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Édito

Rien ne s’est passé comme prévu

Édito | publié le : 01.01.2020 | Jean-Paul Coulange

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Rien ne s’est passé comme prévu

Crédit photo Jean-Paul Coulange

Alors que l’exécutif s’était plutôt bien sorti de la longue séquence des « gilets jaunes », il s’est heurté avec fracas au fameux mur des retraites. « Mère des batailles », « réforme explosive », « tournant du quinquennat », toutes les périphrases avaient été employées pour décrire cette nouvelle étape du mandat d’Emmanuel Macron. Quand d’aucuns rappelaient le précédent de 1995, d’autres soulignaient avec justesse que, depuis une trentaine d’années, le système de retraites français est en état de réforme permanente. Hormis la retraite à 60 ans, offerte aux Français par François Mitterrand après 1981, toutes ces retouches successives ont eu pour principe de retarder l’âge de départ et de rallonger la durée de cotisation, quand il ne s’agissait pas d’alourdir les prélèvements et de réduire les prestations versées aux retraités. La gamme complète des mesures paramétriques y est passée.

Rien de tel avec la « réforme Macron », nous a-t-on annoncé. Promise pendant la campagne présidentielle, lancée durant la première moitié du quinquennat, la version 2019 se voulait simple, juste et transparente : un régime universel, par points, où chaque euro cotisé donne les mêmes droits. Ajoutez à cela une longue période de concertation et de travail (18 mois) entre les organisations syndicales et un haut-commissaire ad hoc, suivie d’un rapport de synthèse et de propositions remis à l’été 2019, avant l’élaboration d’un projet de loi, qui aurait même pu être voté avant les élections municipales, si tout s’était déroulé selon le plan de marche concocté entre l’Élysée et Matignon. Or, rien ne s’est passé comme prévu.

Avec le recul, il est évidemment aisé de refaire l’histoire : une réforme éminemment complexe, consistant à faire rentrer dans un seul dispositif les 42 régimes existants, avec leurs règles, leurs spécificités, leurs avantages, leurs exceptions ; un sujet hautement anxiogène pour nos concitoyens pourtant convaincus de la nécessité d’une réforme ; des divergences de vues au sein de l’exécutif entre les partisans de mesures paramétriques pour rétablir l’équilibre financier en 2025 et les tenants d’une seule refonte systémique ; des syndicats marginalisés depuis deux ans et demi et pressés d’en découdre ; des cheminots échaudés depuis la récente réforme de la SNCF ; des enseignants et des personnels hospitaliers en colère… La suite, on la connaît, jusqu’à ce 17 décembre qui a vu une CFDT pourtant favorable à un régime de retraite universel par points défiler (loin) derrière les syndicats contestataires, pour protester contre la mesure paramétrique de l’âge pivot de 64 ans. Si gouverner c’est prévoir, on a du mal à imaginer que l’Élysée et Matignon aient anticipé un tel scénario.

Auteur

  • Jean-Paul Coulange