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Idées

Le syndicalisme doit-il changer ?

Idées | Livres | publié le : 01.06.2021 | Lydie Colders

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Le syndicalisme doit-il changer ?

Crédit photo Lydie Colders

Face aux évolutions du travail et de la société, ce livre de deux consultants en relations sociales prône un dialogue social plus coopératif. Le propos assez cédétiste plaira ou non, mais offre une réflexion riche sur l’avenir du syndicalisme.

Exit la lutte des classes, fondement du syndicalisme ? Passant en revue un monde du travail en plein changement, marqué par l’essor des métiers de services peu syndiqués et par l’individualisme, le syndicalisme, affaibli, « est condamné à se réinventer », estiment Michèle Millot et Jean-Pol Roulleau. Si sa vocation reste de protéger les salariés et de lutter pour répartir les richesses, sa culture militante classique ne suffit plus, jugent ces consultants en relations sociales. Très proche de la CFDT, mais sans négliger les autres syndicats, leur livre sur « le renouveau du syndicalisme », dresse un état des lieux fouillé des nouveaux enjeux, illustrés d’exemples. En matière de dialogue social, ils prônent plus de concertation : « trouver des idées » avec les salariés et la direction dans une recherche de performance, donc d’intérêt des emplois, ne serait plus tabou, estiment-ils, cas du « sauvetage » de l’usine Bosch à l’appui. Idem, le bien-être au travail leur paraît un chantier à saisir, via « des espaces de paroles » où les salariés réfléchissent à des aménagements de travail. Mais le syndicalisme peut-il, sans se renier, passer d’une attitude de confrontation à une démarche d’implication, voir de coordination du travail ? » La question est délicate, reconnaissent-ils, car les directions ne jouent pas toujours le jeu. Mais la législation (raison d’être, statut d’entreprise à mission) poussant dans ce sens, il y aurait là un virage à prendre pour les élus.

Des jeunes à l’ubérisation

Avec un taux de syndicalisation les plus bas d’Europe en France, faut-il aller vers un syndicalisme de services ? Si cette idée irrite la culture militante française, et que les syndicats ont moins de prérogatives et de moyens que dans les pays nordiques, les auteurs voient dans certaines initiatives (aides à la reconversion, formation des élus à « l’e-syndicalisme » – défi majeur selon eux, y compris des réseaux ouverts aux sympathisants) – des pistes pour booster le syndicalisme. Et pour convaincre les jeunes allergiques au « dogme syndical ». À condition que les centrales acceptent aussi de leur ouvrir leur organisation. Autre point : l’ubérisation : faut-il créer un syndicat « de néotravailleurs » de VTC qui selon eux, souhaitent restent indépendants ? Ils listent des expériences syndicales (FO Capa-VTC, CGT de la Gironde…) pour s’emparer de cet enjeu de protection des indépendants, qui se heurte à la tradition syndicale. Mais hormis critiquer les chartes et suggérer « des stratégies complémentaires pour organiser ces jobs », les consultants restent trop évasifs sur ce sujet clivant. Leur avis est plus tranché sur la transition écologique et sociale : les syndicats n’ont rien à gagner à s’engager sur ce terrain avec des associations. Selon eux, ce glissement du militantisme vers la société serait énergivore, et le syndicalisme pourrait « devenir hors-sol »… Une lecture progressiste, pas inintéressante.

« Renouveau du syndicalisme : défis et perspectives »

Michèle Millot et Jean-Pol Roulleau, Éd. Le Passeur, 320 pages, 21,50 euros.

Auteur

  • Lydie Colders