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Idées

Se réinventer ? Le bloc-notes de Jean-Claude Mailly

Idées | Bloc-notes | publié le : 24.01.2021 | Jean-Claude Mailly

On a beaucoup glosé et écrit ces derniers mois sur le monde d’après. Le président de la République en personne a déclaré au début de la pandémie qu’il fallait se réinventer et que cela le concernait aussi. Qu’en sera-t-il réellement ?

À n’en pas douter les vieux réflexes ressurgiront : compétitivité coût, réduction du déficit budgétaire et de la dette publique avec les mesures restrictives correspondantes, soft law, en constituent quelques éléments. Les changements ne seront pas automatiques, loin s’en faut. Qui plus est, les tensions en la matière risquent de ressurgir au niveau européen freinant de nouveau les réformes indispensables des traités. Et il est encore trop tôt, après l’élection américaine, pour entrevoir un retour du multilatéralisme nécessaire notamment au regard de l’expansionnisme chinois. Les débats auront lieu, y compris à l’approche de l’élection présidentielle.

De fait, la pandémie derrière nous, nous allons vivre une nouvelle période charnière concentrée sur les questions sociales, économiques, industrielles, sociétales, environnementales et psychologiques et, dès lors, démocratiques.

Ne rien changer serait irresponsable au plan européen et national en particulier.

S’agissant du secteur public, renforcer l’organisation et le fonctionnement de l’administration, déconcentrer des décisions, réformer l’ENA, remplacer le verticalisme par la concertation systématique font partie des nécessités.

S’agissant de l’entreprise, des tendances qui émergent doivent rapidement être confortées et développées. Demain l’entreprise qui ignorera ses parties prenantes, qui ne fera de la RSE qu’un objet de marketing, qui ne développera pas sérieusement l’extra-financier, périclitera.

Cela signifie que les actionnaires et dirigeants ne devront plus être prioritaires mais être une partie prenante comme les salariés, les fournisseurs, les clients et les collectivités. Ce qui conduit l’entreprise à réfléchir et évoluer dans un écosystème où la rentabilité voisine avec le social, le sociétal et l’environnement.

De la même manière les investissements dits ISR où l’on ne mesure pas les effets concrets devront progressivement céder la place à des investissements à impact social ou environnemental mesurables, contrôlables et sanctionnables.

Sur ces questions la France et l’Europe doivent accélérer sous peine de se voir imposer un modèle anglo-saxon comme nous l’avons vu en matière comptable avec les normes IFRS.

Créer de la cohésion et construire

Toute crise étant à la fois danger et opportunité la période à venir devrait être essentielle. Avec la pandémie les inégalités et la pauvreté ont augmenté, le rapport au travail a évolué notamment avec le télétravail, y compris quant à ses conditions d’exercice et par rapport à celles et ceux qui ne pouvaient y avoir accès. Près d’un salarié sur deux, comme le révèle le sondage Synopia/Ifop, n’arrive plus à se projeter dans l’avenir. Il va donc falloir créer de la cohésion et construire à moyen et long terme. Sans exclure des tensions et conflits possibles. Comment réagiront celles et ceux qui n’auront plus rien à perdre parce qu’ils auront tout perdu : leur commerce, leur entreprise, leur emploi quand les aides publiques diverses et importantes cesseront progressivement ?

À n’en pas douter réussir une telle réinvention ne se décrète pas, cela nécessite volonté, débat, compromis, détermination, définition d’un projet, c’est-à-dire un vrai exercice démocratique.

Auteur

  • Jean-Claude Mailly