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« Le manque de main-d’œuvre est une limite à la réindustrialisation »

Décodages | Emploi | publié le : 01.06.2020 |

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« Le manque de main-d’œuvre est une limite à la réindustrialisation »

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L’épidémie de Covid-19 a fait prendre conscience de la dépendance de la France aux importations sur plusieurs produits clés. De quoi faire avancer les débats déjà anciens sur les relocalisations ?

Thierry Weil : En effet ! Il y a quelques années encore, l’industrie, c’était ringard et on nous prescrivait de tout miser sur l’économie de la connaissance et sur les services… Cette crise montre la pertinence de relocaliser certaines activités. Par exemple, les hôpitaux ou l’Assurance-maladie peuvent avoir intérêt à acheter ou à rembourser des médicaments produits en Asie un peu moins cher que dans des usines du Calvados. Mais au niveau de la nation, qui indemnise les chômeurs et qui perd des recettes fiscales et des cotisations sociales, ce n’est pas une bonne affaire. Et quand tout le monde a besoin de médicaments, il est prudent de ne pas dépendre totalement de fournisseurs étrangers.

Pourquoi est-il parfois difficile de développer l’industrie en France ?

T. W. : Le goulet d’étranglement est souvent la possibilité de recruter les salariés qualifiés indispensables. Former de la main-d’œuvre prend du temps. Dans un autre domaine, on a vu, pendant la crise, que les agriculteurs avaient du mal à trouver la main-d’œuvre pour les récoltes. Nombre de personnes ont manifesté leur intérêt, mais elles n’ont pas été retenues car elles n’avaient ni le savoir-faire ni l’endurance des saisonniers.

Pour contourner ce problème mais aussi le coût de la main-d’œuvre plus élevé en France qu’en Chine, certaines entreprises ayant relocalisé ont privilégié l’automatisation aux embauches. Un mauvais signal ?

T. W. : Le recours à la robotisation permet de devenir plus efficace, plus compétitif et donc de gagner de nouveaux clients, et par la suite de s’agrandir et donc de recruter. Derrière les robots, il y a des humains. Pour les construire, les adapter et les installer, mais aussi pour les faire fonctionner. Les entreprises créent des emplois et forment leurs salariés pour des tâches plus qualifiées. L’avenir de l’industrie se joue beaucoup sur les domaines émergents : agriculture de précision, santé digitale, biothérapie, décarbonisation de l’industrie. Les besoins d’énormes quantités de masques, de gel hydroalcoolique ou de respirateurs sont exceptionnels. Plutôt que de construire des usines spécialisées, mieux vaut tirer parti de l’agilité et de la flexibilité d’usines capables de se reconfigurer facilement, grâce à une main-d’œuvre qualifiée et polyvalente et aux technologies de l’industrie du futur.