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Idées

De si petites différences

Idées | Livres | publié le : 01.12.2019 | Irène Lopez

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De si petites différences

Crédit photo Irène Lopez

En déclin depuis les années 1970, le monde ouvrier a cédé la place aux classes populaires. Mais qui définissent-elles ? Ce livre dresse le portrait de ceux qui « descendent » vers les classes moyennes et ceux qui s’enfoncent dans la précarité, voire dans la pauvreté.

Fin d’une époque… Là où il a pu exister autrefois un monde ouvrier se déploient aujourd’hui des classes populaires. Le constat n’est pas nouveau. Ce qui l’est, en revanche, c’est la fine description de tout ce qui les sépare. L’ouvrage, codirigé par les chercheurs Nicolas Duvoux et Cédric Lomba, étudie les classes populaires à travers le travail et l’emploi, les trajectoires résidentielles, les conditions de revenus, les pratiques culturelles, les ressorts moraux… Nous sommes très loin des statistiques « aseptisées » de l’Insee. Les situations retranscrites sont de l’ordre du vécu. Si les trois premiers chapitres sont intéressants (« L’exigence ouvrière d’égalité », « La rénovation urbaine et fragmentation des classes populaires », « Au hasard de la logistique. Quand les mobilités ouvrières passent par l’entrepôt »), les deux derniers sont passionnants. « De si petites différences. Conduites économiques et segmentation sociale », par Ana Perrin-Heredia, montre comment trois femmes vivent différemment avec un même niveau de revenu. Ce sont parfois de petits riens qui distinguent leur situation. Dix euros à la fin du mois font toute la différence : celle qui les possède remplit ses placards de produits alimentaires sans entamer la paie qui arrive ; celle à qui ils font défaut devra faire les courses avec un crédit personnel, dont les taux d’intérêt empireront la situation par la suite.

Quant au chapitre « Face à la télévision, un miroir des inégalités », par Olivier Masclet, il présente les usages de huit ménages ouvriers et employés d’une ville moyenne de province : « La situation au regard de l’emploi est un premier facteur de différenciation. L’absence d’emploi ou le fait de travailler très peu d’heures assigne au foyer autant qu’au petit écran. Les femmes au foyer passent plus de dix heures par jour dans la proximité du téléviseur (télévision « bruit de fond »). À l’opposé, le temps télévisuel est moindre pour celles et ceux qui ont un emploi régulier, et donc un emploi du temps structuré par le travail salarié : la TV est allumée a` certaines heures pour suivre des programmes précis. Des interdits moraux en gouvernent l’accès : c’est un plaisir qu’on s’accorde après le travail. »

Où va la France populaire ?

Nicolas Duvoux, Cédric Lomba, PUF/Vie des idées, 107 pages, 9,50 euros.

Auteur

  • Irène Lopez