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Idées

L’impossible équilibre

Idées | Bloc-notes | publié le : 01.11.2020 | Jean-Claude Mailly

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L’impossible équilibre

Crédit photo Jean-Claude Mailly

Tout équilibre est fragile, autrement dit « l’équilibre est un déséquilibre permanent ». Nous le vérifions actuellement avec la pandémie et ses conséquences économiques et sociales. Le défi consiste à garantir la meilleure protection sanitaire possible de la population tout en assurant au maximum l’activité économique. Toute protection excessive tue l’économie et fait des ravages sociaux : laisser faire, c’est prendre le risque d’une forte augmentation du nombre de malades et de décès. Si les hospitalisations et les décès dus à la Covid-19 sont recensés, nous ne mesurons pas les décès indirects liés à l’absence de soins, aux reports d’opérations, voire à des suicides provoqués par la chute des moyens de subsistance. N’oublions pas qu’en Grèce, l’explosion du chômage et de la pauvreté liée à la mise en œuvre de l’austérité après la crise financière de 2008 a provoqué une hausse des suicides de 28 %.

Confinement, déconfinement et reconfinement partiels se succèdent, générant des à-coups psychologiques déstabilisants pour une grande partie de la population, l’incertitude étant source d’inquiétudes et d’imprévisibilité sociale.

Certes, cette incertitude perdurera tant que le virus circulera et qu’il n’y aura pas de traitement efficace ou de vaccin.

Certes, les médecins et les scientifiques se contredisent publiquement, envahissant les chaînes info.

Certes, l’épidémie a mis en lumière la fragilité de l’hôpital liée aux politiques budgétaires restrictives et à des réformes perturbant son fonctionnement, montrant la mauvaise organisation entre hôpital public, cliniques et médecine libérale.

Certes, le Gouvernement a mis en œuvre des moyens budgétaires importants et indispensables pour le chômage partiel et les aides aux entreprises.

Il n’en reste pas moins que tous ces évènements prouvent que le système dans lequel nous vivons est fragile, voire mortel. C’est pourquoi, au-delà des réponses indispensables à court terme, il est essentiel de se projeter à moyen et long termes, de retrouver un projet qui redonne espoir, et cela passera nécessairement par des révisions et par des régulations importantes.

Des libertés menacées

Avec la pandémie, les pouvoirs publics ont pris des dispositions « temporaires », souvent par ordonnances, remettant en cause des libertés comme celles concernant la circulation, les rassemblements, les manifestations, ou certains droits en matière de travail, comme la réduction à huit jours des procédures d’information-consultation des représentants du personnel. Il ne faudrait pas qu’à l’instar de ce qu’il se passe aux État-Unis (avec le patriot act adopté après 2001), le temporaire devienne permanent.

Dans la même logique, un respect plus important de la liberté de négociation, convention essentielle de l’Organisation internationale du travail, est indispensable : consulter, concerter et négocier ne sont pas compatibles avec une pratique verticale du pouvoir qui finit par détourner la démocratie vers l’autoritarisme.

Sa réussite dépendra de plusieurs facteurs : la capacité de l’administration à le mettre en œuvre, le contrôle de l’utilisation des sommes versées, la mise en œuvre de contreparties pour les aides ciblées aux entreprises, la nécessité de mesures visant à améliorer les fonds propres ou quasi-fonds propres de nombre d’entreprises, la reconnaissance des salariés dits « de deuxième ligne », « mettre le paquet » sur la formation et sur la reconversion vers les métiers de demain, l’abandon de contre-réformes comme l’assurance-chômage ou la suppression du CHSCT… Les mois à venir seront décisifs, il ne faudra pas oublier de se réinventer !

Auteur

  • Jean-Claude Mailly