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Édito

Le bal des casse-pieds du CPF

Édito | publié le : 01.12.2021 | Benjamin d’Alguerre

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Le bal des casse-pieds du CPF

Crédit photo Benjamin d’Alguerre

S’il prenait un jour l’idée à un sociologue du futur d’élaborer une classification des différentes catégories d’emmerdeurs actifs en France dans une séquence allant de la fin du XXe au début du XXIe siècle, nul doute que le démarcheur CPF y trouverait une bonne place, quelque part entre le témoin de Jéhovah et le téléprospecteur pour abonnements mobile. Qui, au cours des, disons, six derniers mois peut se vanter d’avoir échappé à leur harcèlement par téléphone ou texto ? « Votre solde DIF va expirer ! Consultez votre compte et réclamez votre formation avant expiration de vos droits. CLIQUEZ ICI (suit un lien vers une plateforme de vente de formations en ligne) ». « URGENT ! Votre solde pour la formation arrive à échéance. Consultez votre solde et réclamez votre formation 100 % financée par l’État sur (nom d’un site cancer tentant de se faire passer pour celui de la Caisse des dépôts et consignations) ». Avec toujours la même stratégie de vente : prétendre parler au nom d’un organisme officiel (ministère du Travail, Caisse des dépôts, ministère des Finances, Pôle emploi, Gendarmerie nationale, liste non exhaustive), jouer sur le sentiment d’urgence et guider le prospect hameçonné vers un site de vente en ligne. D’ailleurs, nulle mention n’est jamais faite d’une quelconque qualité, voire utilité, de la formation recommandée. Vous avez de l’argent gratuit, dépêchez-vous d’acheter ! Acheter quoi ? Et pour quoi faire ? Quelle importance puisque c’est gratuit !

Combien de personnes ont déjà été victimes de ce harcèlement intempestif ? Difficile de calculer. Des dizaines de milliers, sans doute. D’autant que les sociétés mandatrices des call-centers se revendent volontiers les fichiers entre elles. Mais si le problème ne restait confiné qu’au racolage, il ne serait que mineur. Rien qu’un raccrochage sec au nez de l’importun ne puisse régler. La vraie nuisance provient des vraies arnaques au CPF. Le coup fourré ? Un appel d’un quelconque organisme pseudo-officiel informant le titulaire d’un compte que ce dernier a été piraté et qu’il est urgent de le reconfigurer… en fournissant à l’escroc identifiants et numéro de Sécurité sociale. Si le prospect tombe dans le panneau, c’est open bar pour le fraudeur qui peut désormais vider le CPF du pigeon en achetant des formations fantômes tirées du catalogue d’un organisme complice. Selon les chiffres de la Caisse des dépôts, environ 12 millions d’euros (sur le milliard consacré à l’alimentation des comptes des particuliers) seraient déjà partis en fumée de cette façon. De quoi franchement agacer l’exécutif qui, après avoir demandé à la CDC de renforcer ses contrôles et mis en place une plateforme pour signaler les arnaques, a annoncé, fin octobre, son intention d’interdire purement et simplement le démarchage téléphonique lié au compte personnel de formation. De quoi faire cesser une bonne fois pour toutes les nuisances ? Si la démarche va jusqu’à son terme, les téléprospecteurs n’auront plus qu’à se trouver un nouveau job. En mobilisant leur CPF, par exemple.

Auteur

  • Benjamin d’Alguerre