Et pourtant, certains sont devenus champions dans l’évasion fiscale ou en récoltent des profits insensés. Renversant la vapeur, « L’État entrepreneur » de l’économiste italo-américaine Mariana Mazzucato, écrit en 2013, récemment traduit en français, s’inscrivait à l’époque en réaction à la crise des subprimes et aux politiques d’austérité des États. Mais sa réflexion argumentée, faisant l’éloge de l’innovation publique et appelant à finir avec le mythe « des inventeurs privés de génie » reste actuelle. L’économiste keynésienne retrace l’importance des stratégies publiques au long cours aux États-Unis, dans la révolution numérique, les biotechnologies… Elle affirme : « Les fonds privés ne prendront jamais seuls de tels risques ». L’État seul peut « assumer ce rôle ». Vibrant réquisitoire pour l’innovation publique, notamment pour inventer l’économie verte, l’auteure n’oppose pas public et privé. Mais plaide pour que les États « récupèrent les succès » de ces longues recherches qui bénéficient aux grands groupes. Faute de lutter contre l’évasion fiscale, elle avance d’autres pistes « comme une redevance » payée par les entreprises pour alimenter « un fonds national de l’innovation » ou des prêts d’État soumis à conditions. Une brillante démonstration.

Mariana Mazzucato, éditions Fayard, 384 pages, 24 euros.