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Les effets encore incertains de la fusion Agirc-Arrco

Dossier | publié le : 01.12.2018 | Irène Lopez

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Les effets encore incertains de la fusion Agirc-Arrco

Crédit photo Irène Lopez

Les régimes Agirc et Arrco fusionnent au 1er janvier 2019 en un seul, Agirc-Arrco. Piloté et géré par les partenaires sociaux, il s’inscrit dans la continuité des deux entités. Plus simple et plus lisible, il pourrait préfigurer le régime unique souhaité par le président de la République. Pour 80 % des salariés, la fusion Agirc-Arrco ne changera rien. Quid des 20 % restants ?

Les partenaires sociaux ont entériné la fusion de l’Agirc-Arrco au 1er janvier 2019 via l’accord national interprofessionnel du 17 novembre 2017. Les porte-parole du GIE Agirc-Arrco se veulent rassurants : « Cette fusion s’inscrit dans un mouvement continu de convergence de la retraite complémentaire. Les deux régimes Agirc et Arrco n’ont eu de cesse de tendre vers une même dynamique de leurs réglementations, de leurs paramètres de fonctionnement et de leurs structures ». Hors langue de bois, le but de la fusion est de mutualiser les ressources financières des deux caisses et, dans ce contexte, sauver l’Agirc (le régime de retraite complémentaire des cadres) dont le régime unique en Europe est en difficulté, en raison du vieillissement de ses cotisants et du ratio actifs/retraités trop bas pour assurer la continuité du versement des pensions aux ayants droit.

Pour 80 % des salariés, pas de changement

Il est vrai que les principes de fonctionnement restent identiques : un régime par répartition piloté et géré par les partenaires sociaux et un système par points. Chaque année, les cotisations sont transformées en points de retraite. Pour connaître le montant de sa retraite, il suffit de multiplier le nombre de points acquis par la valeur du point fixée tous les ans.

À compter du 1er janvier 2019, chaque salarié disposera d’un compte de points de retraite complémentaire unique comprenant l’ensemble des points acquis tout au long de sa carrière dans une ou plusieurs entreprises relevant du régime Agirc-Arrco, y compris pour les périodes antérieures au 1er janvier 2019. Pour un salarié non cadre, le nombre de points reste le même : un point Arrco égale un point Agirc-Arrco. Pour 80 % des salariés, la fusion Agirc-Arrco ne change donc pas leur décompte de points. Seuls les points Agirc sont convertis. Pour un cadre, les points Arrco et les points Agirc sont regroupés au sein d’un seul compte de points. Au 1er janvier 2019, les points Arrco deviennent sans conversion des points Agirc-Arrco, les points Agirc sont convertis en points Agirc-Arrco. La formule est la suivante : nombre de points Agirc x 0,347791548 = nombre de points Agirc-Arrco. Un double affichage du nombre de points avant et après la conversion sera mis en place afin de faciliter la lecture.

La fusion de ces régimes de retraite complémentaires Agirc-Arrco va impacter, en revanche, la gestion des paies. Que ce soit en entreprise ou en cabinet d’expertise comptable, plusieurs étapes sont à prévoir pour affronter sereinement ces changements. Après la compréhension de la réforme, l’information des parties prenantes est de mise. Des documents de communication sont disponibles sur le site www.agirc-arrco.fr. La mise à jour ou le paramétrage des logiciels de paie vont également être un passage obligé. Enfin, la formation des équipes RH ou gestionnaires de paie est impérative. Outre les changements de process et de fonctionnement, ils seront nécessairement en première ligne en cas de questions sur la fusion des régimes Agirc-Arrco.

Des évolutions dans les logiciels de paie

Très concrètement, sur les bulletins de salaire, quatre principaux changements sont à prévoir. Tout d’abord, la modification des tranches : les cotisations de retraite complémentaires restent calculées sur les rémunérations fractionnées par tranches. Celles-ci sont revues, et, à partir du 1er janvier 2019, deux tranches seront mises en place : T1, pour la fraction de rémunération dans la limite du plafond de Sécurité sociale (autrement dit les revenus allant jusqu’à 39 000 euros bruts annuels) et T2, pour la fraction de rémunération comprise entre un et huit plafonds de Sécurité sociale. Ensuite, les contributions sont modifiées. L’objectif de la contribution d’équilibre général (CEG), issue de la fusion de l’AGFF (dispositif de financement permettant l’alignement des conditions de départ en retraite à taux plein) et de la GMP (système de garantie minimale de points), est de compenser les charges financières résultant des départs à la retraite entre 62 et 67 ans et de maintenir les droits des salariés cadres ayant bénéficié de la GMP. La CEG sera appelée au taux de 2,15 % sur la T1 et de 2,70 % sur la T2.

