Face à l’urgence écologique, ce livre de Pierre Veltz sur « L’économie désirable » se distingue par sa fine connaissance de l’industrie et de la société (il est ingénieur et sociologue). Il dresse un état des lieux très instructif des progrès et des lacunes de la décarbonisation d’un monde « hyperindustriel » s’orientant vers les services, où l’explosion de consommation (du numérique notamment) pose problème. « Nous n’avons d’autre choix que d’aller vers une sobriété de conception » juge-t-il. Mais au-delà, le sociologue, très critique « sur la révolution verte du capitalisme » et la taxe carbone, propose un changement de cap : partant de l’essor des initiatives locales dans l’économie du partage, il suggère d’investir massivement dans « une économie humano-centrée » dans les territoires. La santé (au sens large) les métiers du lien social « non dégradés » seraient les piliers de ce modèle productif. À charge pour l’État de « piloter l’ensemble », mais en laissant la main libre aux maires pour développer ces expérimentations, via des partenariats public-privé. Le propos étayé n’a rien de candide : « le localisme ne suffira pas à nous sortir d’affaire », admet l’auteur, mais donne « une boussole ». Cela n’empêche pas une « planification » politique pour bifurquer vers l’écologie. Et l’heure n’est pas à l’empilement des plans. Pierre Veltz appelle à une vision « systémique » de l’écologie qui fait cruellement défaut en France et en Europe. Une réflexion intelligente.

Pierre Veltz, Ed. du Seuil, 128 pages, 11,80 euros