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Le bloc-notes

Climats français

Le bloc-notes | publié le : 01.06.2001 | Raymond Soubie

Plans sociaux : une affaire bien française

Curieuse affaire que l'irruption brutale des plans sociaux dans le paysage politique et médiatique du printemps. Car enfin, le pic enregistré en quelques semaines n'est pas réellement significatif, étant dû pour l'essentiel au désir des entreprises concernées de reporter les annonces après les municipales. Les plans sociaux sont mis en accusation alors qu'ils sont conçus pour protéger les salariés. Rappelons que 85 % des licenciés économiques n'en bénéficient pas. De plus, tout le monde semble avoir oublié que plus d'un million d'emplois disparaissent en France chaque année, ce qui n'empêche pas notre économie de compenser – et bien au-delà – ces suppressions par des créations avec un solde positif de plus de 500 000 emplois en 2000. Cela relativise l'impact réel de Marks & Spencer, Danone (au comportement traditionnellement exemplaire) et quelques autres opérations.

Étrange a été aussi la réaction du gouvernement. Toutes ces données, il les connaissait, mais il n'en a fait que peu état, de peur de contrarier l'émotion de l'opinion ainsi que ses alliés Verts et PC de la majorité plurielle. Il a donc fait le choix du grand écart : une forte « gesticulation » médiatique accompagnée de mesures, sous la forme d'amendements déposés au Sénat, présentées officieusement comme modestes. Il a ainsi pris le risque d'accréditer dans l'opinion l'idée d'une dégradation brutale de l'emploi, ce qui ne correspondait pas à la réalité, et d'affecter le moral des ménages, jusqu'ici principal moteur de la croissance.

Mais au fait, ces amendements gouvernementaux d'avril, que vont-ils vraiment changer ? D'abord, ils traduisent une rapidité, pour ne pas dire une improvisation, dans leur préparation qui laisse perplexe, alors qu'il s'agit d'un sujet si sensible. Ensuite, deux points méritent attention. La réindustrialisation des zones touchées sera incluse dans le plan social et discutée avec les syndicats de l'entreprise, au risque de moins s'intéresser à l'avenir économique du bassin d'emploi. Par ailleurs, faire deux phases distinctes de la consultation sur les motifs économiques de l'opération, puis de celle sur le plan social risque de susciter de nouvelles tensions. Pendant plusieurs semaines, les salariés se verront menacés et ne connaîtront pas les mesures de reclassement en leur faveur. Ce ne sera pas un facteur d'apaisement. Décidément, étrange France !

Retraites : la réforme, enfin, mais en Allemagne

Le 11 mai, le chancelier Schröder aura réussi à faire adopter définitivement sa réforme des retraites : mesures de rééquilibrage des régimes de répartition par hausse des cotisations et baisse des prestations, encadrées dans le temps ; incitations, grâce à un bonus, à développer la capitalisation. Le pur bon sens, compte tenu des perspectives démographiques en Allemagne, mais qui fait ressortir par contraste notre refus de reconnaître et de traiter les mêmes évidences.

Les politiques de tout bord ont deux craintes. La première est le caractère sulfureux qui s'attacherait aux fonds de pension. La seconde, beaucoup plus forte, est d'avoir à réformer en priorité les régimes publics, qui en effet devraient l'être, ce qui est considéré comme de la dynamite sociale. Une suggestion : si les politiques n'ont pas le courage d'affronter clairement le problème, qu'ils étendent au moins aux salariés du secteur privé les avantages fiscaux de la Préfon, régime de capitalisation réservé aux fonctionnaires.

La SNCF, toujours

Le dernier conflit à la SNCF quia fort gêné les usagers, et le fret, pendant plus de deux semaines est d'abord un grand classique. S'il a duré aussi longtemps, c'est en raison de la détermination d'un noyau dur d'agents de conduite adhérant à la Fgaac et à SUD Rail. De tels types d'actions, purement corporatistes et sans souci d'incommoder les clients, même à la veille de fêtes, se sont déjà produits. On sait aussi que la SNCF bat les records toutes catégories des conflits en France.

Mais le dernier conflit aura aussi permis d'appréhender les conséquences du changement de paysage syndical. La CGT, interlocutrice privilégiée de la direction, a signé des accords, notamment sur les 35 heures, et en a subi les conséquences aux élections professionnelles. SUD Rail, plutôt tenu à l'écart du dialogue social traditionnel dans l'entreprise, a réussi sa percée. Si ce phénomène s'accentue, les projets de réforme en douceur de l'entreprise auront bien du mal à passer.

Auteur

  • Raymond Soubie