La contribution d’équilibre technique, applicable aux salariés dont la rémunération sera supérieure au plafond de la Sécurité sociale, sera prélevée à un taux unique de 0,3 % sur les T1 et T2. La cotisation AGFF, la GMP et la CET (contribution exceptionnelle et temporaire) seront parallèlement supprimées. Autre point important pour les salariés : la répartition des cotisations avec l’employeur est maintenue. Les cotisations seront réparties à hauteur de 60 % en part patronale et de 40 % en part salariale. Les employeurs pourront appliquer une répartition plus favorable pour les salariés. Ce mode de répartition ne s’appliquera pas à certaines entreprises sous cas particulier (par exemple celles visées par une convention ou un accord collectif de branche antérieur au 25 avril 1996) ; des répartitions dérogatoires sont également prévues. Enfin, le taux d’appel de ces cotisations est modifié et sera porté à 127 % (au lieu de 125 % à ce jour). Cette évolution de la gestion des retraites complémentaires entend bouleverser un système unique en Europe. Mais ses répercussions ne pourront être évaluées que sur le moyen terme.

Christel Bonnet, consultante retraite chez Mercer, société spécialisée dans le conseil en ressources humaines, santé prévoyance et retraite.
« Les cadres les moins bien payés seront pénalisés ! »

Les retraités français sont-ils à plaindre ?

D’après le dernier rapport annuel de Mercer, la France possède le régime de retraite le plus généreux au monde. En effet, le système français offre le meilleur niveau de vie à ses retraités. En revanche, la pérennité du régime français semble inquiéter les analystes de Mercer. Et pour cause, l’Hexagone pointe à la 24e place, juste derrière l’Allemagne. Le problème est que tout repose sur les régimes obligatoires, qui fonctionnent par répartition. Il n’y a donc aucun préfinancement. Et la dette de ces régimes est équivalente à une part très importante du PIB.

Que montre la fusion Agirc-Arrco ?

Cette fusion donne un premier aperçu de ce que pourrait impliquer la réforme des retraites impulsée par le président de la République, qui souhaite notamment mettre en place un régime unique, impliquant donc la disparition des 37 régimes actuels et de leurs avantages respectifs.

Quel sera l’impact de la fusion Agirc-Arrco ?

Dans le cas présent, la convention collective nationale Agirc de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 disparaîtra dans le cadre de la fusion « Agirc-Arrco », ce qui pénalisera en particulier les cadres rémunérés en dessous de certains seuils. Elle entraînera en effet la disparition de la garantie minimale de points (GMP) prévue par l’Agirc, qui permettait d’atteindre le seuil des 120 points de retraite réglementaires pour les cadres gagnant en dessous de 43 336 € brut par an.

La « retraite des cadres » a 70 ans

1947 : création du régime Agirc pour les cadres.

1962 : création de la fédération Arrco, chargée de généraliser la retraite complémentaire et de coordonner plusieurs régimes complémentaires de salariés.

1972 : généralisation de la retraite complémentaire des salariés et des anciens salariés.

1996 : premier accord national portant des dispositions communes à l’Agirc et à l’Arrco.

1999 : création au 1er janvier du régime unique de retraite complémentaire Arrco. Il se substitue aux 44 régimes membres de l’Arrco.

2002 : mise en œuvre de l’unicité de service : une seule institution de liquidation. Les deux régimes Agirc et Arrco restent distincts mais ils travaillent à la création d’un système informatique unique, à la convergence de leurs réglementations, leurs process et de leurs services.

2015 : accord du 30 octobre définissant le cadre de fonctionnement du régime Agirc-Arrco au 1er janvier 2019.

2017 : accord du 17 novembre instituant le régime Agirc-Arrco.

2019 : entrée en vigueur du régime Agirc-Arrco au 1er janvier.

Auteur

  • Irène Lopez