Nombreux sont les économistes à se lancer dans les pronostics précis sur la crise se la Covid-19. Dans son essai « Ls capitalismes à l’épreuve des pandémies », Robert Boyer, théoricien de régulation, courant qui scrute l’économie imbriquée dans l’histoire et les rapports sociaux, préfère esquisser des scénarios larges des capitalismes, sur le plan politique et économique. L’ancien directeur de recherches au CNRS analyse longuement cette crise sanitaire inédite, qui a renforcé le rôle des États, contraints de freiner leur idéal néolibéral « en se portant garant de la masse salariale et d’une partie des charges des entreprises ». L’économiste y voit une leçon sur l’importance de d’intervention la puissance publique face à « la surestimation de la capacité des marchés ». Comme d’autres, malgré les aides, il redoute les risques de faillites des sous-traitants, un chômage « keynésien » si la distance sanitaire s’éternise. Gare aux conflits sociaux et aux inégalités. Quant à l’avenir, Robert Boyer aimerait « une bifurcation vers un nouveau modèle orienté vers la transition écologique et la promotion des droits sociaux », mais il n’y croit guère. Il faudra selon lui compter entre d’un côté deux forces renforcées : le capitalisme d’État (celui de la Chine) et celui des plateformes enrichies par la crise. L’offensive des Gafam n’est pas à prendre à la légère, souligne l’économiste. Elle pourrait « désarticuler les systèmes productifs nationaux et polariser les sociétés ». Tout dépendra des alliances entre États…

Robert Boyer, éd. La Découverte, 200 pages, 19 euros.