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Édito

La politique des gros yeux

Édito | publié le : 01.01.2022 | Benjamin d’Alguerre

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La politique des gros yeux

Crédit photo Benjamin d’Alguerre

Certains y voient du keynésianisme. D’autres du retour sur investissement. Et d’autres, encore, un interventionnisme dans la vie des entreprises. Le fait est que l’injonction à augmenter les salaires, faite aux entreprises depuis que Bercy a, en août dernier, identifié les premiers signaux d’un retour de la croissance, se fait de plus en plus impérieuse. S’il s’agissait, au départ, d’inciter les branches professionnelles rencontrant des pénuries de main-d’œuvre, à améliorer les conditions de rémunération et de travail de leurs métiers afin d’y attirer les candidats, les exhortations ont depuis, pris l’allure d’injonctions plus ou moins autoritaires. Pour un peu, on pourrait se croire revenu trente ans en arrière, lorsque François Mitterrand, après avoir débloqué 80 milliards de francs d’aides aux entreprises, rassemblait les membres du CNPF pour leur demander où étaient les emplois promis ? Sans pousser trop loin la comparaison, difficile de ne pas repenser à cette séquence lorsqu’en novembre dernier, invitée à clôturer le congrès annuel du Groupement national des indépendants de l’hôtellerie et de la restauration, Élisabeth Borne avait exprimé quelques signes d’impatience quant à l’avancée trop lente à son goût des négociations de la branche en matière de revalorisation de la qualité des emplois et des salaires.

Sur le principe, la requête du Gouvernement n’a rien d’illégitime. Durant la pandémie, l’État a ouvert en grand les robinets de la subvention publique pour aider les entreprises à passer le cap sans passer par la case faillite. Aujourd’hui, l’exécutif attend le retour de bons procédés de la part des quelque quarante filières où les minima étaient encore inférieurs au Smic. Et distribue les bons et mauvais points. Parmi les bonnes élèves, figurent ces dix branches chez qui les négociations, menées au pas de charge, ont débouché sur des résultats significatifs à l’image de l’hôtellerie-restauration où la grille des salaires pourra bondir jusqu’à des + 16,3 %. Au milieu on retrouve la grande masse des « peut mieux faire » où les discussions entre partenaires sociaux n’ont pas forcément encore abouti mais seraient sur le point de l’être avec des résultats attendus qui promettent d’être intéressants. Enfin, il y a le peloton de queue… grands magasins, coiffure et négoce du bois où les négo patinent lorsqu’elles n’ont pas carrément été mises en stand-by. On touche ici à la limite de l’exercice car s’il peut agiter le bâton – en menaçant la coiffure de ne pas lui accorder la baisse de TVA que la branche réclame de longue date – le Gouvernement ne dispose d’aucun levier concret de contrition. Les syndicats de salariés qui menacent de manifester pour la hausse du pouvoir d’achat le 27 janvier sans doute guère davantage…

Auteur

  • Benjamin d’Alguerre