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Quels seront les survivants ?

Dossier | publié le : 01.05.2001 | F.C.

L'accord Agirc-Arrco du 10 mars dernier a précipité le mouvement de concentration au sein des institutions de prévoyance. Les regroupements devraient s'opérer autour de neuf groupes et faire de nombreuses victimes.

L'engagement figure noir sur blanc dans l'accord du 10 février dernier sur les retraites complémentaires : le Medef laisse un délai de trois ans aux gestionnaires des caisses de retraite pour ramener à 25 au maximum le nombre de groupes en France. Le 26 mars, lors de la négociation des modalités d'application de ce texte, le patronat s'est fait encore plus précis. À compter du 1er janvier 2002, une entreprise nouvelle n'aura le choix qu'entre deux groupes par département. Quand on sait qu'il en existe en France près de 50, dans lesquels on trouve notamment 80 caisses Arrco et 35 caisses Agirc, on imagine la foire d'empoigne dans les prochains mois pour figurer parmi les heureux élus.

Ce débat n'est pas nouveau. Les accords du 25 avril 1996 prévoyaient déjà d'accélérer les rapprochements entre les caisses de retraite et, par voie de conséquence, entre les institutions de prévoyance qui en sont issues. Pendant l'année 1997, les partenaires sociaux ont longuement travaillé sur le sujet, se demandant s'il fallait conserver une, deux ou trois institutions par département ou par région. Alors que l'accord était proche, en 1998, le dossier a été enterré par le CNPF de l'époque, sur le conseil exprès de la FFSA. Car il ne fallait pas mécontenter les agents généraux d'assurances en réduisant leurs chances de pénétrer dans les entreprises. Ce qu'ils font par le biais des institutions de prévoyance.

Le mouvement de concentration qui s'était ralenti va donc reprendre de plus belle. Une imposante étude réalisée pour le compte du pôle assurances du groupe Dafsa tente de décrire le développement des principaux groupes et fait ressortir quatre grandes tendances. La principale reste la montée en puissance des assureurs paritaires sur le marché clé de la santé. Concrètement, la progression des institutions de prévoyance se situait à + 7 % en 1999, alors que celle des compagnies d'assurances restait inférieure à + 1 %. Autre ligne de force, la part des dépenses d'action sociale des institutions de prévoyance est en net recul : – 27 % entre 1993 et 1999 (– 44 % par personne protégée). Il existe donc un risque sérieux que les IP perdent ce qui faisait leur spécificité et qu'elles en souffrent en termes d'image. Par ailleurs, tous les groupes ont intégré l'épargne salariale dans leur stratégie de développement. D'abord parce que le plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV) créé par la récente loi Fabius peut servir de socle à la constitution d'une épargne en vue de la retraite. D'autre part parce que les groupes paritaires bénéficient d'un avantage de taille par rapport aux autres intervenants, les plans d'épargne d'entreprise (PEE) pouvant se mettre en place au niveau d'une branche. Mais à l'exception de ceux qui disposent déjà d'une bonne expertise en interne (CRI avec Inter Expansion, Prémalliance avec Prado Épargne et Pro BTP avec Said Gestion), il leur faudra trouver des partenaires spécialisés pour explorer ce marché.

10 groupes leaders et 35 opéables

Dernière donnée, Internet devrait constituer un moyen formidable pour les systèmes paritaires de compenser la faiblesse de leur réseau commercial afin de se développer auprès des clientèles individuelles. La plupart des grands groupes projettent en tout cas de mettre en place des sites leur permettant de vendre des contrats santé, auto et multirisques habitation. C'est le cas de l'AG2R, qui dispose déjà de 135 téléopérateurs et envisage d'augmenter cet effectif de 70 %. Au final, et c'est évidemment ce que retiendront les gestionnaires d'institutions de prévoyance, les auteurs de l'étude Dafsa confirment qu'à moyen terme il ne devrait subsister guère plus d'une vingtaine de groupes paritaires.

Quels seront alors ces survivants ? Il y a d'abord les groupes qui ont vocation à servir de « réceptacles » pour les autres institutions. En font partie les groupes qui bénéficient d'un positionnement fort en retraite et en prévoyance (plus de 5 % des cotisations reçues des entreprises sur chacun des deux métiers) avec une culture interprofessionnelle : en premier lieu, l'AG2R, Médéric et Malakoff. Mais on peut également ranger dans cette catégorie un groupe qui dispose d'un positionnement très fort en retraite, mais d'un poids plus relatif en matière de prévoyance : Retraites unies. À côté de ces leaders figurent des groupes qui ont un poids intermédiaire en retraite comme en prévoyance et une culture interprofessionnelle. Ils sont au nombre de six : trois acteurs nationaux, Apri, CRI et Magdebourg ; et trois groupes présents au niveau régional, Apicil, Agira et Prémalliance. Une seconde famille englobe trois groupes qui présentent chacun un talon d'Achille : Mornay, fort en retraite, mais faible en prévoyance ; le groupe Prisme Prévoyance, fort en prévoyance, mais inexistant sur le terrain de la retraite ; enfin, Pro BTP, fort sur les deux métiers, mais monoculturel. Un groupe qui a suscité un rapprochement avec huit autres institutions centrées sur une profession (Agrica, Carcept, etc.). Il ne s'agit pour le moment que d'un cartel d'institutions susceptibles de collaborer sur le marché de la retraite. Mais, en matière de prévoyance, les intentions restent cachées.

Dernière partie du tableau, les groupes « opéables ». L'étude Dafsa en recense 35 qui devraient donc, pour la plupart, disparaître. Mais les deux auteurs distinguent dans le lot deux catégories d'intervenants. Les « condamnés » certains, qui sont au nombre de 17. Ils ne représentent qu'un poids très faible tant dans le domaine de la retraite obligatoire (moins de 1 % des cotisations reçues des entreprises) que dans celui de la prévoyance (moins de 2 % de la collecte de l'ensemble des groupes paritaires). Et puis il y a les « sursitaires ». L'étude en compte 18, dont la moitié, tout au plus, subsistera. Il y a ceux dont la présence est faible sur l'un ou l'autre des deux grands métiers et en position intermédiaire sur l'autre : ils recueillent plus de 1 % des cotisations dans la prévoyance, mais moins de 5 % dans la retraite et, inversement, plus de 2 % des cotisations retraite mais moins de 5 % dans la prévoyance. Agrica, acteur intermédiaire dans les deux grands métiers, mais orienté sur un seul secteur d'activité, figure aussi parmi les sursitaires. Ce classement vaut ce qu'il vaut. Mais le pronostic paraît assuré : plusieurs dizaines de groupes vont bel et bien disparaître.

Auteur

  • F.C.