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Former des talents aux postes de direction : un exercice mondial

Dossier | publié le : 01.03.2019 | Lys Zohin

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Former des talents aux postes de direction : un exercice mondial

Crédit photo Lys Zohin

Les entreprises ne se contentent plus de préparer leurs futurs dirigeants à partir du siège. Elles repèrent les hauts potentiels partout dans le monde.

Le Portugais Carlos Antunes Tavares, à la tête du Groupe PSA. L’Allemand Thomas Buberl, patron d’Axa. Le Belge Dirk Van de Put, CEO de Mondelez International. Le Britannique Steve Easterbrook, chez McDonald’s. L’Indien Satya Nadella, directeur général de Microsoft… Autant de dirigeants de haut vol qui ont souvent fait leurs classes dans l’entreprise qu’ils dirigent aujourd’hui. Car si l’habitude était, jusqu’à ces dernières années, de préparer des hauts potentiels venus exclusivement du siège, où qu’il soit, afin qu’ils puissent un jour prendre des postes de direction, les choses ont changé. Les multinationales cherchent désormais à détecter les talents partout dans le monde. Une politique globale qui répond à des enjeux tout aussi mondiaux. « Ce n’est pas la nationalité qui compte, confirme ainsi Latifa Taleb-Serre, head of international mobility chez L’Oréal, ce sont les compétences. » Conséquence de cette politique RH mondiale, des groupes comme L’Oréal gèrent les carrières et organisent un parcours qui pourra mener un haut potentiel chinois, ou indien, ou autre, vers un poste sur toute l’Asie, puis éventuellement au siège, à Paris, par exemple.

Pas étonnant que les leadership programs se multiplient dans les grands groupes. Chacun a son idée. IBM envoie des équipes spéciales dans ses filiales à travers la planète, pour repérer les futurs leaders. En Inde, Bertelsmann propose à ses hauts potentiels de suivre un executive MBA à l’Insead, tandis que Diageo mise, entre autres, sur l’Afrique. Car c’est de là que viennent souvent les solutions de marketing les plus innovantes, selon l’entreprise… Au point que certaines multinationales se demandent s’il faut encore que ces futurs leaders aient une expérience dans un pays fortement industrialisé !

Concurrence locale

La stratégie de recherche et de préparation de talents à l’échelle du globe s’appuie sur plusieurs constats. D’abord, la concurrence, de plus en plus forte, avec les entreprises locales. De fait, si la perspective de travailler dans un grand groupe international motivait nombre de talents il y a encore quelques années, les plus jeunes, aujourd’hui, cèdent parfois aux sirènes des start-up locales, gage d’une carrière tout aussi excitante, et peut-être tout aussi internationale in fine… Dans ces conditions, mieux vaut, pour les multinationales, proposer rapidement le fameux leadership program aux meilleurs afin de les retenir. Autre constat – qui n’est pas forcément vrai dans tous les grands groupes : le fait que, selon certains, les ressortissants des pays riches et développés sont moins enclins que les nouveaux venus sur la scène économique mondiale à vouloir s’expatrier. Là encore, si cette tendance se confirme, mieux vaut, pour les multinationales, chercher les hauts potentiels ailleurs qu’au siège. Ils pourront, grâce à des expériences variées, apporter leur savoir-faire, leur flexibilité et leur multiculturalisme à l’entreprise, qui opère partout dans le monde. Enfin, la stratégie traditionnelle des grands groupes (expatrier pour un temps des talents, afin, éventuellement, de leur fournir une expérience internationale qui leur servira dans des fonctions de direction) coûte cher et n’est plus forcément nécessaire. « Comment justifier d’envoyer un Français du siège à Shanghai, alors que les universités là-bas sont mieux cotées que les nôtres et que les talents locaux sont disponibles ? » se demande ainsi Antoine Voisard, spécialiste des RH internationales pour le groupe Bolloré. Même chose chez Schneider Electric, où Marie Vezy, RH global pour le groupe, prépare activement la gestion de carrière de professionnels venant de « pays tiers ».

Relais de croissance

D’autant que c’est souvent dans ces pays que se trouvent les relais de croissance des grands groupes. Or, qui mieux qu’un Chinois comprendra la demande des clients locaux ? Qui mieux qu’un Indien saura opter pour la bonne stratégie et conquérir le sous-continent ? Qui mieux qu’un Brésilien pourra négocier les virages nécessaires pour s’adapter aux changements réglementaires, politiques et économiques du pays ? Autant dire qu’en matière de préparation des hauts potentiels, le paysage est en plein bouleversement. Alors qu’il y a encore quelques années, plusieurs firmes américaines se situaient aux cinq premières places du palmarès des Top Companies for Leaders (2014) d’Aon Hewitt, avec General Electric, IBM et General Mills, accompagnées de Hindustan Unilever (Inde) et ICICI Bank (Inde), ce classement pourrait bien être chamboulé à mesure que toutes les multinationales – françaises en tête – auront revu leurs programmes de leadership development dans le cadre de leur politique RH globale.

Auteur

  • Lys Zohin