Le monde qui redécouvre le goût de vivre après la Libération est le sien. Dans les pas des Robert Doisneau, Willy Ronis et Henri Cartier-Bresson, Janine Niépce dispose d’une place au Panthéon d’un mouvement qui, par son réalisme poétique, ressuscite l’être humain dans sa vie ordinaire et dans sa dignité, après la Seconde Guerre mondiale et au fil des Trente Glorieuses. Jusqu’au 18 mai, la galerie Polka consacre une rétrospective riche d’une soixantaine de tirages d’époque à cette figure majeure de la photographie humaniste. Sur les clichés, des badauds arborant le béret et la baguette, des rues montmartroises pavées, les cafés de Saint-Germain-des-Prés… Lointaine descendante de l’inventeur de la photographie Nicéphore Niépce, elle capturera la France dans son charme pittoresque, bien que son œuvre est loin de s’y réduire. Témoin privilégiée d’un monde en pleine mutation sociale et économique, cette reporter de presse – l’une des premières – s’attachera à raconter la modernisation des campagnes, les changements de la vie paysanne, les grandes transformations urbaines, la disparition des petits métiers dans un monde devenu technologique, le progrès social, l’évolution de la vie des femmes et leurs revendications pour l’égalité – salariale, en particulier. Animée par la ferveur des mouvements féministes, elle immortalisera les ouvrières grévistes de la fabrique de Herstal, en Belgique, et les premières grandes manifestations du MLF. À une période où les femmes photographes n’ont guère de place dans la profession, Janine Niépce réussira à imposer son regard sur ce monde bouleversé.

Jusqu’au 18 mai 2019, Galerie Polka à Paris (III^e).