, l’a dit avant l’été aux organisations patronales : il n’y aura pas de délai de dix ans pour le remboursement. Sollicitée le mardi 20 septembre par la profession à l’occasion du Salon professionnel IFTM, le grand rendez-vous du tourisme organisé porte de Versailles, à Paris, la ministre en charge des PME, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, Olivia Grégoire a définitivement fermé cette porte face à ses interlocuteurs, dont de nombreux professionnels de l’hôtellerie, des cafés et des restaurants (HCR). Elle en avait cependant ouvert une autre la veille, le lundi 19 septembre, au micro de RMC : les patrons pourront compter sur la « simplification » du « dispositif d’aides aux entreprises impactées par l’augmentation des prix de l’énergie ». Face aux critiques, et après un rendez-vous, vendredi 16 septembre avec le Medef, l’U2P et les syndicats de l’industrie et de la chimie, le Gouvernement a revu sa copie. « Vous avez beaucoup d’aides pour ceux qui sont dans les TPE et PME. Tout ça est sur le site de Bercy », a déclaré la ministre. Le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a décrit une « usine à gaz ». Tour d’horizon de ce qui change.

« Responsabilité collective » et « prix plafonnés » face aux coûts de l’énergie

Le contexte est plus que tendu pour les restaurateurs, gros consommateurs de gaz et d’électricité. Le coût moyen, sur le marché de gros du mégawattheure passe à 1 000 euros en 2023, contre 85 euros un an plus tôt. En cause : le tarissement des acheminements de gaz russe qui alimente de nombreuses centrales européennes combiné à l’arrêt de nombreux réacteurs nucléaires en France à cause du vieillissement des structures.

Selon le Gouvernement, qui souhaite rassurer, les prix continueront d’être plafonnés à 4 % jusqu’à la fin de l’année. Mais après ? La flambée des prix de l’énergie changera-t-elle la donne pour les professionnels ? L’heure est à la « responsabilité collective » a fait savoir la Première ministre Élisabeth Borne dans son discours devant le Medef, le 29 août lors de la rencontre des entrepreneurs de France (REF). Une invitation à prendre ses responsabilités sur les questions énergétiques, avec deux objectifs : limiter les dépenses et faire un geste écologique.

En un mois il y a eu du neuf. Aux côtés d’Élisabeth Borne lors de ses annonces, mercredi 14 septembre, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, qui se laisse jusqu’à la fin de l’année 2022 pour négocier avec l’Union européenne la révision du mécanisme de subventions aux entreprises les plus utilisatrices d’énergie, a confirmé la poursuite des aides en 2023 pour les sociétés pénalisées par la flambée des prix de l’énergie.

Concrètement, les plus petites, dont le chiffre d’affaires est inférieur à 2 millions d’euros et qui emploient dix salariés ou plus (elles sont 1,5 million) « continueront à bénéficier de l’accès aux tarifs réglementés », a-t-il confirmé. Les sociétés les plus consommatrices d’énergie peuvent prétendre à des aides selon certains critères – des factures représentant au moins 3 % de leur chiffre d’affaires, une note de gaz et d’électricité alourdie par rapport à 2021, des bénéfices ayant baissé au cours du mois précédent.

Olivia Grégoire l’a également annoncé, sans détailler la mesure : « Le Gouvernement est pragmatique, lucide et travaille sur un délai de paiement pour que les patrons ne soient pas essoufflés. » Elle a également précisé que ses services planchaient sur « la problématique des ruptures de contrats », détaillant : « Si vous vous rendez compte que votre fournisseur veut vous arnaquer en multipliant les prix par 10, la médiation de l’État est là, et les services de la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes aussi (DGCCRF) », qu’elle dirige, aussi.

Il y a urgence : en province, où les touristes sont moins nombreux qu’à Paris, le sujet du coût de l’énergie est ressenti intensément, selon France 3. À tel point que l’Union des métiers des industries de l’hôtellerie (Umih) du Loiret s’inquiète de la viabilité de ses établissements et d’une potentielle nécessité de fermeture certains jours de la semaine par souci d’économies sur la facture d’énergie.

En Île-de-France, le sujet préoccupe tout autant. Yvan Biçak, gérant du Bistrot 41, dans le quartier de bureaux de Val de Seine à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) décrit un cocktail explosif : « Jusqu’ici, tout allait bien pour rembourser, puis il y a eu la flambée des prix », retrace-t-il. Concrètement, le mois dernier, sa facture de gaz est passée de « 300 à 500 euros ». Celle de l’électricité s’est envolée de « 600 à 900 euros ». Comme lui, d’autres professionnels assurent être au « pied du mur ». La mort de certaines de ces affaires étaient cependant « programmées avant crise » modère l’économiste et directeur du think tank Le Cercle de l’épargne, Philippe Crevel. Il le souligne par ailleurs : « Ceux qui ne s’en sortent pas ou qui n’arrivent pas à rembourser leur dette sont ceux qui étaient déjà en difficulté et qui ont gagné deux ans de sursis grâce aux aides. » Un mouvement documenté dans un secteur ou le turnover était déjà conséquent hors période de crise.

