logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Idées

« Alerte Jaune » Les inégalités au cœur de la crise

Idées | Bloc-notes | publié le : 01.01.2019 | Gilles Gateau

Image

« Alerte Jaune » Les inégalités au cœur de la crise

Crédit photo Gilles Gateau

Il a surgi brutalement, et pourtant personne n’est vraiment surpris car ses racines sont connues. Il ne bouscule pas seulement le président de la République, il se méfie de nos institutions et corps intermédiaires. Il paraît « si français », peuple rebelle et frondeur, mais son « dégagisme » nous fait penser – avec pas mal d’effroi – à beaucoup de nos voisins, de Trump à Bolsonaro, du 5 étoiles italien au Brexit. Bref, c’est peu dire que le mouvement des Gilets Jaunes bouscule et déroute, par sa forme inédite, par la sympathie qu’il trouve dans l’opinion malgré les violences, par les revendications – et contradictions – qu’il porte.

Difficile, à l’heure d’écrire ces lignes, de prédire la fin de l’histoire. Mais on peut déjà risquer trois leçons, qui ne surprendront pas les lecteurs de Liaisons Sociales Magazine, rompus à la complexité du Social.

Une fois de plus, c’est la question des inégalités qui est au cœur de la crise. Ce n’est une découverte pour personne, et pourtant nous ne prenons toujours pas la véritable mesure de ce que le ressentiment né de ces inégalités peut provoquer. Nos « amortisseurs sociaux » pourtant puissants – et enviés partout dans le monde – ne suffisent plus, d’autant que leur financement génère une pression sociale et fiscale accrue qui, mal répartie, peut accroître ce sentiment d’inégalité. La hausse de la fiscalité sur le diesel, alors que l’ISF disparaissait, a formé, quoi qu’on en pense, un cocktail explosif.

Trouver des issues négociées

Au-delà du « rationnel » des inégalités, ce qui frappe dans ce mouvement c’est l’expression d’un manque de reconnaissance, le sentiment de « compter pour rien », d’être « ignoré » par « ceux d’en haut ». Ici, mesures fiscales et de pouvoir d’achat ne suffiront pas : il faut aussi des mots et une pratique du pouvoir qui renouent le lien, avec plus d’empathie et de proximité. Cela passe nécessairement par nos fameux « corps intermédiaires » : une leçon spectaculaire des dernières semaines, c’est « seul on va vite » mais « ensemble on va plus loin »…

Ce qui nous amène à la question de la représentativité. De ce point de vue aussi le mouvement des Gilets Jaunes inquiète, et confine au nihilisme social et politique : refuser toute forme de représentation c’est refuser l’idée de négocier et de trouver des compromis (« Macron tu te soumettras » a-t-on lu ici ou là). Il y a longtemps que le syndicalisme, qui en a connu bien d’autres des crises sociales, a compris que l’intérêt des uns et des autres passe par la capacité à trouver des issues négociées. Les partenaires sociaux – syndicats comme organisations patronales – doivent travailler pour prouver que la négociation, à tous les niveaux, est la meilleure voie pour que chacun soit pris en considération. C’est vital pour que les réformes dont le pays a besoin se poursuivent, dans l’équilibre et la justice sociale.

Et les entreprises ?

Elles ne sont pas loin…

La tentation sera grande de faire appel à elles pour trouver les mesures de pouvoir d’achat attendues. Mais leur implication ne s’arrête pas là. Elles-mêmes ne sont pas à l’abri d’un risque de « Giletsjaunesnisation » de leurs propres relations sociales, avec des NAO 2019 tendues par l’impact « psychologique » du prélèvement à la source. Une menace qui doit inciter management et acteurs sociaux à soigner leur dialogue, pour montrer que modernisation et compétition peuvent rimer avec inclusion, reconnaissance et bienveillance…

Ce défi de la société française, vital pour notre avenir collectif, traverse aussi les entreprises. Elles peuvent montrer, sur ce terrain, des capacités d’initiatives et d’innovation plus nécessaires que jamais !

Auteur

  • Gilles Gateau