Cet ouvrage, dont le titre pastiche – celui de Michel Crozier, constitue le volume 3 de la série « Lost in management » (second clin d’œil, cette fois cinématographique) qui explore les errements en ce domaine. Mais dans ce tome 3, le sociologue François Dupuy suggère des solutions pour sortir du modèle taylorien. Bien qu’il fasse perdre le sens de la finalité du travail, une bonne partie des salariés concernés défend ce modèle qui les dispense de trop s’investir, de coopérer, voire de rendre des comptes. Ce système, coûteux pour les employeurs, a volé en éclat avec la mondialisation, synonyme de concurrence accrue. Pour améliorer leurs performances, les entreprises ont voulu promouvoir la transversalité, la coopération et le fonctionnement en mode projet, en ignorant les effets induits de ces nouvelles formes d’organisation sur le personnel. Conséquence ? Faute d’être accompagnés dans ce changement, nombre de salariés, y compris les cadres, ont rejeté ces innovations et se sont désengagés de leur travail. Les entreprises ont alors riposté par un surcroît de procédures, de reporting et d’indicateurs de performance pour mieux contrôler leur travail. Mais « plus il y a de règles, plus la probabilité est forte qu’elles deviennent contradictoires les unes avec les autres, et plus il devient nécessaire pour les acteurs d’accepter de les transgresser afin que la machine fonctionne tout de même. Ainsi, ceux qui décident perdent-ils le contrôle en croyant le renforcer ». Pour sortir de l’impasse, François Dupuy invite les dirigeants à miser sur le management par la confiance plutôt que par la coercition, à prendre des décisions qui tiennent compte des acquis des sciences sociales, de l’observation du terrain et de leur expérience voire de leur intuition. Moyennant quoi ils parviennent à transformer leur entreprise, comme en attestent les cas d’école sur lesquels l’auteur est intervenu. Et pourtant, regrette François Dupuy, beaucoup de firmes persistent à plaquer des solutions toutes faites bien plus chères, « sorties du placard à benchmarks », proposées par de grands cabinets de conseil qui disposent, il est vrai, d’une plus grande légitimité qu’un sociologue.

François Dupuy, édition du Seuil, 240 pages, 23 euros.