PGE pour prêt garanti par l’état

Aujourd’hui, ces trois lettres qui faisaient écho à la crise de la Covid sont devenues synonymes de remboursement dans les temps. Le PGE instauré pour les entreprises impactées par l’épidémie a pris fin le 30 juin 2022. D’ailleurs, à « quelques exceptions près », les entreprises ont commencé « comme prévu à rembourser », souligne le ministère de l’Économie où est piloté le comité de sortie de crise, créé mi-2021. La Banque de France l’assure aussi : le taux de défaut pourrait atteindre à peine 3 %.

Pour rassurer et fermer la porte à une renégociation du délai de remboursement du PGE « classique », Olivia Grégoire met en avant les « conseillers spéciaux de sortie de crise », présents dans chaque département, le « message de souplesse » adressé par Bercy aux banques, « le faible taux de défaillance des entreprises, mais surtout « la très bonne saison de l’été ». L’économiste Philippe Crevel abonde : « C’est normal que la dette soit remboursée dans les temps par les entreprises. Les restaurateurs ont retrouvé un niveau d’activité identique à celui de 2019. La saison a été effectivement très bonne, avec un retour massif des touristes, notamment anglais et américains. » Les clients peuvent d’ailleurs aussi constater que l’inflation est déjà largement répercutée sur la note. Au comptoir, le café est ainsi passé d’1,10 euro à 1,20 euro, voire 1,30 euro.

Qu’en est-il des demandes d’étalement du remboursement du PGE sur dix ans, un souhait du patronat ? « S’ils demandent cela, c’est qu’ils savent qu’ils n’ont pas pu réaliser le chiffre d’affaires espéré à cause d’une pénurie de main-d’œuvre ! » souligne l’économiste. À ce sujet, la direction générale du Trésor a enquêté. « Un grand nombre des entreprises qui ont fait appel au PGE l’a fait par précaution et n’a consommé qu’une faible proportion de leur crédit, analyse-t-elle. S’ils ont vu leur endettement augmenter, ils ont également connu une forte augmentation de leur trésorerie, gardant ainsi un endettement net assez stable et général. »

Des taux à négocier… avec les banques

Aujourd’hui, les restaurateurs interrogés depuis la rentrée assurent ne pas avoir de revenus pour rembourser toutes leurs dettes, et le sujet du remboursement du PGE lié à la Covid dans un contexte d’inflation est toujours aussi sensible. « On a bien commencé à rembourser le PGE de 120 000 euros accordé il y a deux ans », détaille notre restaurateur isséen. Mais l’effort devient de plus en plus difficile : « Je vous parle de 5 100 euros par mois durant 24 mois », poursuit-il. Sous couvert d’anonymat, d’autres patrons parlent « des loyers de retard contractés durant la pandémie », une note qui « pèse sur la capacité de remboursement ». Parmi les autres problématiques évoquées : les taux appliqués au remboursement, inégaux selon les banques. « L’État applique un prêt à taux zéro, les banques non […] il aurait mieux valu rembourser les intérêts plus tôt », regrette un restaurateur basé à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), patron d’une dizaine d’employés. Il a déjà prévu d’aborder « rapidement » la question avec son conseiller bancaire et de renégocier « au centime près » ce qu’il lui doit. La petite musique va crescendo. Beaucoup d’entreprises, pénalisées par la flambée du coût des matières premières et de l’énergie qu’elles ne peuvent pas systématiquement répercuter sur leurs clients, tirent la langue et auront, à les croire, plus de mal que prévu à rembourser leur PGE.

PGE résilience, un moyen de financement supplémentaire

Les entreprises « dont l’activité est fortement impactée par les conséquences de la guerre en Ukraine », peuvent bénéficier de ce nouveau prêt garanti par l’État, comme prévu par la loi de finances rectificative pour 2022, d’après le site du ministère. Une nouvelle porte ouverte du « quoi qu’il en coûte » ? Cette nouvelle mouture est effective jusqu’au 31 décembre 2022. Elle permet de demander un financement supplémentaire. Son montant est plafonné à 15 % du chiffre d’affaires annuel moyen réalisé sur les trois derniers exercices comptables clôturés. « Le PGE résilience est entièrement cumulable avec les PGE obtenus et dont le plafond représente 25 % du chiffre d’affaires, les entreprises détentrices d’un PGE pourront donc emprunter au total jusqu’à 40 % de leur chiffre d’affaires », explique le Gouvernement sur son site. Le PGE résilience est donc accessible à « tous les secteurs d’activité, et ce, quelles que soient la taille et la forme juridique de l’entreprise ». À condition de remplir certains critères : « Être fortement impacté par les conséquences de la guerre en Ukraine. Avoir une capacité de remboursement compatible avec des financements supplémentaires. Justifier que la trésorerie doit être sollicitée pour répondre aux effets de la crise. » Sa durée : six ans, c’est-à-dire un peu plus que celle du PGE instauré durant la crise en mars 2020. La période minimale de franchise de remboursement est de douze mois, comme l’ancienne version du DPE.

Auteur

  • Maxime François